Abraham Bloch
Fonctions
Grand-rabbin de Lyon (d)
-
Grand-rabbin
Alger
-
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 54 ans)
TaintruxVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Nationalité
Activité
Père
Isaac Bloch
Mère
Joséphine Marsilio
Autres informations
Distinction
Stèle au col d'Anozel
Vue de la sépulture.

Abraham Bloch (Paris 7eTaintrux) est un rabbin français, aumônier militaire, tué à l'ennemi durant la Première Guerre mondiale.

Biographie

Lettre d'Abraham Bloch au préfet détaillant la population israélite de Remiremont et du Thillot (1891[1]).

Né dans l'ancien 7e arrondissement de Paris[note 1] dans la Seine, il est le fils d'Isaac Bloch, né à Strasbourg et qui s'est installé à Paris en 1856, et de Joséphine Marsilio, née à Venise et qui, au moment de son mariage, réside à Paris avec sa famille, au 92 rue de Provence[2]. Lors du rattachement de l'Alsace à la Prusse en 1870, la famille Bloch opte pour la France[3]. Abraham fait ses études comme élève-auditeur à l’École pratique des hautes études[4] et étudiant au Séminaire israélite de France, rue Vauquelin, puis, en 1883, il est nommé rabbin à Remiremont (Vosges) où il exerce durant 14 ans, où, selon le régime concordataire en vigueur, sa nomination est ratifiée par l’État.

Le , dans le 17e arrondissement de Paris, Abraham Bloch épouse Berthe Eudlitz (Paris, 1868-1940). De cette union naissent deux enfants, Jeanne Bloch-Netter et Moïse, mort enfant en Algérie[5].

En 1897, il pose avec succès sa candidature au poste de grand-rabbin d'Alger où, dès son arrivée, il affronte des troubles anti-juifs[note 2]. Il est un jour attaqué dans la rue par un juif qui avait quémandé une aide financière et qui, déçu qu'elle ne soit pas plus importante, l'avait poignardé[6]. En 1908, Abraham Bloch revient en métropole comme grand-rabbin de Lyon.

En 1913, Abraham répond à un appel à candidature pour devenir aumônier militaire israélite et il est accepté. Dès le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il se trouve affecté, en tant qu'aumônier, à la 14e section d'infirmiers militaires (SIM)[7] du 14e corps d'armée. Sans tenue militaire distincte[note 3], le rabbin Bloch porte la soutane rabbinique, et un brassard de neutralité, munis de l'emblème de la Croix-Rouge. Il est tué le sur la route entre Taintrux et Anozel[note 4]. Il est reconnu « mort pour la France »[8].

Décorations

Médaille militaire Médaille militaire
Croix de guerre 1914-1918 Croix de guerre 1914-1918

Historiographie du décès d'Abraham Bloch

La lettre à sa veuve

Selon un courrier adressé à sa veuve par un jésuite, Abraham Bloch, durant un combat, aurait tendu un crucifix, à sa requête, à un soldat catholique mourant. Durant cette action, il aurait été mortellement blessé. Cette scène est située au col d'Anozel, près du village de Taintrux, dans les Vosges.

Plusieurs illustrations représentent cette scène, qui symbolise l'altruisme des aumôniers militaires, mais surtout l'union sacrée qui réconcilie et rapproche, durant la Première Guerre, les combattants français de toutes tendances religieuses dans un même sentiment national, tournant la page de plusieurs décennies de luttes entre « laïcs » et « religieux »[note 5]. Un monument de granit, inauguré en 1934 et restauré en 1958, rappelle le souvenir de cet épisode, à Taintrux. L'artiste Germaine Oury-Desruelles obtiendra une médaille d'or, lors du Salon des artistes français de 1934, en réalisant une statue du Rabbin Bloch[9].

Abraham Bloch repose à Saint-Dié-des-Vosges, au cimetière communal de la rive droite[10], où une stèle rappelle cet épisode[note 6].

Mythe ou réalité ?

Mort du rabbin Abraham Bloch (carte postale patriotique).

Dans son ouvrage, Les Juifs de France et la Grande Guerre[11], l'historien Philippe E. Landau détaille la façon dont le récit de cet événement participe de la création d'un mythe national et souligne que, malgré l'analyse des témoignages, journaux de routes, etc., il est impossible d'établir la réalité des faits. P.E. Landau se prononce clairement en faveur de la création d'un mythe national, mettant en scène la fraternisation qui s'est produite entre soldats, quelle que soit leur origine religieuse, durant la Première guerre mondiale. Il relève que le rabbin Bloch a bien été « tué à l'ennemi », mais souligne que les faits concernant le crucifix semblent avoir été rapportés par des personnes qui n'ont pas été témoins de la scène. Ainsi, après enquête auprès du Consistoire central et épluchage d'archives, il apparaît que le récit des circonstances de la mort d'Abraham Bloch liées à la présentation du crucifix à un soldat catholique, aurait été diffusé pour témoigner du rapprochement entre des Français de diverses appartenances religieuses, qu'il faut recontextualiser, pour ce qui concerne les juifs en France, dans une époque encore marquée par le souvenir de l'Affaire Dreyfus et un certain antisémitisme qui s'était exprimé à cette occasion : le patriotisme exprimé au moment de la guerre et en ses lendemains (notamment par l'apposition de plaques commémoratives) aurait été une manifestation d'appartenance nationale[12], comme cela a été le cas pour les catholiques. Alors que les documents et les témoignages contenus dans la biographie d'Abraham Bloch[6] ne permettent pas de se prononcer sur la réalité des faits, cette histoire témoigne d'une fraternisation patriotique qui ne fut pas isolée.

Hommages

Du au , les Archives départementales des Vosges lui consacrent une exposition, Abraham Bloch, un grand rabbin dans la Grande Guerre.

Notes et références

Notes

  1. Actuel 3e arrondissement de Paris.
  2. À propos des troubles antisémites des années 1890 dans l'Algérie coloniale, cf. par exemple Geneviève Dermenjian, La Crise anti-juive oranaise 1895-1905 - L'antisémitisme dans l'Algérie coloniale, L'Harmattan, 1986.
  3. En 1914, les aumôniers militaires ne portent pas l'uniforme.
  4. Commune de Saulcy-sur-Meurthe.
  5. Cf. Loi de séparation des Églises et de l'État et Querelle des inventaires, notamment.
  6. Texte gravé : « Le 29 août 1914, les Allemands avaient incendié à Taintrux une grange qui servait d'ambulance. Pendant qu'on évacuait les blessés, un de ceux-ci, prenant pour un prêtre catholique le grand rabbin Abraham Bloch, aumônier du 14e corps d'armée, lui demanda un crucifix pour l'embrasser avant sa mort. Simplement, sans souci du danger, le rabbin se mit à la recherche d'un crucifix, puis l'ayant trouvé l'apporta au blessé. Quelques instants après, Abraham Bloch était atteint par un obus et succombait. Ce monument a été élevé par des Français de toutes confessions pour honorer sa mémoire et glorifier sa fin. »

Références

Voir aussi

Archives

Travaux liés à Abraham Bloch

Travaux de recherche généraux

Liens externes

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