Alfred Kubin
Alfred Kubin en 1904 par Nicola Perscheid.
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Alois Beer (d) (oncle)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Prix des beaux-arts de la ville de Vienne ()
Ordre du Mérite pour la science et l'art (en) ()Voir et modifier les données sur Wikidata
Archives conservées par
Bibliothèque nationale autrichienne (ÖLA 77/97: Sammlung Piper-Kubin / Schenkung Prof. Agnes Essl)[1]
Bibliothèque nationale autrichienne (ÖLA 219/04: A. Kubin / Briefsammlung Cilli Kindlimann)[1]
Bibliothèque nationale autrichienne (ÖLA 265/05: A. Kubin / Sammlung Piper)[1]
Bibliothèque nationale autrichienne (ÖLA 69/97: A. Kubin / Sammlung Lambert Binder)[1]Voir et modifier les données sur Wikidata
Vue de la sépulture.

Alfred Leopold Isidor Kubin, né à Leitmeritz (Royaume de Bohême) le , et mort à Wernstein am Inn (district de Schärding) le , est un écrivain, dessinateur, graveur et illustrateur de livres autrichien.

Biographie

Il naît d'une mère pianiste et d'un père géomètre. Timide et de faible constitution, Kubin a du mal à se faire des amis parmi les enfants de son âge, les déménagements successifs de sa famille dus au travail du père ne lui rendant pas la vie plus facile, et il passe de longs moments seul à dessiner.

En 1887, Kubin fait une première rencontre avec la mort : sa mère, malade de phtisie, meurt brutalement. La vision de son père, fou de chagrin, arpentant en tous sens la maison le cadavre de sa mère entre les bras, le marqua à jamais. Dans Le Meilleur Médecin, Kubin représente la Mort comme une femme vêtue de noir, une médaille autour du cou. Son visage ne comporte aucun trait.

Son père se remarie la même année avec la sœur de sa dernière épouse, qui meurt à son tour un an plus tard en donnant naissance à Rosalie, sa deuxième sœur. Son père devient hargneux et violent ; Alfred se replie encore un peu plus sur lui-même. Ses dessins se font un peu plus morbides, terrifiants, incarnation de la haine qu'il porte au monde extérieur. Il est pris de visions fantastiques qu'il s'empresse de mettre en dessin.

À la suite de nombreux échecs scolaires, son père décide en 1891 de l'envoyer à l'École des arts appliqués de Salzbourg mais, malgré un début plutôt prometteur, Kubin est renvoyé l'année suivante en raison de ses mauvais résultats. Le frère de la troisième femme de son père (Irene Kühnel, avec qui il s'est remarié l'année précédente), photographe, finit par l'accepter auprès de lui en tant qu'apprenti. Mais il se brouille avec tout le monde, passe des soirées à boire, néglige son travail ; en 1896, il part se suicider devant la tombe de sa mère. Sa tentative échoue et il est renvoyé de nouveau. Il décide alors de s'engager dans l'armée, mais il fait une crise après trois semaines et passe trois mois à l'hôpital militaire de Graz.

En 1898, Kubin se prépare à entrer à l'Académie des beaux-arts de Munich en suivant les cours de Ludwig Schmid-Reutte[2], il réussit le concours l'année suivante. Il entre dans l'atelier de Nikolaos Gysis mais il ne vient pas souvent en cours et est forcé d'abandonner ses études. Il découvre également les travaux de Max Klinger, notamment son cycle de gravures Un gant, qui le marquent profondément et provoquent chez lui une sorte de « frénésie créative ». Il réalise durant cette période de très nombreux dessins et commence peu à peu à se faire connaître, en grande partie grâce à Hans von Weber qui lui voue une grande admiration. En 1902, Kubin réalise sa première exposition à Berlin. Il rencontre l'année suivante Emmy Bayer, dont il tombe aussitôt amoureux, mais qui meurt presque immédiatement du typhus. Il se remarie deux ans après avec Hedwig Gründler, sœur de l'écrivain Oscar A. H. Schmitz et s'installe avec elle à Zwickledt.

En 1908, il écrit en l'espace d'un mois et demi L'Autre Côté, qu'il publie l'année suivante. Hermann Hesse déclarera plus tard qu'il s'agit là d'un livre majeur ; il influencera Franz Kafka, H. P. Lovecraft, Ernst Jünger et les surréalistes.

Kubin entre à la Nouvelle Association des artistes munichois (Neue Künstlervereinigung München) en 1910, qu'il quitte la même année pour fonder avec Vassily Kandinsky, Franz Marc et Gabriele Münter l'association du Cavalier bleu (Der Blaue Reiter, d'après le nom d'un tableau de Franz Marc). Il rencontre également Paul Klee, avec qui il échange beaucoup jusqu'à l'arrivée de la Première Guerre mondiale. Il illustre les ouvrages d'écrivains[3] dont Edgar Poe, Gérard de Nerval, Lyonel Feininger, Oscar Wilde, Thomas Mann.

Jusqu'en 1914, la renommée de Kubin augmente rapidement, grâce à Paul Klee qui expose ses dessins, et au journal Simplicissimus et L'Assiette au beurre, qui les publient.

En 1915, Kubin approfondit sa connaissance des travaux de Nietzsche et Schopenhauer. La découverte de la doctrine de ces deux philosophes joue un rôle déterminant sur son art. De 1920 à 1930, de nombreuses expositions lui sont consacrées, retraçant son travail depuis ses débuts. L'arrivée de la guerre perturbe assez peu ses activités.

En 1948, son épouse, Hedwig Gründler, meurt.

Le château de Zwickledt, demeure de Kubin.

Il poursuit ses publications. Il meurt le dans son château de Zwickledt, situé à Wernstein am Inn d'une maladie de la vessie, après avoir fait don de l'ensemble de son œuvre à l'État autrichien.

Œuvre picturale

Les dessins de Kubin donnent à voir une humanité soumise, dépassée par des forces obscures et oppressantes mises en scène au travers d'une symbolique récurrente du monstre et du difforme, l'artiste se faisant par là « l'organisateur de l'incertain, du tremblant, de la pénombre, de l'onirique » ; ils lient sexe, pulsions de mort et témoignent d'une certaine folie[réf. nécessaire].

Analyse

Les œuvres littéraires et picturales d'Alfred Kubin se complètent et se répondent. De ce fait, elles offrent une grande cohérence à l'esthétique du clair-obscur de l'artiste qui se plaît à juxtaposer les oppositions afin de faire ressortir tout le paradoxe de la vie et de la mort. Chaque image possède un « pouvoir nécessaire de narration[4] » et chaque passage suggère des images.

Daniel S. Larangé attire l'attention sur le bestiaire qui peuple cet univers onirique et qui fonctionne comme un « système » de signes : « Chacune de ses visions oniriques possède un contenu narratif latent qui s'intègre à un ensemble d'images selon les règles du non-sens — complémentarité des oppositions, analogie par assonance ou allitération, équivoque et homonymie, quiproquo et malentendu dialogiques, etc. Le style fondamentalement fragmentaire d'Alfred Kubin fait que la réalité se trouve contaminée, de façon intermittente, par la fiction onirique[5]. »

En effet, Kubin laisse deviner le monstre qui sommeille en nous, ce qui le conduit à rapprocher sexualité débridée et morbidité absolue. La folie reste la seule issue d'échapper à cette grande mascarade qu'est le monde. Ce pessimisme trouve son origine dans sa lecture du bouddhisme et l'influence que les religions indiennes et les arts chinois et japonais exercent sur lui.

Érotisme et onirisme finissent par se confondre afin de fuir un monde en train de se déshumaniser à force d'adopter les positions des plus universalistes qui nient leurs propres particularismes. Pour Kubin, cette fuite se fait par la mystique : « Le désir caractérise l'homme et la frustration en découlant est devenue le centre de gravité de sa modernité. L'homo occidentalis tend à se réfugier dans le rêve pour combler le manque de présence qui le mine dans un monde mercantile censé lui assurer la surabondance. Il lui faut donc se mettre en quête de la vacuité intérieure pour se libérer de ses démons et abolir la douloureuse tension entre l'être et l'avoir[6]. »

Publications

Essais

Nouvelles

Albums sous son nom

Ouvrages illustrés

Roman


Notes et références

  1. a b c et d « https://www.onb.ac.at/de/bibliothek/sammlungen/literatur/bestaende/personen/kubin-alfred-1877-1959/ » (consulté le )
  2. (en) Alfred Kubin: "Ali, the grey stallion – the fate of a Tartar horse", exposition à la Jagiellonian Library, Austrian Library, Cracovie, novembre-décembre 2017.
  3. Jean Cassou, Encyclopédie du symbolisme, Paris, Éditions Aimery Somogy, , 292 p., p. 90-91
  4. Peter Assman, « Alfred Kubin, l'“autre côté” de l'art », dans Alfred Kubin. Souvenirs d'un pays à moitié oublié, Paris, musée d'art moderne de la ville de Paris, 2007, p. 16.
  5. Daniel S. Larangé, « L'animal, l'homme et le monstre dans l'univers onirique d'Alfred Kubin. Du bestiaire à la tératologie humaine », Annie Duprat (éd.), Sociétés & Représentations, 27/1 (2009), p. 141-154.
  6. Daniel S. Larangé, De la destruction du réel à la réalité de la destruction: érotisme et onirisme dans l'imaginaire d'Alfred Kubin, Petr Sláma (éd.), Communio Viatorum (LII) 2, 2010, p. 178.

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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