Une personne mineur transgenre est un enfant ou un adolescent transgenre n'ayant pas encore atteint la majorité civile dans le pays où il vit[note 1].
En raison de leur âge, les jeunes trans ne vivent pas de manière autonome et dépendent fortement de leur famille, de l'école, mais aussi des autorités politiques et médicales, quant à la possibilité d'effectuer une transition et aux modalités que celle-ci peut prendre. En particulier, l'accès aux bloqueurs de puberté fait l'objet de vifs débats dans l'opinion publique. Ces débats sont notamment liés à des désaccords quant à la réalité et à la fréquence de la transidentité chez les enfants, notamment par rapport aux comportements de genre non conforme de jeunes cisgenres.
Dans un contexte global de transphobie, ces enfants et adolescents sont particulièrement vulnérables aux problèmes de santé mentale (anxiété, dépression, pratiques à risque, suicide). Ces difficultés s'ajoutent à la dysphorie de genre, dont la puberté, anticipée ou vécue, est le point saillant.
Ces difficultés n'empêchent pas certains jeunes trans de s'engager dans une démarche militante de visibilisation de leurs vécus et de productions de ressources permettant de meilleures conditions de vie aux autres jeunes trans.
L'identification à leur genre, et la considération qu'il est différent du genre opposé, est tout aussi forte et cohérente chez les enfants cisgenres que transgenres : par exemple, les petites filles, qu'elles soient assignées fille à la naissance ou en transition sociale, s'identifient comme filles et comme différentes des garçons[u 1]. Si cette identification est généralement solidifiée chez les enfants cisgenres dès l'âge de trois ans, celle-ci peut intervenir plus tard chez les enfants trans[u 1].
La division genrée des activités et des groupes d'affinités est elle aussi présente avec la même force chez les enfants trans que cisgenres : les garçons, assignés garçon à la naissance ou en transition, ont tendance à préférer les jouets qu'aiment les autres garçons de leur classe d'âge, et à passer du temps avec d'autres garçons[u 1].
En revanche, les enfants transgenres, mais aussi leurs frères et sœurs cisgenres, adhèrent significativement moins aux stéréotypes de genre que les autres enfants cisgenres et, surtout, pratiquent beaucoup moins de sanction sociale envers les enfants aux comportements de genre non conformes et sont plus susceptibles de développer une relation amicale avec eux[u 1].
Un phénomène similaire existe concernant la fixité du genre au cours du temps : autant de petites filles trans que cis pensent qu'elles grandiront pour devenir des femmes, mais les enfants trans considèrent plus souvent que l'identité de genre d'une personne varie dans le temps[u 1].
La dysphorie de genre est définie, en 2013, dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, comme l'ensemble des souffrances psychiques résultant du sentiment d'inadéquation entre l'identité de genre d'une part, et le corps et la perception de genre d'autre part, chez les personnes transgenres[u 2].
Cette dysphorie se manifeste très tôt par une angoisse vis-à-vis de la puberté : des petites filles trans parlent ainsi à leurs parents, dès l'âge 4 ans, de leur peur à avoir de la barbe ou une voix plus grave[u 3]. Voir des enfants de leur entourage grandir et devenir pubères, tels que des grands frères ou grandes sœurs, est particulièrement source d'angoisse[u 3]. Ces enfants sont aussi dans une relation de haine envers leur corps, en particulier leurs organes génitaux[u 3]. Lorsque la puberté se manifeste, elle est vécue comme un traumatisme[u 3].
Les taux de prévalence de la dysphorie de genre chez les enfants ont été estimés en 2003 à moins de 1 % des enfants américains[u 4], 300 000 mineurs s’identifient comme transgenres[1].Toujours aux États-Unis, les filles trans sont légèrement plus nombreuses que les garçons trans, avec un rapport de 1,2 pour 1[u 5]. Entre 25 000 et 75 000 jeunes belges de moins de 19 ans seraient trans[p 1].
Les enfants trans décident majoritairement de cacher leur transidentité à leurs parents, aux membres de la famille et aux amis[u 2],[u 6]. La transidentité portée à la connaissance des parents est de nature à les conduire à un grand étonnement conjugué à des interrogations[2].
Une fois une transition entamée, il est très rare que les enfants trans détransitionnent : une étude conduite aux États-Unis montre que cinq ans après le début de leur transition, 94% des enfants continuent à être dans leur genre de transition, 3,5%, qui avaient d'abord transitionné vers fille ou garçon, sont alors non-binaires, et seuls 2,5% sont retournés à leur genre de naissance[u 7]. Ces détransitions, qui ont lieu jeunes, sont extrêmement rares chez les enfants qui sont sous bloqueurs de puberté[u 7].
La transition sociale chez les enfants comporte généralement un changement de prénom d'usage, de pronom, de coiffure et de style vestimentaire[u 7].
Le bénéfice de la transition sociale chez les jeunes prépubères est important en termes de bien-être et de fonctionnement global, selon de nombreuses études[3],[4],[5],[6].
La campagne Unbox Me ("Sors-moi de ma boîte") à l'initiative de l'ONU en 2022 vise à promouvoir une plus grande inclusion et acceptation des enfants transgenres et à défendre leurs droits[p 2]. En Californie, une loi de 2013 accorde aux enfants le droit d'utiliser les installations (dont les toilettes) correspondant à leur identité de genre[p 3]. Au Québec, les enfants d'un groupe scolaire peuvent, depuis mars 2023, choisir les toilettes ou le vestiaire du genre auquel ils s’identifient[p 4].
Au Canada, les modalités du changement d'état civil sont définies à l'échelle des provinces : en Alberta, Colombie-Britannique, Manitoba, Nouvelle-Écosse et Ontario, celui-ci est ouvert aux mineurs trans sans condition de chirurgie de réattribution sexuelle, alors qu'elle est nécessaire au Québec[7].
Un projet de loi adopté par le parlement écossais en décembre 2023 abaisse de 18 à 16 ans l’âge légal pour entamer des démarches de changement de genre à l'état-civil. Il n’exige plus d’avis médical pour obtenir un certificat de reconnaissance de genre. Il suffira d’avoir vécu trois mois (au lieu de deux ans) dans son nouveau genre. Le Premier Ministre de Grande Bretagne indique son intention de bloquer la mise en œuvre du "Gender Recognition Reform Bill". La Première Ministre de l'Ecosse souhaite contester ce veto en justice afin de défendre sa loi[8],[9].
Depuis le , la loi permet aux personnes dès 16 ans, de changer le genre sur les papiers d’identité, sans avoir à procurer des rapports médicaux ou de preuves de traitement hormonaux dans un délai de trois mois après le dépôt de la demande et sa validation. Le texte autorise les 14-16 ans à effectuer ce changement à l’état civil, sous réserve qu'ils soient accompagnés de leurs parents. Pour les 12-14 ans, il est nécessaire d'obtenir l'accord de la justice. Les thérapies de conversion sont interdites sous peine d'une amende pouvant atteindre 150 000 euros[10].
En France, le mineur émancipé qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel il se présente et dans lequel il est connu peut en obtenir la modification[11]. Le 25 janvier 2022 la Cour d'appel de Chambéry reçoit favorablement la demande de modification de la mention du sexe à l’état civil pour un mineur de 17 ans non émancipé avec l’autorisation de ses parents. La Cour considère que ne pas lui permettre de changer la mention du sexe sur ses documents officiels, notamment ses diplômes, serait de nature à établir une « atteinte disproportionnée » à sa vie privée, en créant une discordance entre son état civil, son apparence et son comportement social[12].
Le Conseil de l'Europe recommande également de « promouvoir la tolérance et le respect mutuels à l’école, quelle que soit l’orientation sexuelle ou l’identité de genre », par exemple en fournissant « des informations objectives concernant l’orientation sexuelle et l’identité de genre » dans « les programmes scolaires et le matériel pédagogique »[13]. La transidentité reste difficilement acceptée en milieu scolaire, les élèves trans y subissant du harcèlement de la part non seulement des élèves cisgenres, mais aussi du personnel scolaire[u 8],[u 9]. Ce harcèlement prend notamment la forme de comportements transphobes, le mégenrage et, surtout, une réponse inadaptée des institutions scolaires avec à ces comportements[u 10].
Toutefois, l'école peut aussi être vécue comme un espace sécurisé et d'épanouissement pour les élèves transgenres : c'est le cas lorsque leurs pronoms et prénoms sont respectés par tous, qu'il est possible d'occuper une position sociale non-binaire, que du soutien et de la confidentialité sont trouvables au sein du personnel éducatif, et plus particulièrement si une personne est identifiée comme interlocutrice privilégiée sur la transidentité, la présence de ressources sur la transidentité, ou la possibilité d'utiliser les toilettes l'uniforme conforme à l'identité de genre des élèves trans[u 11]. Les réactions efficaces contre la transphobie, ainsi que des liens forts entre les écoles et les associations transgenres, sont très prédictives du bien-être des élèves trans qui les fréquentent[u 11].
Les enfants et adolescents trans considèrent que, lorsqu'ils poussent les écoles à respecter leur identité de genre, il ne s'agit pas tant d'une démarche personnelle que d'un investissement militant: corriger un professeur sur le pronom à utiliser, c'est se défendre soi-même, mais surtout faire en sorte que les prochains élèves trans de ce professeur auront une expérience plus facile[u 11].
Depuis la rentrée scolaire de 2021, les parents à partir de la classe de première secondaire peuvent choisir sur les formulaires d’inscription entre : garçon, fille et neutre. Cela est destiné à lutter contre la discrimination des élèves transgenres[p 5]. Les toilettes neutres sont mises en place à l'école[14].
Le Nouveau Brunswick et la Saskatchewan adoptent en 2023 des mesures similaires en subordonnant à une autorisation parentale, l'utilisation par les élèves de moins de 16 ans, du prénom de leur choix . La Ministre des Femmes, de l'Égalité des genres et de la Jeunesse surveille de très près l'évolution de cette situation[15].
En Espagne en 2019, Elsa une fillette transgenre âgée de 8 ans prononce un discours devant l'assemblée du conseil régional de l'Estrémadure afin de faire reconnaitre le droit de ce que l'on est vraiment pour vivre heureux[p 6]. Un adolescent en cours de transition âgé de 12 ans se donne la mort par défenestration avec sa sœur jumelle le , en Catalogne. Cette dernière est hospitalisée dans un état grave. Les proches dénoncent le harcèlement scolaire dont sont victimes les deux jeunes (utilisation régulière du morinom pour le garçon)[16].
En octobre 2022, le gouverneur de l’État de Virginie envisage de prendre des mesures afin qu'un élève transgenre puisse demander à être appelé par un autre prénom seulement si ses parents le demandent par écrit au personnel éducatif ainsi que pour ses pronoms[17]. Une loi est définitivement adoptée en 2023 par les 2 chambres du parlement de l'Etat du Kentucky malgré le veto du gouverneur démocrate Andy Beshear. Le Service de l'éducation ou bien une circonscription scolaire de cet État ne doit pas exiger ou recommander des politiques ou des procédures pour l'utilisation de pronoms qui ne sont pas conformes au sexe biologique d'un élève tel qu'indiqué sur le certificat de naissance original et non édité de l'élève délivré au moment de la naissance. Tout enfant, quel que soit son niveau scolaire, inscrit dans la circonscription ne reçoit pas d'instruction ou de présentation ayant pour but ou objectif de d'étudier ou d'explorer l'identité de genre, l'expression de genre (…). Un élève qui affirme aux responsables de l'école que son genre est différent de son sexe biologique et dont les parents ou le tuteur légal donnent leur consentement écrit aux responsables de l'école bénéficie des meilleurs aménagements possibles, mais ces aménagements ne comprennent pas l'utilisation des toilettes, des vestiaires ou des salles de douche de l'école destinés aux élèves du sexe biologique opposé lorsque des élèves du sexe biologique opposé sont présents ou susceptibles d'être présents[18],[19]. Un juge fédéral de première instance permet en 2023 l'entrée en vigueur d'une loi de l'Idaho obligeant les élèves des écoles publiques à utiliser les toilettes correspondant au sexe qui leur a été assigné à la naissance. Les établissements scolaires risquent une amende de 5 000 dollars. Cependant, il sursoit à statuer définitivement dans l'attente de la présentation d'autres éléments de preuve au tribunal. La jurisprudence concernant ce sujet reste partagée aux Etats-Unis. La Cour d'appel des États-Unis pour le quatrième circuit juge illégale la politique d'une école de Virginie, alors que la Cour d'appel du 11e circuit confirme la politique d'une école de Floride[20].
À la suite de suicides d'élèves, le ministère de l'Éducation Nationale publie pour la rentrée 2021, une circulaire décrivant la manière dont les enfants et adolescents trans doivent être accueillis à l'école ; celle-ci requiert l'accord des parents pour changer le pronom et le prénom d'usage des élèves, et limite l'utilisation de ce prénom aux documents non-officiels, à l'exclusion des diplômes et bulletins[21],[a 1]. Le 18 septembre 2023, la police arrête dans sa classe un collégien cisgenre âgé de 14 ans car il a menacé de mort, sur les réseaux sociaux, une lycéenne en cours de transition (MtF). Il est déféré le jour même devant un juge du tribunal de Créteil qui prononce une mesure de réparation éducative à son encontre[22],[23],[24].
La circulaire est contestée devant le Conseil d'État, au regard de la loi du (6 fructidor an II), laquelle indique qu'« aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance : ceux qui les auraient quittés seront tenus de les reprendre » et précise qu'il est « expressément défendu à tous fonctionnaires publics de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille [et les] prénoms portés en l'acte de naissance ». La haute juridiction dispose que l'utilisation d'un prénom d'usage dans le cadre interne à l'établissement scolaire, hors notations, n'enfreint pas ledit texte[25],[26].
La loi du rend illégal le fait de réprimer l’identité de genre des enfants trans[27]. En mai 2023, des sénateurs de droite lancent un groupe de travail sur la transidentité des mineurs. Ce courant politique s'interroge pour savoir si cette thématique a sa place à l’école. La sénatrice LR du Val d’Oise, Jacqueline Eustache-Brinio animera les auditions avec de nombreux experts (médecins, associations, juristes, experts internationaux) avant d’envisager le cas échéant une évolution du cadre juridique pour les mineurs[28]. Pour aider à répondre aux interrogations sur le genre, une compagnie théâtrale interprète la vie de la célèbre meneuse de revue Bambi dans une pièce destinée à être jouée dans les collèges et les lycées en 2024[29].
La ministre de l’Éducation et la ministre des Femmes et de l’Égalité à l'égard du changement de genre à l’école élaborent une série de recommandations très détaillées non contraignantes destinées aux agents du secteur scolaire et universitaire. L'inscription doit s'opérer sous le prénom légal de l'enfant avec son sexe de naissance dans le registre des admissions des établissements d'enseignement. Ils peuvent autoriser les élèves de changer leur prénom ("connu comme") s'ils estiment que c'est dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Les enfants en âge d'aller à l'école primaire ne devraient pas avoir de pronoms différents des pronoms basés sur le sexe utilisés à leur sujet. Pour les enfants plus âgés, les écoles n'ont pas besoin de spécifier les pronoms à utiliser pour chaque élève et peuvent refuser une demande de changement des pronoms d'un enfant. Lorsqu'une école ou un collège examine la une demande de changement de pronom, il doit consulter les parents de l'enfant et prendre en compte tous les facteurs pertinents et examiner toutes les preuves. Après cela, les écoles et collèges ne doivent accepter un changement de pronoms que si les avantages pour l'enfant l'emportent sur les conséquences pour la communauté scolaire. Dans de rares cas, aucun enseignant ou élève ne doit être contraint d'utiliser ces pronoms préférés et cela ne doit pas empêcher les enseignants de se référer aux enfants collectivement comme "filles" ou "garçons", même en présence d'un enfant qui a été autorisé à changer de pronoms. Les élèves ne seront pas admis dans les vestiaires ou les toilettes des enfants d’un autre sexe de naissance. Lors d'un voyage scolaire aucun enfant ne doit être autorisé à partager sa chambre avec un enfant du sexe opposé. Si un enfant s'interroge sur son genre ne souhaite pas partager sa chambre avec un autre enfant du même sexe, dans la mesure du possible, et seulement après que l'école ait pris en compte des facteurs pertinents, d'autres arrangements doivent être recherchés. Ils ne doivent pas compromettre la sécurité, le confort, l'intimité ou la dignité de l'enfant ou des autres élèves (par exemple une chambre séparée appropriée pour l'élève). Les décisions relatives à l'uniforme ne doivent être prises qu'après une consultation appropriée avec les parents de l'enfant, après avoir pris en compte les facteurs pertinents. Lors de la prise de décision, les écoles doivent se demander si cela s'applique à tous les éléments de l'uniforme ou certains éléments[30],[31].
Une enseignante suédoise est licenciée en 2022 pour avoir systématiquement refusé d'utiliser un pronom neutre quand il s'agissait de nommer un élève trans. Le médiateur chargé de la lutte contre les discriminations condamne l'établissement scolaire qui n'a pas réagi assez rapidement. Il devra verser une indemnité de 15 000 euros à l'enfant[p 7].
En Suède, un garçon de 9 ans est exclu en 2018 de son équipe de football masculine en raison de sa transidentité ; si une plainte est déposée contre le club en 2018, l'enfant joue désormais avec les garçons dans le club d’une commune voisine[p 8]. En octobre 2022, une collégienne dans l'Etat du Vermont tient des propos désobligeants à l'égard d'une jeune fille trans présente pour se changer dans les vestiaires de son équipe féminine de volley-ball. Elle est exclue de son collège pendant 2 jours[32]. Une mère de famille reproche à la commune de Puteaux et à son prestataire d’avoir hébergé son garçon trans âgé de 12 ans dans une chambre pour filles lors d’un séjour aux sports d’hiver en 2023[33]. Le Kansas interdit par un texte aux athlètes transgenres la pratique de sports féminins de la maternelle au collège à partir du . Trois filles transgenres participent à des sports de la 5ème à la terminale en 2023, dont deux seniors[34]. L'administration Biden propose le d'empêcher juridiquement les écoles américaines d'interdire la présence d'athlètes trans aux côtés d'élèves correspondant à leur identité de genre, mais offrirait une flexibilité pour les compétitions de haut niveau[35].
Une sénatrice conservatrice d'Australie, Amanda Stoker, mène une campagne contre les changements de sexe pour les enfants[36].
Jusqu'en 2013, le DSM-4 pathologisait la transidentité en elle-même : elle était alors définie comme un « trouble de l'identité sexuelle » : ainsi, le rôle d'un psychiatre, face à une patiente trans, était de l'amener à se libérer de son trouble et donc à vivre en homme[u 2]. Bien que cette vision ait été abandonnée dans le DSM-5, cette vision perdure chez des médecins et thérapeutes : ainsi, si les États américains de Californie, du New Jersey et du Massachusetts ont interdit ces pratiques, assimilées à des thérapies de conversion, des praticiens, tels que le psychiatre Paul R. McHugh, estiment qu'il s'agit de la meilleure thérapeutique puisque, pour lui, le changement de sexe est impossible et que les enfants transgenres sont en réalité des enfants à l'expression de genre non-conforme[p 9].
Malgré le passage de trouble de l'identité sexuelle à dysphorie de genre, beaucoup de parents d'enfants trans trouvent qu'un tel diagnostic, qui est souvent nécessaire pour accéder aux bloqueurs de puberté, aux hormones sexuelles ou à la chirurgie, fait plus de mal que de bien aux enfants, et n'est pas pertinent pour déterminer si ceux-ci sont effectivement trans[u 7].
Le traitement visant à bloquer la puberté a été mis au point au début des années 1980 pour les enfants atteints de puberté précoce. « Encore rarissimes en France » (en 2015), ils sont proposés aux Pays-Bas, États-Unis, Royaume-Uni ou Canada[p 10]. Le traitement consiste à administrer à l'enfant des hormones de synthèse qui imitent l'action de la GnRH, l'hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires normalement produite dans l'hypothalamus. En réponse à la libération des hormones sexuelles, les récepteurs à la GnRH se désensibilisent et bloquent son activité. Des injections répétées sont nécessaires pour que la puberté reste en sommeil. À l'arrêt du traitement, elle reprend son cours normal[p 10]. Le traitement est généralement entamé avant l'apparition des premiers signes de puberté, qui sont mal vécus par les enfants transgenres[p 11]. Quelques rares effets secondaires sont répertoriés, dont des risques de douleurs musculaires et articulaires, de la fatigue, des troubles du sommeil ou un retard de calcification des os[p 10].
Les bloqueurs de puberté ont été administrés pour la première fois à la fin des années 1990 à l'hôpital universitaire d'Amsterdam, le VU Medical Center. Toujours aux Pays-Bas, un deuxième centre spécialisé a ouvert en 2011 à Leyde. Dans le pays, environ 300 adolescents ont bénéficié du traitement entre son lancement et l'année 2015[p 10].
La seule "clinique du genre" pour enfants du Royaume-Uni ferme en 2022 à la demande du National Health Service en raison de l’utilisation d’un bloqueur de puberté et d’autres pratiques controversées. Elle sera remplacée par deux services spécialisés basés dans les principaux hôpitaux pour enfants [p 12].
En France, les hôpitaux de la Pitié-Salpêtrière et Robert-Debré ont ouvert leurs consultations aux mineurs, qui seront suivis par un pédopsychiatre pendant au moins six mois ; des solutions non médicamenteuses sont d'abord proposées[p 13]. En suivant les recommandations internationales, les professionnels spécialisés dans ce domaine peuvent prescrire des bloqueurs de puberté à l'arrivée de la puberté — avant les hormones masculinisantes ou féminisantes —. Leur utilisation reste en effet controversée en France[u 12]. À Paris en 2020, environ sept cents mineurs — de 3 à 18 ans —sont suivis ou sur liste d'attente[p 14]. Si le nombre de demandes de transition augmente (multiplié par 10 en 7 ans selon l’Assurance maladie), le taux de regret demeure faible, autour de 10 à 20%[p 15],[p 16].
L'American Psychiatric Association, dans une communication de 2020, souligne l'importance de l'utilisation des bloqueurs de puberté pour le bien-être mental et émotionnel des enfants et adolescents ; elle rappelle que l'absence d'intervention, en raison de l'impact de la puberté, n'est pas une décision neutre et qu'il vaut mieux laisser les enfants et adolescents le temps d'explorer leur identité de genre[37]. En 2022, une polémique s'empare d'un groupe de pédiatres de l'American Academy of Pediatrics car certains membres critiquent l'emploi des bloqueurs de puberté[p 17].
Non seulement les bloqueurs, lorsqu'ils sont pris, permettent d'éviter le traumatisme de la puberté et de laisser aux enfants des années supplémentaires pour réfléchir à leur identité de genre, mais le fait même de savoir qu'ils sont une possibilité permettent aux enfants trans pré-pubères de calmer leurs angoisses[u 3].
Un phénomène paradoxal a lieu avec les bloqueurs de puberté : alors que, dans les années 2010, émerge un consensus médical quant à la pertinence de leur utilisation, ceux-ci sont aussi l'objet d'un violente contre-attaque idéologique s'opposant à leur utilisation[u 3]. Ces contre-attaques ont parfois abouti à la mise en place de limitations légales à l'accès de ces traitements[u 3],[u 13],[u 14]. C'est le cas notamment en Angleterre et au pays de Galles où, dans un arrêt rendu le , la Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles) limite très fortement la possibilité pour des enfants de moins de 16 ans d'avoir accès à des bloqueurs de puberté[p 18],[p 19].
Le processus d'accès aux bloqueurs de puberté est une épreuve difficile pour les enfants et adolescents trans : ceux-ci témoignent de devoir prouver qu'ils sont « assez trans » pour avoir droit au traitement, de parler de leur rapport à leur corps alors qu'il s'agit d'une conversation pénible pour eux, et de devoir prouver que leur mal-être est uniquement dû à leur dysphorie de genre, sans aucune autre explication possible[u 3]. Les équipes utilisent aussi souvent une définition restreinte de la dysphorie de genre, considérant par exemple que les bloqueurs de puberté ne devraient être prescris qu'aux enfants et adolescents vivant une dysphorie génitale, et ce alors que de nombreux adultes trans n'effectuent pas de chirurgie de réassignation sexuelle[u 3]. De nombreux parents témoignent aussi de tentatives par les équipes médicales de les convaincre de ne pas laisser leurs enfants effectuer une transition médicale, invoquant des taux de regrets surélevés par rapport à la réalité[u 3]. Outre la pénibilité des rencontres entre équipes médicales et enfants trans, celles-ci s'étirent longuement dans le temps, sur plusieurs années, au point que les bloqueurs soient prescrits alors que la puberté a déjà commencé ; des parents témoignent qu'il s'agit parfois d'une volonté délibérée des équipes, pour vérifier que les enfants considèrent leur puberté réelle comme effectivement aussi insupportable que ce qu'ils avaient anticipé[u 3]. De nombreux endocrinologues ne prennent en consultation que les mineurs qui ont déjà commencé leur puberté, avec des critères arbitraires quant à la taille minimale des testicules ou des seins des adolescents indépendants de leur détresse émotionnelle[u 3]. Un garçon transgenre de 14 ans introduit une action en justice en novembre 2020, soutenu par The Good Law Project contre le National Health Service en raison du retard dans l'accès au traitement d'un changement de sexe. Il a attendu plus d’un an avant d'être accepté dans une clinique alors que d'après lui le NHS a « l’obligation légale » de fournir des soins spécialisés dans un délai de 18 semaines. Le temps d’attente moyen pour un premier rendez-vous avec le Service de Développement de l’Identité de Genre serait de 18 mois, selon l'association, voire dans certains cas de quatre ans[38].
En 2022, une méta-analyse note que « plusieurs études ont été publiées soulignant les impacts positifs sur le devenir psychologique ainsi que l’innocuité relative de la suspension de la puberté, dite ‘suppression de puberté’ » et que « le ratio bénéfice/risque semble suffisamment solide pour que cette proposition de soin soit reprise dans toutes les recommandations internationales dans des indications similaires »[39]. La prise de bloqueurs de puberté s'accompagne d'une sérénité retrouvée des enfants et des adolescents, ainsi que d'une plus confiance en eux[u 3]. Toutefois, pour les adolescents les plus âgés, la prise de bloqueurs seuls, sans hormone sexualisante (œstrogène ou testostérone) peut s'avérer pénible (bouffées de chaleur, troubles de l'humeur)[u 3].
La Finlande en 2020, puis la Suède en 2022, décident d'adopter un moratoire sur l’accès des mineurs aux traitements hormonaux de changement de sexe, considérant que « les risques d’un traitement hormonal inhibant la puberté pour les moins de 18 ans l’emportent actuellement sur les avantages possibles »[40].
L'accès aux hormones sexualisantes est limité pour les mineurs : un hôpital de Suède n'en propose plus qu'aux majeurs, et les recommandations en Angleterre posent une limite à 16 ans minimum[u 3],[p 20]. Cela crée des situations absurdes, où des garçons trans sous bloqueur de puberté souffrent d'un manque d'hormone sexuelle, mais à qui on refuse la testostérone qu'ils veulent tout en leur proposant des œstrogènes de synthèse, hormone dont les bloqueurs empêchent justement la production naturelle[u 3]. Ce délai provoque une détresse sociale, où les adolescents trans de 14-15 ans se retrouvent seuls à être prépubères tandis que leurs camarades de classe sont déjà bien avancés dans leur puberté[u 3].
Les opérations de réattribution sexuelle pratiquées sur des mineurs demeurent très rares mais sont en augmentation : environ 50 par an en France, 200 par an aux-États-Unis, essentiellement pour des garçons trans[p 21],[p 22].
Le California Department of Insurance rappelle en décembre 2020 aux compagnies d'assurance maladie par l'intermédiaire du Procureur général de Californie, qu'en application de l'article 12921.9 du code des assurances, refuser la prise en charge pour la mastectomie et la reconstruction d'un thorax masculin uniquement sur la base de l'âge est interdit en vertu des lois de l'État exigeant la couverture de la chirurgie reconstructive. Les compagnies d'assurance maladie doivent tenir compte de la situation clinique spécifique du patient pour déterminer la nécessité d'une intervention médicale,[41]. L'Arkansas devient le premier État américain en 2021 parmi plus d'une vingtaine à interdire aux mineurs l'accès aux transitions médicales[p 23]. Cependant en juillet 2021, un juge fédéral saisi par l'Union américaine pour les libertés civiles ordonne la suspension de la loi par une injonction interlocutoire en raison de la violation de la Constitution des États-Unis[p 24],[p 25]. Le Montana adopte une loi le visant à interdire toutes opérations de réattribution sexuelle et/ou traitements médicamenteux pour les mineurs. Une élue démocrate trans n'est plus autorisée à s'exprimer devant la Chambre des représentants de l'Etat en raison d'un commentaire contre les autres élus ayant voté en faveur de ce texte[42],[43]. Dans un second temps, elle en est exclue par un vote de cette assemblée[44]. Certaines familles sont contraintes de déménager vers l'Illinois, le Minnesota ou la Californie afin que leur enfant puisse vivre leur identité de genre librement, sans obstacle juridique[45]. Après la Floride en mai 2023, qui limite les droits des personnes transgenres, le Texas promulgue une loi le qui prohibe la prescription « des médicaments bloquant les hormones ou subit une intervention chirurgicale pour modifier le comportement sexuel de tout jeune de moins de 18 ans ». La Maison Blanche rappelle que 600 lois des États fédérés ciblant la communauté LGBTQ ont été adoptées en 2023. En mars 2023, le Président Joe Biden lui-même déclare que de telles "attaques" contre les droits des transgenres étaient « non américaines et doivent cesser »[46].
En France, la section éthique et déontologie du Conseil National de l’Ordre des Médecins, interpelée par l’Assistance publique–Hôpitaux de Paris, a conclu notamment que « Dès lors que des actes de chirurgie esthétique peuvent être pratiqués sur des mineurs, une torsoplastie effectuée dans le cadre d’une transition de genre pourrait être considérée comme un acte de chirurgie réparatrice ou reconstructrice […] et être pratiquée sur un mineur après information et consentement de ce dernier et des titulaires de l’autorité parentale. »[39]. Le Réseau Santé Trans explique que cet avis renforce le droit des adolescents trans à bénéficier de chirurgies, tout en dénonçant la pratique en France de la vaginoplastie sur des enfants intersexes non consentants[47]. A la suite d'un dépôt de plainte de parents, un psychiatre et un endocrinologue sont sanctionnés en 2021 par le conseil régional du conseil de l'ordre des médecins pour leur rôle dans le cadre du parcours de transition d'un jeune homme (FtM). Ils sont convoqués en audience d'appel le devant le Conseil national de l'Ordre des médecins. Leur fils se sent quant à lui « heureux et libre »[48].
La version septembre 2022 des standards de soin de la WPATH[49] ne prévoit pas de seuil d’âge chez l’adolescent pour un certain nombre d'opérations (féminisation faciale, augmentation mammaire, orchidectomie, hystérectomie, et métoidioplastie) et décrivent des effets positifs de la vaginoplastie chez les jeunes femmes trans mineures, mais ne soutiennent pas la possibilité de phalloplastie chez les jeunes hommes trans mineurs[47].
Un article alarmiste publié dans le journal conservateur Daily Mail en 2018, au Royaume-Uni, présente les transitions chez les enfants comme un phénomène de mode, non pas dû à une véritable transidentité mais à une influence d'internet et des élèves trans sur les élèves cis influençables, en particulier autistes[p 26]. En 2020, une tribune française d'une cinquantaine de psys, médecins et intellectuels avaient qualifié la transition comme une « emprise idéologique sur le corps des enfants »[p 27]. Le psychiatre américain McHugh a qualifié en 2020 l'administration d'hormones retardatrices de puberté de proche de la « maltraitance sur mineurs », arguant qu'elles ralentissent croissance des enfants et risquent de provoquer leur stérilité[p 9]. Une nouvelle tribune similaire, réunissant 140 scientifiques et intellectuels, est publiée en 2022 dans la presse européenne[p 28].
Ces tribunes ne sont pas restées sans réponse. Ainsi, le pédopsychiatre Jean Chambry responsable du Centre Intersectoriel d'Accueil pour Adolescent à Paris, publie en 2020 une tribune dans L'Express dans laquelle il attribue l'augmentation des transitions chez les adolescents par la libération de la parole concernant la transidentité qui évite que les jeunes trans passent à côté de leur identité en raison d'une absence de mots pour en parler[p 29]. La transidentité est indépendante de la pression sociale selon une étude menée par l’American Academy of Pediatrics en 2022[50].
Les personnes transgenres sont souvent victimes de transphobie — rejetées, discriminées, insultées ou brutalisées[p 30]. Selon une étude italienne datant de 2011, 27,5 % des enfants trans ont déjà subi des violences[p 3]. Certains parents réagissent très négativement au coming-out trans de leurs enfants, allant jusqu'à rejeter l'enfant du foyer, ou à lui imposer une « thérapie de conversion » pour le remettre « dans le droit chemin ». Ces « thérapies », liées à la droite chrétienne américaine, sont jugées dangereuses par l’association américaine de psychiatrie, et vivement contestées par une partie de l'opinion publique[p 30]. Les mineurs transgenres sont plus victimes de maltraitance que les enfants et adolescents cisgenres[u 15].
Les enfants trans subissent plus souvent du harcèlement que les enfants cisgenres, quelle que soit leur orientation affective et sexuelle ; cela contredit l'hypothèse, souvent affirmée par les opposants à la transition des mineurs, que les mineurs trans sont en réalité des jeunes lesbiennes ou de jeunes gays cherchant à échapper à l'homophobie, puisque la transphobie à laquelle ils font face est en réalité pire[u 5].
En raison de la transphobie qu'elles subissent, beaucoup de jeunes personnes trans internalisent dès le plus jeune âge qu'elles sont un problème et que leur identité de genre doit rester cachée[u 11],[u 16]. Cela rend les enfants et adolescents trans beaucoup plus vulnérables à une multitude de problèmes tels que des troubles psychiatriques, l'abus de substances, les conduites à risque ou le suicide[u 15],[p 3]. Le taux de suicides et de tentatives de suicide dans la population trans est d'ailleurs extrêmement élevé : en France, en 2009, plus de 65 % des jeunes transgenres de 16 à 26 ans ont déjà envisagé le suicide, et près de 34 % ont déjà fait une ou plusieurs tentatives[p 3],[p 31].
En 2018, une enquête sur la santé des personnes LGBTI souligne que les jeunes trans vivent très mal leurs années de collège : près des 86 % des personnes trans interrogées se sont senties mal au cours de leur scolarité[p 32]. En particulier, les élèves qui subissent du harcèlement transphobe réussissent moins bien en classe, ont moins d'activités extra-scolaires, sèchent plus de cours et ont globalement moins confiance en eux, ce qui impacte négativement la manière dont ils envisagent leur orientation future[u 11]. En 2022, un couple et leur fils trans préfèrent quitter le Texas où des textes hostiles aux jeunes trans sont adoptés[p 33].
Les jeunes trans sont aussi proportionnellement plus nombreux que les cisgenres à être sans-abri et à se prostituer pour assurer leurs revenus[u 2].
Les jeunes trans se tournent souvent vers le web pour trouver information et soutien[p 34]. L'accès à une communauté acceptante de la transidentité, qu'elle soit en ligne ou pas, améliore la santé mentale des jeunes trans[u 2].
En 2007, alors qu'elle n'a encore que six ans, Jazz Jennings donne une interview à la télévision américaine sur ce que signifie être une petite fille trans[u 1]. Alors âgée de 16 ans, la militante Eli Erlick fonde en 2011 l'association Trans Student Educational Resources, qui produit des documentations sur l'accueil des élèves transgenres dans le système scolaire[p 35]. En 2015 sort la série documentaire I am Jazz (en), centré sur la vie de Jazz Jennings, alors âgée de 14 ans[p 36].
En 2013 est lancé le TransYouth Project, une étude longitudinale sur le développement des enfants ayant commencé leur transition sociale avant le début de leur puberté[u 1].
Les travaux internationaux montrent un bénéfice des traitements médicaux sur le bien-être global des jeunes concernés. Cependant d'autres thématiques gagneraient à être approfondies : un état des lieux de l’accompagnement des mineurs en France, l’impact des traitements hormonaux au long cours, le consentement éclairé des mineurs et sur les enjeux de préservation de leur fertilité, notamment. Enfin, la HAS souhaite mener une enquête auprès des services (hospitaliers, Maison Des Adolescents) et des professionnels libéraux pour établir un état des lieux de l’accompagnement des mineurs trans et en exploration de genre. Elle veut veiller à un maillage territorial de l’offre d’accompagnement des mineurs, en consolidant les équipes spécialisées et en soutenant la formation et le travail en réseau des autres professionnels impliqués[51]. Il n'existe pas d'orientation nationale en France sur les thérapies en dehors des recommandations précitées de l'Académie de Médecine et de la HAS[p 37].
Pour la première fois en Belgique francophone, en 2021, le Centre d’Accompagnement des Transidentités du CHU de Liège lance une consultation mixte en pédopsychiatrie et endocrinologie pédiatrique spécialisée sur la question transidentitaire infanto-juvénile afin de répondre à une demande émergente, des besoins spécifiques des enfants et des adolescents[p 38].
En raison de la pathologisation de la transidentité comme trouble de l'identité sexuelle jusqu'au début des années 2010, la grande majorité de la littérature universitaire produite sur les enfants transgenres est écrite par des professionnels de santé mentale, avec une majorité d'entre eux cherchant à faire revenir les enfants trans vers un développement cisgenre vu comme sain[u 17]. S'est développé ensuite une série de publications se focalisant toujours sur la santé mentale des enfants trans, mais partant d'une position d'affirmation plutôt que de correction du genre revendiqué par les enfants[u 17].
Les sociologues Karine Espineira et Alex M. Mahoudeau notent que, dans la représentation médiatique des enfants transgenres, la parole des adultes trans qui avaient réalisé leur transidentité dans leur enfance est invisibilisée[a 2]. De plus, cette représentation, en particulier autour de la transition de Jazz Jennings, est sensationnaliste, favorisant des effets de paniques morales ; elles expliquent ce sensationnalisme par la structuration des médias, qui cherchent de plus en plus à produire du contenu à un rythme tellement élevé qu'il devient difficile de présenter la transidentité dans ce qu'elle a de banal et factuel[a 2]. Elles notent cependant que cette médiatisation a eu des effets positifs pour les enfants trans, en permettant la création d'aides à destination des familles et du personnel médical[a 2].