En analyse chimique, l'effet de matrice décrit l'influence de l'environnement chimique d'un atome sur l'intensité de son signal.

Les effets de matrice se rencontrent notamment en spectrométrie à plasma à couplage inductif (ICP), en spectrométrie de fluorescence des rayons X ou encore en microsonde de Castaing.

Les méthodes modernes d'analyse chimique utilisent en général un phénomène physique où l'intensité du signal dépend de la quantité de certains atomes ou molécules. La mesure du signal permet alors de connaître la quantité d'atomes ou molécules. Dans le cas le plus simple, l'intensité mesurée, I, est proportionnelle à la concentration en atomes, c :

c = k·I

k est le coefficient d'étalonnage.

Dans le cas général, notamment à cause de l'effet de matrice, cette équation n'est plus vraie : l'intensité du signal dépend de nombreux autres paramètres, dont les concentrations des autres atomes. Ainsi, un pour cent de fer ne donne pas la même intensité selon qu'il est dans de l'eau ou dans une roche.

Absorption

Un exemple typique de l'effet de matrice est l'absorption des rayonnements. En effet, les méthodes physiques utilisent en général la mesure d'un rayonnement, soit émis par l'échantillon, soit transmis ou réfléchi par lui. De manière générale, les rayonnements sont absorbés suivant une loi de Beer-Lambert :

Le coefficient d'absorption μ suit en général une loi des masses :

Donc, si l'on suppose que l'intensité I0 ne dépend que de la quantité de l'objet auquel on s'intéresse, l'intensité mesurée I dépend de plus :

Surexcitation

Dans certains cas, les atomes de l'échantillon émettent leurs propres rayonnements (fluorescence) ; ces rayonnements peuvent à leur tour exciter les autres atomes et donc s'ajouter au rayonnement incident. Dans certains cas, ce phénomène n'intervient pas (notamment lorsque le rayonnement fluorescent n'influe pas sur le phénomène physique de mesure).

Effet chimique

Les liaisons chimiques concernent les électrons périphériques des atomes. Ainsi, les électrons périphériques d'un atome n'ont pas les mêmes niveaux d'énergie selon que l'atome est isolé, fait partie d'une molécule (liaison covalente) ou d'un cristal (liaison ionique, liaison métallique).

Si l'atome est ionisé, cela influe également sur les niveaux d'énergie de ces électrons périphériques.

Si les phénomènes physiques mettent en œuvre les électrons périphériques des atomes, ou si l'énergie des rayonnements est de l'ordre de grandeur des énergies de liaison des électrons périphériques, alors le degré d'oxydation ou les liaisons chimiques des atomes peuvent influer sur la mesure, soit sur l'intensité mesurée, soit sur le décalage en énergie des raies mesurées.

En spectrométrie de fluorescence des rayons X

La spectrométrie de fluorescence des rayons X concerne les électrons de cœur, la méthode n'est donc pas sensible aux liaisons chimiques et au degré d'oxydation (à l'exception notable de l'aluminium et du soufre). On ne considère donc que l'absorption et la fluorescence secondaire (surexcitation).

Ces phénomènes ont été modélisés par J. Sherman en 1955, d'après les travaux de Glocker (1930), Castaing (1950) et Gillam et Heal (1952) ; l'équation de Sherman fut corrigée en 1966 par T. Shiraiwa et N. Fujino.

Depuis les années 1980, on dispose d'une puissance de calcul informatique suffisante à un coût raisonnable (micro-ordinateur) permettant de corriger les effets de matrice de manière théorique, avec la méthode dite des « paramètres fondamentaux » : coefficients d'absorption tabulés, rendement de fluorescence… Auparavant, on utilisait des méthodes d'approximation, en utilisant une équation approchée, simplifiée, par exemple la formule de Lachance-Traill[1] :

Ci = mi × Ii × (1 + ∑ji αij × Ci)

Les alphas sont donc maintenant déterminés de manière théorique à partir des paramètres fondamentaux[2]. Ils étaient auparavant considérés comme fixes et déterminés :

On a aussi utilisé des équations faisant intervenir l'intensité, ou bien des coefficients de second ordre[4].

Bibliographie

Références

  1. Gérald « Gerry » Lachance, 1926-2013 [1]
  2. (en) R. Rousseau et J. A. Boivin, « The Fundamental Algorithm: A Natural Extension of the Sherman Equation, Part I : Theory », The Rigaku Journal, vol. 15, no 1,‎ , p. 13–28 (lire en ligne [PDF])
  3. (en) N. Broll et R. Tertian, « Quantitative x-ray fluorescence analysis by use of fundamental influence coefficients », X-Ray Spectroscopy, John Wiley & Sons, vol. 12 - numéro = 1,‎ , p. 30–37 (DOI 10.1002/xrs.1300120108, présentation en ligne)
  4. (en) Richard Rousseau, « The Fundamental Algorithm: An Exhaustive Study of the Claisse-Quentin Algorithm and the Tertian and Lachance Identities, Part II : Application », The Rigaku Journal, vol. 15, no 2,‎ , p. 14–26 (lire en ligne [PDF])