Naissance | |
---|---|
Décès | |
Nom de naissance |
Claude Ernest Philippe Bourgeau |
Nationalité | |
Activités | |
Maître |
Claude Morini (pseudonyme de Claude Bourgeau), né le à Limoges (France) et mort par suicide le à Nice (France), est un artiste peintre et graveur français.
L'enfance de Claude est marquée par l'image de son grand-père maternel, le peintre impressionniste hongrois Edmund (Ödön) Pick, surnommé "Morino" (né le dans la ville de Komárno[1]), qu'il ne rencontra qu'une seule fois et à qui - avec sa mère Carmen qui sut aussi l'éveiller très tôt à la passion de peindre - il doit pourtant de côtoyer la peinture depuis toujours. C'est en mémoire affectionnée de "Morino" que l'artiste signera son œuvre Claude Morini: « Je suis peintre grâce à lui et je porte son nom pour que son nom reste »[2].
Si l'enfance (école primaire à Limoges) et l'adolescence (Lycée de La Rochelle) sont peu portées sur les études, l'éducation chrétienne qu'il reçoit de Carmen (de son métier assistante sociale) s'accompagne d'un sentiment de sollicitude, de solidarité, de "devoir donner au prochain" qui restera chez Claude une ligne directrice: « un peintre, dira-t-il plus tard, doit être dur pour lui, car il a un devoir: il doit donner »[2]. Pour l'heure, l'adolescent fonde au Lycée de La Rochelle un groupe d'action sociale qu'il baptise "A.V.S." ("À votre service") à vocation de visiter et d'apporter nourriture aux nécessiteux.
En 1956, Claude se rend en pèlerinage à Assise sur les traces de saint François. La découverte émerveillée des fresques de Giotto y déplace sa sensibilité de la vocation caritative vers la peinture. L'année suivante, il entame néanmoins à Paris des études de commerce propres à rassurer ses parents mais inadaptées à son tempérament, encore tout imprégné de la spiritualité d'Assise. Si à Paris - dont par contraste il n'aime ni le bruit, ni la vie pressée, ni les convenances, ni la primauté de l'argent[3] - il fonde encore un groupe d'aide aux personnes âgées, « je crois que ne suis pas sur la bonne route », écrit-il à Carmen en fin d'année 1957 : dans un premier temps, il suit les cours dominicaux d'histoire de l'art donnés par l'École du Louvre, puis, dans un second temps (), s'inscrit en peinture dans l'atelier de Guillaume Met de Penninghen (appelé à devenir l'École supérieure d'arts graphiques Penninghen)[2], peignant et dessinant le soir sur toutes sortes de supports comme papiers de récupération et cartons d'emballages. « Son travail d'étudiant était axé autour d'une recherche de matières » évoque Daniel Cotta avec qui il partage une chambre parisienne début 1958.
En , Claude part vivre auprès de son oncle André Pick (frère de Carmen), franciscain et artiste peintre au Monastère de Cimiez. Conciliant là idéalement méditation religieuse, action caritative et création artistique - Claude fréquente l'École des arts décoratifs à Nice, travaille la céramique à Vallauris - André et Claude trouvent aussi à s'échapper ensemble depuis le port d'Antibes jusqu'à l'arrière-pays niçois, dans une complicité favorisée par la figure communément révérée d'Edmund Pick, "Morino"[2].
C'est peu après sa rencontre avec Monique Beaugrand que Claude Morini est appelé pour le service militaire en novembre 1959 à Brive-la-Gaillarde, puis en décembre 1960 en Algérie où les lettres qu'il écrit à Monique sont chargées de désespoir[4]. Rapatrié et hospitalisé pour hépatite et dépression au Val de Grâce fin 1961, démobilisé en mars 1962, il s'installe à Vallauris et épouse Monique en juillet 1962 (ils auront trois enfants, François, Marielle et Antoine). Il vient, par sa première exposition personnelle à la Galerie Cécile de Terssac à Cannes en 1966, à expérimenter durablement la technique de l'aluchromie, mode d'expression qui intéresse particulièrement cette galerie[5] et qui lui offre de véritables débouchés dans l'architecture[6]: on voit alors ses œuvres, principalement sur La Croisette à Cannes, installées dans les halls d'immeubles, les banques, les pharmacies et les salons privés.
En 1975, Claude Morini entame son fort investissement dans la gravure en quoi il voit un art à la fois « noble » et accessible au plus grand nombre, car tel est également son souci. C'est dans cet esprit qu'il expose alors dans les lieux publics (Maisons des jeunes et de la culture, banques, hôpitaux) - l'inauguration de l'Hôpital Larchet à Nice en 1979 inclut un accrochage de ses œuvres - et qu'il crée l'Association des artistes libres de la faculté de Blausasc.
À partir de 1978, constate Jacques Simonelli[7], la peinture de Claude Morini est obsessionnellement « peuplée d'un visage sans cesse répété, celui du peintre, ou du diable aussi bien, où se résume une solitude. Introspection douloureuse, comme chez Rembrandt ou chez Bacon, que soulignent les titres d'une série d'autoportraits: La folie parfois, L'attente, L'angoisse, Le peintre en péril ».
Le , âgé de 42 ans, confirmant le mal-être et le tourment ainsi révélés, Claude Morini choisit de quitter ce monde.
Dans son approche segmentée des figurations contemporaines qui lui sera offerte en 1986 par l'exposition itinérante Les figurations des années 1960 à nos jours, Francis Parent attribue à Claude Morini, en même temps qu'à Franta ou Ben-Ami Koller, une « manière plus formelle » qu'il distingue de la figuration « plus matiériste » d'Abraham Hadad, Roger-Edgar Gillet et Jean Revol, de l'expressionnisme de John Christoforou, Orlando Pelayo et Maurice Rocher, ou d'« d'une figuration qu'on pourrait appeler douce », comme chez Philippe Bonnet ou Gottfried Salzmann. Avec son nom qui demeure attaché à cette exposition, Claude Morini est l'un de ces artistes significatifs de ce que, dans le quart de siècle auquel elle est consacrée, toujours selon Francis Parent,« la figuration n'a jamais cessé d'être NOUVELLE »[8].