Pilier des Nautes
Pilier des Nautes : les dieux Tarvos trigaranus sous l'aspect d'un taureau et Vulcain.
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Le pilier des Nautes est une colonne monumentale gallo-romaine érigée en l'honneur de Jupiter par les Nautes de Lutèce au Ier siècle, sous le règne de l'empereur Tibère. Le pilier des Nautes, découvert au XVIIIe siècle dans le sous-sol de la cathédrale Notre-Dame de Paris, est exposé dans la salle du frigidarium des thermes de Cluny.

Découverte

Gravure des éléments trouvés lors de la fouille, Histoire de Paris, tome 1, Michel Félibien.

Il s'agit de l'empilement de quatre blocs ou autels mis au jour lors de la construction d'une crypte sous la cathédrale Notre-Dame de Paris le , lors des fouilles entreprises pour la réalisation du vœu de Louis XIII[1].

« Tout Paris a été les voir » a rapporté Baudelot, membre de l'Académie des médailles et auteur d'une Description des bas-reliefs anciens trouvez depuis peu dans l'église cathédrale de Paris[2],[3].

Les plus brillants esprits du temps s'interrogèrent sur les inscriptions révélées ; ainsi le philosophe Gottfried Wilhelm Leibniz échangea avec Sophie de Hanovre une correspondance sur la portée philologique de cette découverte[2].

Description

Il est constitué d'un piédestal et de quatre blocs de forme cubique, en pierre de l'Oise, ornés de bas-reliefs représentant diverses scènes, ainsi que des divinités gauloises et romaines. L'un de ces blocs comporte une dédicace. Il est représenté en pilier dans sa reconstitution la plus récente par Jean-Pierre Adam[4], et c'est à ce jour le plus ancien monument autochtone daté de Paris[5],[6],[7],[8].

Inscription

Le pilier porte une dédicace en latin à l'empereur Tibère, fils adoptif d'Auguste[2] :

L'inscription latine.

« TIB CAESARE
AVG IOVI OPTVMO
MAXSVMO
NAVTAE PARISIACI
PVBLICE POSIERVNT
 »

« À Tibère César Auguste, à Jupiter très bon, très grand, les Nautes du territoire des Parisii, aux frais de leur caisse commune ont érigé (ce monument). »

Les Nautes sont une confrérie d'armateurs mariniers naviguant sur les fleuves et rivières de la Gaule. Il devait s'agir d'armateurs ou de commerçants assez aisés, puisque c'est dans leurs rangs que les autres confréries navigantes (dendrophores, utriculaires) choisissaient habituellement leurs patrons.

L'inscription latine montre que les Nautes avaient une caisse commune et donc une personnalité morale, ce qui en fait la première société dont on ait trace à Paris.

Iconographie

Fragments d'autels gaulois trouvés dans le sol de Notre-Dame, par Adolphe Potémont, 1862-1863.
Maquette de reconstitution du pilier des Nautes au musée de Cluny.

Un indice de la puissance des Nautes est donné par une des sculptures du pilier : on les voit défiler en armes avec boucliers et lances, privilège octroyé par les Romains, ce qui est exceptionnel moins d'un demi-siècle après la conquête de la Gaule[9].

Le pilier, haut de cinq mètres, était constitué de quatre dés ou autels de pierre, disposés sur un socle et ornés de bas-reliefs sculptés sur les quatre faces. Ces bas-reliefs représentent des dieux des panthéons latin et gaulois.

Sont représentés pour le panthéon latin :

Sont représentés pour le panthéon gaulois :

Interprétation

Ésus et le taureau Tarvos trigaranus.

Selon l'historienne Anne Lombard-Jourdan, les Nautes cherchaient en édifiant le pilier à montrer aux peuples de la Gaule la voie de la coopération, qu'il était désormais raisonnable de suivre. En dédiant le pilier à Jupiter, ils montraient qu'ils agréaient la religion des Romains tout en affirmant leur fidélité aux cultes indigènes par la mention de dieux gaulois[10]. La construction du pilier est contemporaine de l'interdiction des assemblées de druides. En donnant une figure humaine aux dieux gaulois, les Nautes contribuaient à ruiner la position d'intermédiaires des druides entre les dieux et les hommes[11]. Pour Anne Lombard-Jourdan, le pilier aurait été situé au Lendit, à proximité du lieu où se seraient réunis selon elle les druides des Gaules[12],[13].

Un projet de reconstitution du pilier des Nautes sur l'île de la Cité a été lancé en 2017 par l'association Gladius Scutumque[14].

Notes et références

  1. Busson 1998.
  2. a b et c Alexis Charniguet et Anne Lombard-Jourdan, Cernunnos, dieu Cerf des Gaulois, Paris, Larousse, coll. « Dieux, mythes & héros », , 238 p. (ISBN 978-2-03-584620-4), p. 14.
  3. Charles César Baudelot de Dairval, Description des bas-reliefs anciens, trouvez depuis peu dans l'église cathédrale de Paris, Paris, Pierre Cot, , 39 p. (lire en ligne).
  4. Dr. Titus A.S.M. Panhuysen, La sculpture d'époque romaine dans le nord, dans l'est des Gaules et dans les régions avoisinantes : acquis et problématiques actuelles, Actes du colloque international de Besançon, 1998 (À propos du pilier tibérien de Nimègue), Presses universitaires franc-comtoises, collections annales littéraires, (ISBN 2-913322-80-8, lire en ligne), p. 17.
  5. Henriette Walter, Minus, lapsus et mordicus : Nous parlons tous latin sans le savoir, Paris, Éditions de Noyelles et Robert Laffont, , 315 p. (ISBN 978-2-286-08615-2 et 978-2-221-13342-2, lire en ligne).
  6. « Le pilier des Nautes », sur panoramadelart.com, (consulté le ).
  7. Florence Saragoza, « Savoir plus : Le pilier des Nautes », sur jfbradu.free.fr, (consulté le ).
  8. « Le pilier des Nautes de Lutèce, le plus ancien monument de Paris », sur pilierdesnautes.paris (consulté le ).
  9. Charniguet et Lombard-Jourdan 2009, p. 15.
  10. Anne Lombard-Jourdan, Montjoie et Saint-Denis ! Le centre de la Gaule aux origines de Paris et de Saint-Denis, Paris, Presses du CNRS, , 392 p. (ISBN 2-87682-029-3), p. 107.
  11. Lombard-Jourdan 1989, p. 108.
  12. Lombard-Jourdan 1989, p. 105.
  13. D'après les plans les plus anciens, dont celui de Charles Inselin (1708), il aurait existé un lieu-dit « le Pilier », à proximité d'une rue du Pilier, à Aubervilliers.
  14. Le Pilier des Nautes de Lutèce

Annexes

Bibliographie

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