L'Atlas linguistique de la Wallonie (en abrégé A.L.W.), ou Tableau des parlers de la Belgique romane, est un ouvrage en plusieurs volumes rédigé depuis 1953 à partir d'enquêtes dialectales menées dès 1920, qui recense les différentes occurrences de mots wallons, picards, gaumais, champenois (dialecte ardennais).

Présentation

[modifier | modifier le code]

L’Atlas linguistique de la Wallonie (ALW) se veut une présentation aussi complète que possible des parlers wallons, picards, lorrains et champenois (dialecte ardennais) de la Belgique.

Actuellement[Quand ?], dix volumes sur les vingt prévus ont été publiés (volumes 1 à 6, 8, 9, 15 et 17). Le premier tome traite de l'aspect phonétique des patois et présente l'ensemble du projet. Le deuxième tome envisage l'aspect morphologique. Les autres tomes étudient le lexique belgoroman par champs notionnels : phénomènes atmosphériques et divisions du temps (tome 3) ; maison et ménage (tomes 4 et 5) ; terre, plantes et animaux (tomes 6 à 8) ; ferme, culture et élevage (tomes 9 à 11) ; métiers et outils (tomes 12 et 13) ; corps humain et maladies (tomes 14 et 15) ; actes et gestes de l’homme (tome 16), vie sociale (tomes 17 & 18), vie intellectuelle et morale (tome 19), vocabulaire abstrait (tome 20).

Contrairement à l'Atlas linguistique de la France et à d'autres atlas linguistiques, l'Atlas linguistique de la Wallonie (ALW) ne se contente pas de présenter les données linguistiques brutes. On cherche à expliquer celles-ci dans un cadre historique gallo-roman, à les classer afin de donner au lecteur le moyen de comprendre. Pour plus de lisibilité, les cartes qui accompagnent la plupart des notices ne contiennent pas des formes, mais des symboles représentant des types (phonétiques, morphologiques et/ou lexicaux) dégagés par l'analyse.

Genèse du projet

[modifier | modifier le code]

Enquêtes linguistiques

[modifier | modifier le code]

Bien que Jules Gilliéron et Edmond Edmont reprenaient déjà quelques localités belgoromanes dans l'Atlas linguistique de la France et bien que Charles Bruneau avait mené une enquête linguistique des patois d'Ardennes, il faut attendre 1920 pour qu'une campagne d'enquêtes linguistiques soient réalisées sur l'ensemble de la Wallonie. C'est Jean Haust, philologue classique et dialectologue chevronné devenu titulaire du cours de dialectologie wallonne créé à l'université de Liège, qui conçoit le projet d'une vaste enquête sur les patois romans de la Belgique. Son désir était de pouvoir réunir une documentation fiable qui constituerait une base solide pour ses recherches et ses cours.

Après avoir établi un questionnaire de 2 100 questions qui lui permettait de recueillir environ 4 500 mots ou formes, il enquêta en 210 points. Autant de communes, de villes, de hameaux qu'il parcourut entre 1924 et 1946, date de sa mort. Avec lui et après lui (jusqu'en 1959), ses élèves et ses continuateurs portèrent le nombre à 342 points visités, de sorte que l'ensemble de la Wallonie était ainsi richement documentée.

Présentation des résultats sous format papier

[modifier | modifier le code]

Une fois récoltée cette immense matière documentaire, il a fallu mettre en place le mode d'exploitation. En effet, chaque réponse était répertoriée sur fiche, ce qui empêchait une comparaison aisée des données récoltées.

Ce sont Louis Remacle et Élisée Legros qui dessinèrent les bases du projet éditorial. Le programme global fut fixé d'emblée. Chacun prit en charge l'aspect pour lequel il était le plus compétent : Louis Remacle envisagea les aspects phonétiques et morphologiques, Élisée Legros entreprit l'aspect lexicologique.

Même si divers rédacteurs ont travaillé à l'édition des résultats, on peut identifier une structure similaire à chaque notice, ce qui crée l'homogénéité de l'ensemble[1].

Les notices comportent toutes un numéro et un titre, suivi éventuellement de la mention de la carte correspondant. Sous ce titre sont reprises les phrases du questionnaire général. Les notices présentent le classement des résultats obtenus sous forme de paragraphes numérotés. Les occurrences sont transcrites selon le système Feller et selon l'alphabet Rousselot-Gilliéron, de sorte que linguistes et wallons puissent lire les diverses formes. Chaque localité y est épinglée selon un principe mis en place par Joseph-Maurice Remouchamps[2]. Des notes éclairent les matériaux au niveau étymologique, phonétique, lexicographique, encyclopédique, ethnographique. On fait référence à des dictionnaires ou au Französisches Etymologisches Wörterbuch (FEW). Enfin, lorsque cela est jugé pertinent, une carte est jointe à la notice pour permettre une meilleure visualisation de la variation.

Rédacteurs

[modifier | modifier le code]

Depuis la fin des années 1920 jusqu'au début des années 2010, cinq générations de linguistes se sont succédé à l'élaboration des dix tomes parus.

La première est celle de Jean Haust, qui a rassemblé l'ensemble des matériaux nécessaires.

La deuxième est celle de ses disciples directs : Louis Remacle et Élisée Legros qui ont permis de clore les enquêtes et de mettre sur pied le projet éditorial.

La troisième génération est celle de Jean Lechanteur qui, en plus de prendre le relais de ses aînés en publiant deux tomes, parvient à réunir des fonds et des moyens humains autour du projet. Il mit également en place un Petit Atlas linguistique de la Wallonie (PALW) qui s'adresse à un public plus large en réunissant les conclusions des analyses pour des mots choisis parmi les plus représentatifs.

La quatrième génération est celle de Marie-Thérèse Counet, Martine Willems et Marie-Guy Boutier. Avec l'étoffement de l'équipe, c'est aussi la multiplication des volumes publiés : 5 atlas et 3 petits atlas en l'espace de 15 ans. Au départ de Jean Lechanteur, c'est Marie-Guy Boutier qui a repris la direction de l'Atlas.

Avec Esther Baiwir, c'est une cinquième génération de dialectologue qui voit le jour. Cette cinquième génération devra notamment ancrer une entreprise presque centenaire dans un monde interactif bien éloigné de la dialectologie wallonne.

Distinctions

[modifier | modifier le code]

Même s'il est encore loin d'être achevé, l'Atlas est considéré par beaucoup comme une référence incontournable tant dans le domaine de la dialectologie que dans le domaine de la géographie linguistique. Les linguistes apprécient entre autres la volonté d'expliquer les phénomènes en plus de les décrire et de les illustrer.

Plusieurs tomes ont été récompensés : prix Albert-Dauzat de la Société de linguistique romane, prix Albert Doppagne de la Fondation Charles Plisnier, prix Élisée Legros, prix de philologie de la Fédération Wallonie-Bruxelles, prix Joseph Houziaux de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique.

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. Baiwir, E., "Les niveaux d'analyse dans la microstructure de l'Atlas linguistique de la Wallonie", in Estudis Romànics, tome 36
  2. Remouchamps, J.-M., "Carte systématique de la Wallonie", dans Bulletin de la Commission royale de toponymie et dialectologie, tome 9, 1935

Voir aussi

[modifier | modifier le code]

Bibliographie

[modifier | modifier le code]

Volumes publiés

[modifier | modifier le code]

Autres ouvrages et articles

[modifier | modifier le code]

Articles connexes

[modifier | modifier le code]