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Le droit de la concurrence (le droit antitrust aux États-Unis) interdit les ententes illicites ou restrictives, c'est-à-dire tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché.

Le mot « entente » n'apparaît pas en tant que tel dans les textes législatifs fondant les droits de la concurrence mais est utilisé par les autorités de concurrence, les juridictions et la doctrine. Il désigne indifféremment accords, pratiques concertées et décisions d'associations d'entreprises. L'idée qui caractérise toutes les formes d'entente est la « rencontre de volontés autonomes ».

L'activité économique exige que les entreprises tissent des liens entre elles. Aussi le principe du comportement autonome des entreprises posé par la prohibition des ententes n'est pas absolue. L'interdiction suppose toujours la démonstration d'un impact négatif sur la concurrence. Une entente entre entreprises sera déclarée illicite parce que qualifiée de restrictive de concurrence au terme d'un bilan concurrentiel.

Inversement, ne seront donc pas déclarées illicites au terme du bilan concurrentiel, les ententes dont l'objet ou l'effet sur le marché ne restreint pas la concurrence ou qui peuvent être rachetées au terme d'un deuxième bilan, économique cette fois, qui fait ressortir la prédominance des aspects positifs de l'entente : c'est l'exemption.

L'entente peut revêtir des formes très diverses :

Les ententes sont difficiles à détecter et à prouver[1]. Quand elles le sont, elles peuvent être sévèrement sanctionnées, les autorités de concurrence pouvant infliger des amendes de plusieurs centaines de millions d'euros ou de dollars. Cependant, le montant des amendes infligées par la Commission européenne ne peut excéder 10 % du chiffre d'affaires mondial des entreprises condamnées. Pour David Spector, ce niveau de sanctions, rarement atteint, est souvent beaucoup plus faible que le gain obtenu en moyenne par une entente illicite, dont la probabilité de détection serait de l'ordre de 15 %. Seules des peines de prison pour les dirigeants seraient dissuasives[2].

« Entente » et « cartel »

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Dans le sens d'« entente », le mot cartel vient de l'allemand kartell et il désigne une forme élaborée de coopération horizontale entre entreprises indépendantes, en vue d'accroître leur pouvoir sur un marché. Le cartel désigne une situation d'oligopole dans laquelle les concurrents indépendants se mettent d'accord sur le prix du marché que chacun doit pratiquer[3]. Les grands producteurs de l'acier européen ont ainsi formé un cartel selon lequel chaque signataire doit respecter un prix minimum (ou prix plancher) de l'acier vendu à l'extérieur de l'Europe et chaque concurrent exportant à un prix inférieur doit être exclu de cet accord[3].

Les pays anglo-saxons emploient également le terme cartel, alors que les droits français et communautaire de la concurrence le traduisent par « entente » dont la définition, plus large, vise tout accord de volonté explicite ou tacite ou toute pratique entre entreprises faisant perdre l'indépendance de leurs comportements respectifs sur le marché. On parle d'entente illicite lorsque l'accord empêche, restreint, ou fausse le jeu normal de la concurrence.

Certaines institutions internationales, dont la Commission européenne ou l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), utilisent parfois le terme cartel. Il est alors employé comme synonyme d'entente ; ou bien il renvoie à la définition historique ou économique où un cartel existerait au grand jour, alors que les ententes seraient cachées.

La critique marxiste a dénoncé l'emprise grandissante des cartels à la fin du XIXe siècle et la conjonction de ce phénomène avec la colonisation du monde par les puissances industrielles. Selon Lénine, l'historique de cette cartélisation du capitalisme serait le suivant :

  1. Années 1860-1880 : point culminant du développement de la libre concurrence. Les monopoles ne sont que des embryons à peine perceptibles.
  2. Après la crise de 1873, période de large développement des cartels ; cependant ils ne sont encore que l'exception. Ils manquent encore de stabilité. Ils ont encore un caractère passager.
  3. Essor de la fin du XIXe siècle et crise de 1900-1903 : les cartels deviennent une des bases de la vie économique tout entière. Le capitalisme s'est transformé en impérialisme.

Les cartels s'entendent sur les conditions de vente, les échéances, etc. Ils se répartissent les débouchés. Ils déterminent la quantité des produits à fabriquer. Ils fixent les prix. Ils répartissent les bénéfices entre les diverses entreprises, etc.[4]

Droit des ententes en droit communautaire

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En droit communautaire, la prohibition des ententes est prévue à l'article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (anciennement article 81 TCE). Pour que le droit communautaire de la concurrence s'applique à une entente entre entreprises, celle-ci doit avoir une dimension européenne c'est-à-dire affecter le commerce entre États membres et avoir pour objet ou pour effet de perturber le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun. Dans le cas contraire, la Commission saisit le ministère de l'Économie de l'État correspondant qui saisit à son tour l'autorité de la concurrence nationale (ex. : affaire de l'intérim en France, lors duquel Adecco, Manpower et VediorBis ont été condamnés en 2009 à une amende de 94,4 millions d'euros[5]).

Contenu

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L'article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (anciennement article 81 TCE) se divise en trois parties. Dans le premier paragraphe, il pose le principe de la prohibition des ententes (art. 101§1) puis il interdit en particulier celles qui consistent à :

Le deuxième paragraphe prévoit que ces accords sont nuls de plein droit (art. 101§2). La nullité de l'accord ne présage pas des sanctions que peut prendre la Commission européenne (amendes ou les injonctions par exemple).

Mais certaines ententes peuvent être autorisées. L'article prévoit des exemptions (art. 101§3) à ces interdictions à certaines conditions :

  1. l'entente doit contribuer à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique ;
  2. l'entente doit aussi profiter aux utilisateurs ;
  1. L'entente ne doit pas restreindre excessivement la liberté des entreprises participantes ;
  2. L'entente ne doit pas donner aux entreprises la possibilité d'éliminer la concurrence.

Avant 2004, seule la Commission avait le pouvoir d'accorder une entente, qui lui avait été préalablement notifiée, sur le fondement de l'article 81§3. Depuis le règlement communautaire n°01/03, l'exemption peut être accordée par une autorité de concurrence d'un État membre de l'Union européenne.

Exemples

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Droit des ententes en droit français

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Il est essentiellement basé sur l'article L.420-1 du Code de commerce qui dispose, depuis une loi du 15 mai 2001 [15]:

«  Sont prohibées même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :

  1. Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;
  2. Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;
  3. Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;
  4. Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement. »

On peut citer parmi les grandes affaires d'entente:

Ces banques avaient facturé des « frais indus à leurs clients », pendant cinq ans, et ainsi mis en place de janvier 2002 à juillet 2007, « de manière concertée », une commission interbancaire de 4,3 centimes d'euros sur 80 % des chèques échangés en France. Ont été condamnées la Banque de France, la Banque postale, BNP-Paribas, la Confédération Nationale du Crédit Mutuel, le Crédit Agricole, le Crédit du Nord, le Crédit Industriel et Commercial, la LCL, HSBC, la Société Générale. Le groupe BPCE, qui groupe la Banque populaire et la caisse d'Épargne, devra payer à lui seul 90,9 millions d'euros. Les onze banques en question avaient instauré cette commission unique pour compenser les pertes d'intérêts dues à l'accélération du traitement des chèques par l'emploi de machines de lecture optique. L'échange plus rapide des chèques impliquait que l'argent soit placé moins longtemps, d'où moins d'intérêts à engranger pour les banques. Selon l'Autorité de la concurrence le progrès technique réalisé dans le traitement des chèques entrainait un gain de productivité pour les banques, dont elles auraient dû faire bénéficier le consommateur. Au contraire, elles ont cherché à maintenir artificiellement un profit injustifié.

De 2002 à 2007, 700 millions de commissions illégales auraient été ainsi collectés par les banques ici mises en cause.

Les banques ont un mois à la date du 20 septembre 2010 pour faire appel de cette décision. Le recours ne les dispense pas de payer les amendes. Comme il s'agit d'une sanction pénale, les clients des banques n'ont aucun recours. (Ils devront même financer le paiement de ces amendes ... )

Plusieurs banques pourraient encore être condamnées en 2010-2011 pour des ententes illégales sur le crédit immobilier et sur les cartes bancaires[19],[20],[21].

Droit des ententes : le droit antitrust aux États-Unis

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Notes et références

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  1. Chapsal, Antoine et Spector, David ” What Can be Learnt from Econometric Studies in Cartel Cases?”, Concurrences, N° 1-2009, pp.42-45. Spector, David « L'économiste appelé à la barre : la régulation économique et juridique de la concurrence ». Tracés, n° HS-11 [A quoi servent es sciences humaines (III)], 2011/3, pp.237-246.
  2. Spector, David « Droit des affaires : les mérites de la pénalisation », La Tribune, 14 septembre 2007
  3. a et b Jean-Marie Albertini, Les rouages de l'économie nationale, Paris, Les Éditions Ouvrières, , 317 p. (ISBN 2-7082-0663-X), p. 260
  4. Lénine, L'Impérialisme, stade suprême du capitalisme, (lire en ligne)
  5. a b et c Adecco, Manpower et VediorBis condamnées pour entente, Challenges, 2 février 2009
  6. Cf. Karl Laske, « «Bouygues fraude grâce à mon logiciel» – L'ancien chef du service informatique dénonce le truquage des appels d'offres. », Libération,‎ (lire en ligne)
  7. Cf. Philippe Defawe, « Ententes dans le BTP : l'affaire du logiciel Drapo refait surface », Le Moniteur du Bâtiment et des Travaux Publics,‎ (lire en ligne)
  8. a b et c Bruxelles inflige une amende record à Saint-Gobain, L'Express, 13 novembre 2008
  9. Les parfumeurs de luxe condamnés pour entente sur les prix, L'Expansion, 14 mars 2006
  10. a b c d et e GDF-Suez condamné par Bruxelles : les précédents, Rue89, 8 juillet 2009
  11. Concurrence: la Commission sanctionne Alstom, Areva, Siemens, Schneider et consorts, Boursier.com, 24 janvier 2007
  12. Concurrence: La Commission inflige des amendes supérieures à 990 millions d'euros aux membres des ententes sur les ascenseurs et les escaliers mécaniques, Bruxelles, 21 février 2007. Pdf sur le site des Échos
  13. Saint-Gobain écope d'une amende pour entente illégale, Le Figaro, 28 novembre 2007
  14. Bruxelles inflige une amende record à GDF Suez et E.ON, Le Figaro, 9 juillet 2009
  15. (Loi nº 2001-420 du 15 mai 2001 art. 52 Journal Officiel du 16 mai 2001)
  16. Union des Fabricants de Contreplaqué
  17. Décisions du Conseil de la Concurrence concernant l'UFC (2008)
  18. lefigaro.fr, « Chèques: dix banques devront repayer une amende de 385 millions d'euros » (consulté le )
  19. France-Info, article du 20 septembre 2010.
  20. Autorité de la concurrence, texte de la décision : [1]
  21. « Actualités en temps réel et info en direct », sur Franceinfo (consulté le ).

Annexes

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Articles connexes

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Liens externes

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