Titre québécois | Va et regarde[1] |
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Titre original | Иди и смотри |
Réalisation | Elem Klimov |
Scénario |
Alès Adamovitch Elem Klimov |
Musique | Oleg Iantchenko |
Acteurs principaux |
Alexeï Kravtchenko |
Sociétés de production |
Mosfilm Belarusfilm |
Pays de production |
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Genre | Drame |
Durée | 140 minutes |
Sortie | 1985 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.
Requiem pour un massacre ou Va et regarde au Québec (Иди и смотри, Idi i smotri) est un film soviétique réalisé par Elem Klimov, sorti en 1985.
Il s'agit de l'adaptation de l'œuvre Récit de Khatyn (Хатынская повесть, 1971) et du mémoire Je suis d'un village en feu (Я з вогненнай вёскі, 1977) d'Alès Adamovitch[2],[3].
Le titre original se traduit littéralement « Viens, et vois », phrase tirée du verset 6:7 de l’Apocalypse, traduction Ostervald 1867[4]. Il est également connu sous le titre Va et regarde et considéré comme l'un des meilleurs films de tous les temps[5].
Biélorussie, 1943. Sous les invectives d'un villageois qui leur interdit de poursuivre leur activité, deux enfants creusent le sable pour récupérer divers objets enfouis avec des cadavres de soldats. Le plus âgé, Fiora, trouve un fusil. Revenu à son domicile, malgré l'opposition farouche de sa mère, il décide de rejoindre les partisans biélorusses. Ceux-ci viennent le chercher et en dépit des adieux déchirants de sa mère, il part en la laissant avec ses deux sœurs car son père est sans doute au front.
Arrivé au camp, affecté à diverses tâches, il découvre un nouveau cadre de vie. Mais les maquisards, à peine revenus à leur base, doivent repartir en mission. Comme Fiora est très jeune, il doit rester sur place. Ulcéré d'être ainsi déprécié, il s'enfuit et rencontre une jeune fille, Glacha, avec laquelle il choisit de revenir au camp des partisans. Lorsqu'ils y arrivent, le repaire est anéanti par un bombardement qui est suivi par l'apparition de soldats allemands traversant les bois aux alentours.
Tous les deux retournent donc au village complètement désert où le jeune garçon ne retrouve ni sa mère, ni ses sœurs. Horrifié, il se rend compte que les Allemands sont venus et qu'elles ont sans doute fui. Pensant les retrouver cachées au milieu des marais, il repart sans perdre de temps, sans se retourner ce qui lui évite, contrairement à Glacha, de découvrir, derrière une grange, ce que l'envahisseur a fait des habitants. Après une traversée exténuante du marécage, les enfants retrouvent dans une île des survivants, dont celui qui leur criait de ne pas creuser le sable, très grièvement brûlé, qui leur raconte comment les villageois ont été massacrés.
Fiora part avec trois hommes à la recherche de nourriture. L'ennemi est partout et deux de ses compagnons sautent sur une mine. Mais il faut trouver de quoi manger : les deux rescapés volent une vache dans un pré. Sur le chemin du retour, l'animal ainsi que celui qui la menait sont abattus par des tirs de mitrailleuses de l'ennemi. À l'aube, Fiora découvre dans un champ une télègue qui peut lui servir à transporter le cadavre de l'animal mais le propriétaire de la charrette et lui-même rentrent finalement dans le village le plus proche car un détachement de SS arrive. L'agglomération est encerclée ; tous les habitants sont rassemblés sur la place puis enfermés dans l'église. Fiora arrive à s'en extirper et assiste aux atrocités qui précèdent le massacre de la population et l'anéantissement par le feu de toutes les constructions. Effondré, il quitte ce lieu infernal pour retrouver sur la route les partisans qui ont attaqué le détachement nazi et capturé ses officiers qui vont être exécutés.
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La première version du scénario a pour titre Tuez Hitler (Убейте Гитлера). Ce titre, selon Elem Klimov, signifie « Tuez le Hitler qui est en vous » : il a été conçu dans un sens global, comme un appel à tuer le principe diabolique, tout d'abord, en soi[8]. La dernière scène du film fait écho à ce titre : le garçon tire sur un portrait d'Hitler ; le montage fait alors apparaître des images d'archives en remontant le temps, jusqu'à une image du dictateur encore enfant. Le garçon cesse alors de tirer. « Parce qu'un enfant est si précieux qu'il ne faut pas le tuer, même s'il s'agit d'Hitler », dit Elem Klimov[9].
Malgré le très actif soutien du premier ministre biélorusse, Piotr Macherov, le scénario subit de telles critiques de la part du Goskino que le projet est abandonné pendant plusieurs années. , Elem Klimov affirme[10][réf. incomplète] qu'il ne devait pas utiliser le mot « Hitler » dans le titre.
Au bout de sept ans, à l'approche du quarantième anniversaire de la Victoire, l'administration accepte que le film soit tourné à condition que ce soit par un autre réalisateur. Le metteur en scène affirme[11][réf. incomplète] que le scénariste, Alès Adamovitch, répondit que ce serait Elem Klimov et lui seul.
Le nouveau titre conservé « Иди и смотри », Viens et vois est proposé par son frère, Guerman Klimov, formule qui lui est inspirée par la lecture de l'Apocalypse. Il fait référence à l'ouverture des sept sceaux[12][réf. incomplète].
Le tournage dure neuf mois, dans la réserve de Berezinsky, en Biélorussie[13], et est très dur.
Il fut possible de retrouver des Biélorusses qui avaient échappé à des bûchers humains, et leurs indications permirent de donner davantage d'authenticité à certaines scènes. De vraies balles de mitrailleuses ont sifflé au-dessus de la tête d'Alekseï Kravtchenko et ont réellement tué la vache qui a failli l'écraser. Le décorateur qui, dans les suppléments du DVD est interviewé pendant presque 8 minutes, révèle que de vrais obus ont été utilisés et, pendant la scène du marécage, le jeune acteur qui avait 15 ans a failli se noyer[réf. nécessaire].
Ayant des craintes pour la santé mentale du jeune interprète, Alekseï Kravtchenko, le réalisateur embauche un psychologue pour aider l'acteur principal à surmonter les épreuves du tournage (18e minute de l'interview d'Elem Klimov dans les bonus du DVD)[réf. nécessaire].
Le réalisateur affirme qu'il n'a pas voulu tout montrer, mais qu'il se sentait obligé de témoigner, car lui-même avait des souvenirs précis de cette guerre après avoir vécu, en 1942, avec sa mère et son frère cadet l'évacuation de Stalingrad en feu.[réf. nécessaire].
L'ouvrage d'Alès Adamovitch relatant les massacres perpétrés par les Nazis en Biélorussie repose sur des témoignages directs. « C'est l'Apocalypse Now de la Seconde Guerre mondiale (…) et son côté terrifiant dans l'horreur lui vaudra la détestation de certains critiques français », écrit, à propos du film, Marcel Martin[14]. « Il n'y a pourtant aucune complaisance morbide dans cette fresque convulsive constamment transcendée par une vision épique d'une puissance exceptionnelle et distanciée par le fait que le protagoniste, un gamin d'une quinzaine d'années, regarde souvent la caméra : le spectateur est ainsi érigé en témoin et non pris au piège d'une dramatisation accrocheuse », ajoute-t-il[14].
Lors du massacre dans l'église, au milieu des cris et des pleurs, la bande sonore fait entendre un passage du Requiem de Mozart. Dans une interview, Elem Klimov, réalisateur du film, dit : « Parce qu'il y a deux Autrichiens dans ce film, Mozart et Hitler ! »[réf. nécessaire]
Avant le générique de fin, il est indiqué que 628 bourgades de Biélorussie furent détruites par le feu avec tous leurs habitants[15].
Le critique américain Roger Ebert attribue au film la note de 4/4[16]. Sur Rotten Tomatoes, le film obtient le score de 97 %[17]. Sur Allociné, les spectateurs attribuent au film la note moyenne de 4,3/5[18]. Les internautes du site SensCritique confèrent au film la note de 8,2/10[19]. Le site dvdclassik.com donne au film la note de 9/10[20].
Dans sa critique originale du film, publiée en , le journal Le Monde qualifie le réalisateur Elem Klimov de « grand cinéaste humaniste, lyrique, passionné »[21].
Les critiques de la version restaurée, publiées en , du Monde et de Télérama qualifient le film de « chef-d’œuvre »[22],[23].
Christian Collin, dans Guide des films édité par Robert Laffont, écrit : « Un film foisonnant, parfois outré et désordonné, mais atteignant dans ses meilleurs moments à une terrible intensité. L'ultime séquence où le héros, mitraillant une photo de Hitler, remonte le cours de l'histoire et en gomme le fascisme, atteint à un pathétique très représentatif du style de son auteur. »
Le film ressort en combo DVD/Blu-ray le chez Potemkine. L'édition comprend une restauration 2K du film, un making of, un entretien avec le réalisateur et l'équipe technique, des documentaires historiques, les analyses et points de vue de Bertrand Mandico, Nicolas Boukhrief, Gaspar Noé et Albert Dupontel[25].
Le visionnage du film dans son intégralité est possible sur internet en langue originale sous-titrée en anglais sur le site Kinoglaz[26], ainsi que sur la page Youtube de la Mosfilm — dans une version restaurée — depuis l'année 2022[27].
Russia Beyond, agence du gouvernement russe, propose sur une page web[28] des photographies du film et des informations complémentaires que l'on peut écouter dans les suppléments du DVD.