Guillaume-Gabriel Nivers
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Guillaume-Gabriel Nivers, né vers 1632 à Paris, où il meurt le , est un organiste et compositeur français de la période baroque. Il est en outre un théoricien de la musique et un réformateur du chant grégorien.

Biographie

Façade de l'Église Saint-Sulpice de Paris.

Né vers 1632, Guillaume-Gabriel Nivers est fils d’Antoine, fermier de l’évêque de Paris et mort en 1635, et de Geneviève Guignard. Peu après 1643, il emménage rive gauche de la Seine avec sa mère et sa sœur, ayant précédemment habité la rive droite dans la paroisse Saint-Paul.

Il est possible qu’il ait été enfant de chœur « non entretenu » à l'église Saint-Sulpice (il faut bien qu’il ait appris le plain-chant quelque part…). Son apprentissage du clavecin avec Jacques Champion de Chambonnières reste hypothétique, même si ce dernier a eu une influence certaine sur ses œuvres. Durant sa jeunesse, il semble s’être lié d’amitié avec deux ecclésiastiques, le prêtre sulpicien Charles Picoté, accessoirement organiste amateur, et Antoine Raguier de Poussé, curé de Saint-Sulpice à partir de 1658 à la suite de Alexandre Le Ragois de Bretonvilliers.

Nivers devint organiste de l'église Saint-Sulpice sa paroisse (il habitait rue Férou) entre 1651 et 1653, probablement comme successeur direct de l’organiste Vincent Coppeau ; il conserve ce poste jusqu'en 1702, quand son neveu et élève Jean-Baptiste Totin lui succède. Sa rétribution à ce poste (300 lt, puis 400 et 500 lt, y compris les gages du souffleur) était plus modeste que celle des autres organistes de Paris.

Il se marie le avec Anne Esnault mais devient vite veuf, en 1688. Ce mariage tardif (à 36 ans) et son diplôme de maître ès arts obtenu à l'Université de Paris en 1662 pourraient indiquer qu'il ait eu au début le projet de la prêtrise. En 1690, il perd également son fils unique Gabriel-Joseph (qui en 1688 était entré au Séminaire de la Congrégation de la Mission (les Lazaristes).

Le 19 juin 1678, après le décès de Jacques Chabanceau de La Barre, il est nommé organiste par quartier [trimestre] de la Chapelle royale au désir de Louis XIV, avec Nicolas Lebègue, Jacques Thomelin et Jean-Baptiste Buterne. Il obtient le quartier de juillet. Il résigne ce poste en 1708, au profit de Louis Marchand.

En 1681, il devient également maître de la Musique de la reine, en remplacement d'Henri Du Mont, partageant ce poste avec Paolo Lorenzani. Il a le semestre de juillet, jusqu’à la mort de la reine en 1683. En avril 1683, il échoue au concours de Versailles organisé par Louis XIV pour les postes de sous-maîtres de la Chapelle royale.

En 1686 enfin, il est chargé de la musique de la Maison royale de Saint-Louis à Saint-Cyr, couvent réservé aux jeunes filles de noble naissance. Il reste en place jusqu’à sa mort, travaillant en association Jean-Baptiste Moreau. Il compose là des chants et des motets et participe à diverses productions dramatiques comme claveciniste (telles Esther et Athalie de Racine). Son successeur est Louis-Nicolas Clérambault à partir de 1704.

Il se présente encore en 1696 à la candidature de compositeur de la Sainte-Chapelle de Paris, sans succès (c’est Marc-Antoine Charpentier qui prend le poste).

En octobre 1690, il dicte son premier testament. D’autres suivront, en 1691, 1707 et 1711. Son dernier testament donne des éléments concrets son aisance matérielle à la fin de sa vie, comme sur sa piété. À sa mort le 30 novembre 1714, il laisse des terres et une fortune de 200 000 livres, montant considérable qui témoigne de sa réussite.

Toute sa vie, Nivers a été un homme discret et digne de confiance, pieux, lié d’amitié avec plusieurs ecclésiastiques, et à sa mort généreux envers l’Église.

Ses travaux sur le chant grégorien

G G. Nivers, Dissertation sur le chant grégorien, Paris, 1683.

Le plain-chant a été pour Nivers une préoccupation importante et continue. Tout en s’inscrivant dans le contexte de la Réforme catholique, il fut l'un des acteurs les plus importants de son renouveau, comme compositeur, réviseur, théoricien et pédagogue.

Il regrette dans sa Dissertation de 1683 que celui-ci soit tombé dans nombre d’églises dans un état de désuétude ou de corruption sensible, que les livres de chant soient fautifs ou mal notés (quand ils ne sont pas absents), et que les prêtres y soient mal préparés. Il préconise donc que celui-ci soit largement révisé, en en respectant les règles, pour le remettre au service du texte et favoriser la prière. Il rappelle quelques règles de l’écriture du plain-chant sur les cadences successives, la non-répétition, la suppression des notes superflues, tout en introduisant « quelques notes avec prudence et discrétion » susceptibles d’améliorer certaines pièces.

Il a non seulement travaillé à réviser le plain-chant d’après les sources anciennes ; comme dans ses travaux pour les Prémontrés (vers 1675-1680), pour le graduel et l’antiphonaire pour les Bénédictins de Cluny ou pour ses Antiphonale romanum et Graduale romanum... « è puro fonte Romano elicitus accuratè notatur » (élaborés sur les sources romaines les plus pures), révisés entre 1680 et 1701 environ.

Dans ses collections de graduels et d’antiphonaires pour les communautés de religieuses (bénédictines, franciscaines et augustines), à partir de 1658, il promeut aussi une forme de plain-chant ornementé avec un rythme libre et variable[1], suivant un mouvement qui permet dès le début du XVIIe siècle de diffuser des livres liturgiques réservés aux dames religieuses. Les mélodies qu’il propose font des emprunts aux mélodies grégoriennes et gardent une souplesse bien adaptée au chant féminin, avec quelques agréments précisément notés.

Il travaille également à établir le plain-chant qui sera chanté dans la Maison Saint-Louis de Saint-Cyr, où la musique est très présente à la fois comme support de la piété et comme outil pédagogique. Plusieurs volumes manuscrits de chant des collections de la Bibliothèque municipale de Versailles ou de la Bibliothèque nationale gardent les traces de ces travaux. Plusieurs périodes se décèlent dans cette élaboration, la dernière (1700-1714) est celle qui fixe définitivement les règles liturgiques.

Les nombreux ouvrages qu’il publie à cet effet sont protégées par des privilèges successifs obtenus dès 1658 et régulièrement renouvelés, et sont majoritairement imprimés par la maison Ballard, à ses frais. Il en assure aussi lui-même une part de la diffusion.

L’œuvre

Pièces d’orgue

G.G. Nivers, Ier livre d'orgue (Paris, 1665).

Nivers a publié trois livres d'orgue dans une gravure élégante et soignée, soit plus de 200 pièces.

Contient au début des Observations sur le toucher et jeu de l'Orgue. Contient 12 suites de pièces arrangées sur les 8 modes ecclésiastiques.
Contient une messe, des hymnes et des proses.
Contient 7 suites de pièces arrangées sur les 8 modes ecclésiastiques.

Ces livres d'orgue sont les premiers à être publiés en France depuis ceux de Jehan Titelouze en 1623 et 1626. Avec les œuvres de Nicolas Lebègue, il est un des premiers à établir le caractère distinctif des compositions pour cet instrument et posent les bases du « style de l’orgue français », en lien fort avec la liturgie catholique comme avec la musique profane du temps. Ils consistent essentiellement en versets brefs, destinés à alterner avec le chœur lors du service divin.

Les mouvements de cantus firmus, les préludes et les fugues suggèrent le contrepoint traditionnel de l'église, tandis que les duos, les récits, les diminutions et les dialogues reflètent les domaines séculiers de la danse, du solo instrumental ou de l'air vocal[2] Leur écriture exploita autant les agréments typiques des compositeurs de musique pour luth et pour clavecin de l’époque, que toutes les richesses des timbres et des plans sonores l'orgue français (plein jeu, grand jeu, jeux d’anches…). La préface du premier livre riche d’enseignements sur le jeu de l’époque.

La compétence de Nivers pour les orgues lui avait valu d’être sollicité en 1683 pour la réception de l’orgue de Saint-Germain-l’Auxerrois et en 1687 pour celui de la Chapelle royale de Versailles (avant que la nouvelle chapelle soit construite en 1711).

Chant romain

Graduale romanum, éd. GG Nivers, Paris, 1697. Strasbourg BNU.

Musique liturgique : antiphonaires et graduels pour les communautés de religieuses

Graduale romanum... in usum… Ordinis S. P. Benedicti. Opera & studio G. G. Nivers... . Paris, 1696, Paris BnF.

Musique liturgique pour le Séminaire de Saint-Sulpice de Paris

Musique liturgique : passions

G.G. Nivers - Passiones..., Paris, 1723

Musique liturgique : leçons de ténèbres

Musique liturgique : vêpres

Musique liturgique à l’usage de Cluny

Musique liturgique à l’usage des Prémontrés

Musique vocale

G.G. Nivers, Motets à voix seule, Paris, 1689.
Les motets de Nivers sont représentatifs d'un style français encore peu marqué par l'influence italienne ; ils utilisent fréquemment des agréments et des rythmes irréguliers qui les rapprochent du récitatif. La préface est un des premiers textes français sur la pratique du continuo ; il montre comment accompagner les motets et le plain-chant « avec sagesse et modestie ».

Musique vocale pour la Maison royale de Saint-Cyr

Nivers, Vespres de la Vierge pour Saint-Cyr, BM Versailles

Traités et méthodes

Positionné après Marin Mersenne et avant Jean-Philippe Rameau, Nivers reste un important théoricien de la musique de son époque. La fréquence de la réédition de ses travaux, tout comme certaines traductions, montre clairement l’influence qu’il a pu avoir.

Ce traité est largement connu hors de France et a été remarqué par Sébasien de Brossard. Il traite surtout des intervalles, des modes, des cadences, de l'écriture et de la fugue.
Cette dissertation traite de l’esthétique du plain-chant et argumente les réformes de Nivers sur ce répertoire. Elle donne aussi des précisions sur le rôle de l'orgue au sein de la liturgie catholique.

Discographie sélective

Sur YouTube

Références

  1. Pour une synthèse biographique de ces collections assez complexes, voir Davy-Rigaux 2004 p. 181.
  2. Howell Davy-Rigaux 2021.

Annexes

Bibliographie

Jean Duron, éd., Plain-chant et liturgie en France au XVIIe siècle, Paris, 1997, (avec des contributions de Richard Scherr, Patricia Ranum, et Monique Brulin).

Articles connexes

Liens externes