Amrit
Image illustrative de l’article Amrit (Syrie)
Temple de Melqart
Localisation
Pays Drapeau de la Syrie Syrie
Gouvernorat Tartous
Coordonnées 34° 50′ nord, 35° 54′ est
Géolocalisation sur la carte : Syrie
(Voir situation sur carte : Syrie)
Amrit
Amrit
Histoire
Époque -3000 à -184

Amrit, ou encore Amrith, en arabe : عمريت (Marathos en grec ancien), est un site archéologique phénicien qui se trouve sur la côte, face à l'ancienne cité d'Arouad (ou Arwad), qui occupait une ile et se situait à 5 km environ au sud de Tartous en Syrie. Le temple de Melqart disposait d'un bassin alimenté par une source, des nécropoles ont été implantées alentour. Les restes d'un stade remontant à l'époque phénicienne ont également été identifiés.

Découverte et fouilles

Le Tell d'Amrit

Le tell — c'est-à-dire, une formation en monticule induit par la superposition de plusieurs strates architecturales d'époques différentes —, est localisé à l'est du sanctuaire appartenant au site d'Amrit. Grossièrement, il se présente sous la forme d'un carré de 110 mètres de côté. Le promontoire artificiel est l'objet d'une analyse stratigraphique poussée au moyen d'une tranchée obtenue par une technique d'excavation circonscrite directement au sein du tell. L'équipe archéologique, sous la houlette de Michel Al-Maqdissi — actuel Directeur de la Recherche et des Fouilles de la République Arabe de Syrie —, met en lumière de nombreuses découvertes essentielles à la compréhension de l'histoire et des caractéristiques architecturales du complexe antique d'Amrit[1]. Dans une moindre mesure, le Directeur de l'Archéologie Syrienne nous éclaire également sur l'origine de la forme carrée de la butte artificiel. En faisant appel à une méthodologie par étude comparative, il démontre que cette dernière serait à imputer à une culture de typologie amorite[3].

Périodes chronologiques du site

Factuellement, la mise au jour du tell et l'étude des différentes couches chronologiques, permet d'appréhender une datation approximative — mais scientifiquement attestée — de la fondation du complexe antique jusqu'à son abandon.

Le Sanctuaire d'Amrit

Comme nous l'avons remarqué précédemment, le VIe siècle av. J.-C. participe d'un essor explicite du potentiel votif du site phénicien. C'est au sein de cette période que le temple d'Amrit est édifié[3].

Le culte de Melqart à Amrit

Statue représentant le dieu Melqart/Héraclès, datant du Ve siècle av. J.-C., exposé dans un musée chypriote.

Description du sanctuaire

Néanmoins, la reconstitution du complexe cultuel s'élabore essentiellement par extrapolation et sa restauration, compte tenu de sa typologie architecturale originale, demeure contraignante. Les hypothèses et conjectures émises auparavant par la Mission Archéologique Syrienne, induiraient à penser que la vie religieuse liée au temple aurait régressé à cette même époque de la moitié du IIe siècle av. J.-C. L'expertise sismologique permettant d'établir le schéma d'effondrement des différents éléments constituant le sanctuaire, vient corroborer ces primes conjectures. De facto, on peut remarquer que les blocs formant le haut des portiques, du portail monumentale et ceux structurant le naos central, gisent disséminés sur l'ensemble de l'aire circonscrite au temple de Melkart, voire au-delà[4],[5].

Sanctuaire de Melqart; on peut observer au centre, au second plan, les ruines du naos.

On peut observer une sorte de vestibule monumental sis en façade du temple, lequel fait office d'accès à la cour intérieure. Au centre du temenos — c'est-à-dire l'esplanade sacrée, ou ici la cour —, se tient un genre de cella de taille imposante et pourvue de 2,5 mètres de hauteur; celle-ci côtoie le bassin à ablution susmentionné. À l'instar de ce dernier, la cella est notablement dépourvue de façade nord la faisant également s'épanouir au-devant du lit du cours d'eau Nahr Amrit[4].

Les autres temples: L'existence d'un pluralisme cultuel tardif

Outre le sanctuaire dédié à Melqart, on recense différents édifices religieux qui s'éparpillent sur le site levantin — dont l'un, le plus notable, est localisé à seulement 400 mètres du temple de Melkart; on y a mis au jour in situ divers artéfacts remarquables, tels que des situles de fabrication et/ou d'origine probablement égyptienne[5]. Il est attesté qu'ils sont conçus postérieurement de celui-ci, notamment au cours du Ve siècle av. J.-C., du IVe siècle av. J.-C. et à la fin du Ier millénaire av. J.-C.. Les iconographies votives dédiées à d'autres divinités phéniciennes découvertes in situ ou à proximité des ouvrages cultuels — essentiellement sous forme de statuettes —, accréditent le postulat d'un multi-cultualisme tardif sur le site phénicien. Factuellement, ce dernier ayant un statut de lieu de pèlerinage, un processus d'emprunt à d'autres formes de dévotion demeure implicite. Cependant, la figure panthéonique phénicienne protectrice de la ville — Melkart —, détermine la majeure partie de la vie religieuse d'Amrit et reste incontournable[1],[3],[5].

Le stade d'Amrit: un monument précurseur

Son contexte d'érection

Côtoyant le sanctuaire dédié à Melqart sur sa façade Est, on peut remarquer l'existence d'un stade à vocation compétitive. Les aires d'occupation respectives des deux constructions ne sont distinctes que par la présence du cours d'eau la Nahr Namrit. En outre, on peut remarquer que l'ouvrage olympique surmonte une colline peu élevée[6]. En ce qui concerne le contexte historique, à assigner à la fin du IVe siècle av. J.-C. — pour rappel: mise en place de la satrapie des séleucides au proche-orient antique —. La fondation du complexe sportif répond aux critères et canons culturels et religieux grecs. Ces derniers définissent, en particulier, une association systématique du temple principal d'un site à un édifice consacré à la compétition et à l'hygiène physique. En revanche, l'existence de ce complexe sportif nous fournit la preuve indéniable que des compétitions phéniciennes sont organisées antérieurement à celles, plus connues, d'origine grecque. Cette observation suggère que la tradition d'épreuves et de concours physiques est adoptée et assimilée à l'extérieur de la Phénicie au cours de la seconde moitié du Ier millénaire av. J.-C.[6].

Une construction de type phénicienne

On a pu évaluer que la construction destinée au sport possède une capacité d'accueil d'environ 11 200 spectateurs — en tenant compte d'une envergure moyenne de 40 centimètres par individu —[6].

Le rôle religieux du stade phénicien

Vraisemblablement, les dévots du sanctuaire phénicien, viennent s'y exercer ou encore s'y mesurer après avoir observer les rites cérémoniels et les pratiques ablusives[5]. La construction olympique associée au bâtiment religieux tout proche, met en exergue la corrélation existant entre la compétition sportive et le culte de Melqart/Héraclès. Rappelons par le biais de cette proposition, qu'Amrit est rebaptisée Marathus au cours de la période hellénistico-romaine, et également que ce toponyme est ultérieument usité lors de la fondation la ville homonyme grecque. Ceci marque un témoignage de l'exportation du rite olympico-religieux dédié à Melkart/Héraclès[6].

Les sites et structures funéraires d'Amrit

Tour-tombeaux quadrangulaires dans l'une des nécropole d'Amrit, Syrie.

L'emplacement des nécropole: une configuration spatiale originale

À la périphérie du site d'Amrit des nécropoles de grande taille forment, associées aux zones d'extraction des ramleh, une sorte de croissant entourant l'aire médiane occupée par le tell et le sanctuaire dédié à Melqart. On peut établir un parallèle entre cette configuration géographique spécifique au site littoral nord-syrien, et celle tout aussi unique du site beaucoup plus méridional de Sidon. Ce dernier apparaît le seul dont le plan quartier par quartier soit similaire[3].

Une grande variété des origines ethniques et géographiques des défunts

Une diversité des types de nécropoles

Une galerie funéraire remarquable

Se plaçant en vis-à-vis de la Nécropole de Bayada, on peut noter la présence d'une butte naturelle. Cette dernière est pourvue de deux hypogées, lesquels apparaissent, factuellement et de manière inédite, non souterrains mais excavés directement dans ladite butte sous forme d'une double galerie[3]. La galerie, creusée à flanc de roche, se sépare en deux parties distinctes au moyen d'un arc situé juste à l'entrée de l'ouvrage mortuaire. Chacune de ces deux sous-galeries se place exactement dans la ligne médiane formée par le dromos — en archéologie spécialisée à la civilisation phénicienne, ce terme désigne le couloir d'entrée à(aux) chambre(s) funéraire(s) —[3].

Dans le rapport de fouilles effectuées en 2003, l'archéologue Michel Al-Maqdissi, nous fournit de plus amples détails concernant la galerie.

La Maison des ancêtres

Antérieurement remarquée par l'archéologue Ernest Renan lorsqu'il entreprend les fouilles de 1861, la toute dernière construction mortuaire mise au jour — au cours de la campagne de fouilles de 2010 —, est localisée au sud-est de la Nécropole Royale. Il s'agit d'un bâtiment ouvragé dans la pierre rocheuse, laquelle est propre au site d'Amrit. Sa façade s'agrémente de genre de renfoncements faisant probablement office de caveaux funéraires[3],[5]. En outre, on distingue de nombreuses représentations sculptées et ciselées — dits nefechs —, apparaissant également sur le fronton de l'édifice et généralement associées aux cavités mortuaires. On estimerait que la structure funéraire dénommée Maison des Ancêtres serait un lieu d'accueil des dépouilles de défunts. On suppose que celle-ci participerait d'une sorte de rite d'hommage aux disparus[3],[5]. Placés sur l'un des côtés du tombeau collectif, d'autres renfoncements s'offrent au regard. Néanmoins, ces derniers sont de type votif, a contrario des cavités creusées en façade[5].

Amrit: une agglomération proto-urbaine destinée au culte religieux

Enceinte et vestiges d'habitat du site antique d'Amrit, en Syrie.

Panorama du site

Le complexe antique se présente comme une vaste concentration de bâtiments et d'édifices dont les destinations d'usage sont diverses. Ce dernier, localisé au sud-est de la ville de Tartous, s'étend le long du littoral syrien sur approximativement 7 kilomètres, pour une largeur maximale d'environ 2 kilomètres. En son milieu, l'aire antique est en grande partie couverte par les infrastructures du temple de Melqart, du stade olympique, des carrières et de l'édifice d'agrément des officiants religieux[7]. Le complexe antique phénicien, ne peut être considéré comme étant un site de typologie urbaine. Au contraire, il présente l'ensemble des caractéristiques d'un lieu proto-urbanisé. Ce dernier se compose d'une certaine quantité de groupes d'habitats disséminés sur la globalité de son aire d'édification[1],[2]. En outre, la faiblesse des infrastructures de voirie — quelques artères d'acheminement tout au plus —, suggère le postulat d'une population de taille minimale qui serait probablement inférieure à celle d'un village de la période de l'Âge du Fer II[1],[2],[7].

Le port

On a récemment découvert, situé dans la zone périphérique occidentale des ruines antiques, une petite infrastructure portuaire directement en vis-vis de l'Île d'Arados, laquelle est distante de 800 mètres. On estime que le complexe portuaire fait office de point d'accès aux populations îliennes, mais est également usité pour le transport maritime des fameuses ramleh extraites des carrières sises à Amrit[2],[4],[7].

Les bâtiments des officiants cultuels

En lieu et place du tell mentionné précédemment, l'une des couches stratigraphiques étudiée par Michel Al-Maqdissi et l'équipe archéologique nous fournit un constat et une interprétation sans équivoque: celle-ci est constituée de vestiges d'un pied-à-terre dévolu aux prêtres. Attribué au courant du VIe siècle av. J.-C., la construction domestique est concrètement contemporaine du Sanctuaire dédié à Melqart. Il se présente sous la forme d'un parallélépipède dont l'architecture est épurée et sans fioriture. Outre ce logis de bonne taille, la recherche stratigraphique opérée sur le promontoire artificiel, révèle également l'existence de petits lieux d'habitation se superposant au bâtiment destiné aux personnalités officiantes, et assignable à une époque plus récente. Cette observation indique clairement une forme de pérennité d'une zone d'habitat — toutefois, de surface peu importante — à proximité du temple élevé en hommage au Dieu Guérisseur Phénicien[2],[4].

Les groupes d'habitats proto-urbains

Les nombreuses estimations archéologiques effectuées par technique de sondage sur l'ensemble du site antique d'Amrit, démontrent une occupation d'aires d'habitats très faible. Totalement absente entre les emplacements funéraires et le centre religieux — exception faite de l'édifice destiné aux prêtres et de logements de villégiature situés non loin —, l'essentiel des lieux de vie identifiés au sein des ruines phéniciennes, se concentre le long du rivage méditerranéen, au voisinage du petit port d'agrément évoqué auparavant. Ces petites unités d'habitation ne constituent pas, en la demeure, d'un site urbain potentiel tels qu'une ville, voire également un village à l'époque étudiée. Au mieux, ces groupes d'habitats semblent plutôt déterminer une amorce préurbanistique, autrement dit une typologie proto-urbaine. Cette assertion corrobore la thèse qu'Amrit est avant tout un lieu de pèlerinage[2],[4],[5],[7].

Une agglomération antique riche, mais néanmoins en danger

La situation géographique des ruines d'Amrit, c'est-à-dire en bordure du littoral méditerranéen, la place en marge des incursions et des raids de l'E.I. et des guerres civiles qui frappent l'État Syrien depuis 2009.

Notes et références

  1. a b c d e f g h i j et k Valois 2015, p. 35.
  2. a b c d e f g h i et j Valois 2015, p. 39.
  3. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w et x Valois 2015, p. 36.
  4. a b c d e f g h i j k l m et n Valois 2015, p. 40.
  5. a b c d e f g h i j k l et m Valois 2015, p. 41.
  6. a b c d e f g h et i Labib Boutros, « Le stade phénicien d'Amrit », Revue Olympique, no 112,‎ , p. 114-120 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  7. a b c d et e Al-Maqdissi 2015, p. 38.
  8. Valois 2015, p. 37.
  9. Valois 2015, p. 38.

Bibliographie