Le pays de Jarez [ʒaʁɛ] est un territoire situé à la limite des départements de la Loire et du Rhône. Désignant initialement le bassin versant du Gier, il est aujourd'hui compris en majeure partie dans l'agglomération stéphanoise.
On retrouve le terme dans la dénomination de sept communes actuelles, de part et d'autre de la ligne de partage des eaux entre les bassins versants de la Loire et du Rhône :
Les communes appartenant également au massif du Jarez :
La vallée du Rhône : sur son versant sud, plus chaud, le Jarez est très influencé par le climat méditerranéen, une faible pluviométrie avec des été chaud et sec, la moyenne à l’année y est de 12,1 °C. On y retrouve des arbres fruitiers, des vignes.
Les versants nord et sud dominent l’agglomération stéphanoise face au mont Pilat avec les monts d'Auvergne au sud-ouest ; la chaîne des Alpes à l'est avec le mont Blanc. Le climat du Jarez est de type continental avec des influences montagnardes marquées : une moyenne de 95 jours de gel par an, une pluviométrie de 900 mm par an, la température moyenne annuel vers 700 mètres d’altitude y’est de 9,5°C. Les hivers sont souvent rudes et enneigés avec une forte présence de congères.
L’altitude minimale y est de 257 mètres et la maximale de 940 mètres.
L'appellation actuelle de « Jarez » dérive de Jarensis ager, Garensi, Gerensis ager. Le Jarez historique comprenait la vallée du Gier ainsi que les vallées du Furan et de l'Ondaine, il n'est jamais mentionné comme pagus dans les sources historiques.
La première mention carolingienne du Jarez est relative à l'église de Saint-Jean-de-Touslas ou de Saint-Jean-Bonnefonds en 868[1]. Il est également mentionné à trois reprises[2] dans le cartulaire de Savigny (Cellieu[3],[4], Échalas[5] et Trèves[6]).
Avant la conquête romaine, le Jarez était situé aux confins des territoires des Ségusiaves et des Allobroges[7], les toponymes semblant indiquer une frontière potentielle au niveau de Rive-de-Gier et du ruisseau l'Egarande[8],[9].
Il est vraisemblable que la défaite des Allobroges et des Arvernes lors de la bataille du confluent (121 av. J.-C.), qui conduisit à la fondation de Vienne, ait donné lieu à une occupation romaine des terres confisquées aux Allobroges situées le long de la principale voie de communication reliant l'Auvergne au Viennois. Dès lors, le massif du Pilat et la vallée du Gier constituait une marge septentrionale relativement sûre de la Gaule narbonnaise car située au contact du territoire des Ségusiaves (considérés comme un peuple-frère par Rome).
Strabon fait mention d'une route commerciale de 800 stades entre Rhône et Loire qui empruntait la vallée du Gier puis celle du Langonand ou du Furan. Cette route, d'environ 140 km de Vienne à Roanne (point où la Loire devenait navigable) évitait ainsi la navigation à contre-courant sur le Rhône puis la Saône[10].
La fondation de la nouvelle colonie romaine de Lugdunum vers 43 av. J.-C. conduisit à la construction de l'aqueduc du Gier (dont le bassin-versant fait partie de l'archiprêtré tardi-antique). Le captage des eaux pour l'aqueduc s'étendait au moins jusqu'à Izieux (quartier de Saint-Chamond). Il a peut-être inclut la capture des eaux du Janon et du Langonand[11], voire celles de l'amont du Furan (bassin de la Loire)[12],[13] (voir l'article « Janon » pour plus de détails). S'il est avéré, ce double captage aurait modifié le tracé initial de l'actuelle ligne de partage des eaux entre Terrenoire et Saint-Étienne.
Selon toute vraisemblance, le Jarez connu la double influence de la fondation des colonies romaines de Vienne puis de Lyon. Les possessions et les charges des grandes familles féodales attestaient peut-être encore au Moyen Âge de cette influence de part et d'autre du Pilat.
Le Jarez fut intégré au diocèse de Lyon probablement avant le IVe siècle[14]. Sans archidiacre ni doyenné, il était divisé en archiprêtrés au nombre desquels le Jarez apparaît, de loin, comme le plus vaste et le plus dense.
Le pouillé du diocèse de Lyon (rédigé vers 1225) dénombre pour l'archiprêtré de Jarez 104 lieux de cultes dont 83 églises, 2 chapelles et 19 monastères :
Écully, Grézieu, Sainte-Foy et Tassin, appartenant originellement au Jarez, apparaissent rattachées directement à l'administration métropolitaine à cette date.
L'archiprêtré était lui-même subdivisé en trois conseils ou conciles situés à :
Ces deux derniers furent divisés pour la composition de l'archiprêtré de Saint-Étienne au XVIIIe siècle.
À partir de 1156, le conflit opposant l'empereur Frédéric Barberousse au pape Alexandre III ravive localement les tensions entre les grandes familles féodales de la région autour de la question leurs droits héréditaires sur la ville de Lyon. Au sein de l'aristocratie locale, le jeu des allégeances royales ou impériales conduit au conflit armé entre les partisans du pape (ralliés au comte Guigues II de Forez, proche du roi de France) et ceux de l'empereur (menées par l'archevêque Héracle de Montboissier, vassal de Frédéric Barberousse).
À la veille de la permutatio (1173), le Jarez apparaît comme contrôlé par trois seigneurs, dont on ignore précisément le degré de parenté :
À la suite de la permutatio de 1173, la région fut l'objet d'un partage entre les possessions de l'Église de Lyon (qui conserva ses possessions de la vallée du Gier, Saint-Chamond, Saint-Jean-Bonnefonds et jusqu'à Saint-Genest-Lerpt) et celles du comte de Forez (qui garda la suzeraineté sur Saint-Priest-en-Jarez et la vallée du Furan). La transaction disposa également du maintien des droits des deux parties sur Saint-Héand et Sorbiers et de la démilitarisation d'un secteur compris entre Saint-Chamond, la Tour-en-Jarez et Saint-Priest, correspondant à l'actuelle agglomération stéphanoise.
La maison de Jarez paraît avoir été la plus ancienne et semble entretenir des liens étroits de parenté avec les Saint-Priest/Durgel/Lavieu/Feugerolles ainsi qu'avec la première maison des comtes de Forez et la deuxième maison de Forez[18],[19],[20]. Vassale à la fois du comte de Forez et de l'archevêque de Lyon pour certaines possessions, elle fut la maîtresse effective de Saint-Chamond, de Rochetaillée, de Saint-Priest-en-Jarez et de Feugerolles. Leur domaine s'étendait jusqu'à Pélussin, Bourg-Argental et Malleval.
Le nom Gaudemar était à l'origine celui des rois burgondes, un hypothétique lien de filiation est difficilement vérifiable.
Vers 1200, les possessions de la famille "de Jarez" étaient distribuées autour du massif du Pilat et relevaient pour partie du Viennois, du Forez et du Lyonnais.
En 1152, Gaudemar de Jarez, gendre d'Artaud seigneur de Malleval, fait hommage de ladite seigneurie à l’Église de Vienne[22].
Il apparaît en 1164 comme signataire d'un acte de donation de Dreux de Beauvoir en faveur de l'abbaye de Bonnevaux (abbaye-mère de Valbenoîte)[23],[24].
À la veille de la permutation, il tenait Saint-Priest-en-Jarez pour l'Église de Lyon. Le texte dispose de son hommage en le transférant au comte de manière qu'il doive désormais Saint-Priest à l'Église (bien que le roi ait octroyé les droits régaliens au comte).
Il conclut un accord avec le prieur de Saint-Julien-en-Jarez en 1202.
Il rendit hommage à l'Église de Lyon pour le château de Saint-Chamond en 1217 où il reconnait tenir en fief de l'Église tout ce qu'il possédait de la Croix-de-Montvieu[25] au mandement de Malleval.
Il échangea finalement avec l'archevêque de Lyon Renaud de Forez la seigneurie de Condrieu contre celle de Saint-Chamond[26].
Sa femme Clémence lui donna :
En 1224, Guigues de Jarez accorda une charte de franchise aux habitants de Saint-Chamond[30].
Parent du comte Guigues IV de Forez, il rendit hommage à ce dernier pour le mandement de Rochetaillée en 1230[31] et 1236[32],[33].
La tradition reprise par Jean-Marie De la Mure semblerait indiquer que cette famille entretenait un lien particulier avec la fonction vicomtale à Lyon[36], les sources ne permettent plus d'en juger aujourd'hui[37] (cf. Edouard Perroy, cité dans Roche-la-Molière > Seigneurs).
Elle apparaît néanmoins avoir tenu une place importante dans la noblesse lyonnaise et possédait les châteaux de Chamousset (avant 1100), des Farnanches à Doizieux (1297), Roche-la-Molière (1360), Yzeron (vers 1390), Feugerolles, et vraisemblablement à l'origine celui de Lavieu (donné pour vicomté dans les terriers mais rattaché au comté, au plus tard en 1167[38] ; selon Perroy, ce Lavieu en Lyonnais n'est pas Lavieu en Forez).
Jusque vers 1100, elle gravitait autour de la première maison de Forez mais semble, par la suite, avoir pris parti pour l'archevêque et de l'empereur. Elle mena la guerre contre Guigues II de Forez et la maison d'Albon.
Le même Guillaume (vers 1084-1096) abandonne ses droits sur l'église Saint-Laurent et la chapelle Saint-Pierre de Chamousset et approuve la donation de Bernard le Ronfleur, remise à l'abbaye de Savigny par l'archevêque Hugues de Die[42].
En 1167, le comte Guigues II de Forez est en guerre contre le comte de Mâcon et l'archevêque de Lyon. À sa demande, Louis VII lui remet les droits régaliens sur un ensemble de places fortes en Forez et en Jarez, dont Chamousset, Saint-Chamond, Saint-Priest-en-Jarez et Lavieu en Forez, apparemment au détriment des Lavieu.
Auguste Bernard signale que le château de Saint-Priest-en-Jarez arborait les armes des comtes de Genève[48].
La branche des Durgel (d'Urgel) de Saint-Priest s'inscrit dans la très longue lignée des stratégies matrimoniales entretenues au sein de l'aristocratie occitane entre les familles comtales de la région (Forez, Albon, Gévaudan, Provence), celles du Sud-Ouest (Toulouse, Rouergue, de Roussillon) et les comtés catalans (Barcelone, Urgell, Pallars Sobiras)[49] (cf. l'article St-Priest, avec un essai généalogique de la famille de Durgel[50]).
Ses membres entretiennent des liens de parenté aussi bien avec la première et que la seconde maison des comtes de Lyon et de Forez.