Le nom du genre vient du latin rumex, « lance, dard » qui est une allusion aux feuilles sagittées (en forme de fer de lance). Le nom vernaculaireoseille est une réfection, sous la graphie ozeille (1393), de l'ancien français oiseles (fin XIe siècle)[1], puis osile (v. 1250), issu du latin populaire acidula, féminin substantivé de l'adjectif acidulus, « aigrelet », avec un dérivé du grec ὀξύς (oxus, « pointu, acide » qui a donné le nom grec oxalis de l'oseille cultivée et l'acide oxalique), auquel il a emprunté son o initial[2]. Les Rumex portent de nombreux noms vernaculaires selon les régions : celui de patience est une altération du latin lapathium qui désigne cette plante[3], réinterprétée par l'étymologie populaire qui y voit l'obstination de « mauvaises herbes » et la lenteur de leurs effets médicinaux selon le principe de la théorie des signatures[4]. Celui de doche est un dérivé de l'anglais dock, nom des patiences en anglais (issu de dok, « courte queue »)[5].
Le genre se divise en deux sous-genres : les rumex vrais (Eurumex) ou patiences, souvent amers et astringents du fait de leur importante teneur en tanins, et les oseilles (Acetosa, « vinaigre », et Acetosella) aux feuilles auriculées (embrassant la tige par leurs oreillettes arrondies parallèles au pétiole), particulièrement riches en acides organiques[6].
Ce sont des herbacéesvivaces ou plus rarement annuelles, rarement des arbrisseaux, rarement dioïques. Leurs racines sont généralement robustes (pivotantes), ou parfois en rhizome. Les tiges sont érigées, rarement ascendantes ou prostrées, ramifiées. Les feuilles sont simples, souvent dimorphes, fugaces ou persistantes, basales et caulinaires, alternes, à marge entière ou ondulée[7].
L'inflorescence est généralement terminale, parfois terminale et axillaire, racémeuse ou paniculée. Le pédicelle est articulé, le pédicelle fonctionnel étant constitué du vrai pédicelle et, sous l'articulation, des parties basales unies et rétrécies des tépales externes (le pseudopédicelle). Les fleurs sont bisexuées ou unisexuées (unisexuées chez les plantes dioïques, et rarement chez les plantes polygames-monoïques). Le périanthe est persistant, avec six tépales, s'élargissant et souvent durcis dans le fruit ; le bord de la valve est entier, érodé, denticulé ou diversement denté, à nervure médiane souvent transformée en tubercules (callosités tuberculées). Il y a six étamines, trois styles, allongés ; les stigmates sont pénicillaires. Les fruits sont de akènes trigonaux, elliptiques à ovales[7].
Le genre Rumex compte 194 espèces réparties dans le monde entier selon Plants of the World online (POWO) (13 mai 2021)[8], dont 49 en Europe (18 en France, 15 en Suisse et 14 en Belgique)[9].
Les feuilles de certaines espèces sont comestibles. Elles passent pour être dépuratives, stomachiques et diurétiques lorsqu'elles sont crues[réf. nécessaire], et émollientes lorsqu'elles sont cuites[réf. nécessaire]. Si elles sont trop amères, on peut les cuire à deux eaux pour en éliminer les tanins.
Plusieurs espèces sont cultivées comme plante potagère, notamment Rumex acetosa (l'oseille commune ou grande oseille), et Rumex patientia (l'oseille-épinard ou patience des moines), plus rarement Rumex alpestris (es) (l'oseille vierge) et Rumex scutatus (l'oseille en écusson)[6]. On ignore quand l'oseille a été domestiquée[1] ; les graines de Rumex apparaissent fréquemment dans les assemblages de semences liées à des structures de stockage à l'âge du fer, ce qui évoque leur consommation, mais la présence sporadique de ces graines ne peut attester leur culture dans les jardins[14].
Les feuilles et pétioles sont utilisés en cuisine. Leur saveur douce et acidulée est telle qu'elles peuvent être mangées crues en salade, ou cuite (soupe, confiture, compote et tarte notamment avec les pétioles de l'Oseille des Alpes). La petite oseille (Rumex acetosella) est une plante à la saveur proche, à ne pas confondre avec Oxalis acetosella, du genre Oxalis, que certains nomment à tort petite oseille. Une fois cuisinée, l'oseille ne se conserve pas au réfrigérateur. Il convient de la consommer rapidement ou de la congeler[6]. Au Burkina Faso, l'oseille est utilisée pour la préparation de la "sauce oseille" un accompagnement du plat traditionnel de "tô".
Les graines des rumex sont consommables mais de faible valeur alimentaire. Il est préférable, mais difficile, de les débarrasser de leur enveloppe très astringente, après quoi on peut les moudre et les mélanger en petites quantités à la farine pour faire des bouillies, des galettes, voire du pain[15].
La médecine populaire d'Europe centrale et d'Europe de l'Est fait une grande place aux rumex depuis des siècles (traitement des tuméfactions de tissus, d'articulation ou d'organes ; activité supposée sur les tumeurs cancéreuses)[16], alors que ceux-ci sont presque absents de la phytothérapie moderne occidentale. Toutes les parties de la plante fraîche, séchée ou cuite (racine, feuille, semence et grain, inflorescences) sont utilisées en cataplasmes, onctions, tisanes, pastilles, suppositoires, poudres, vins médicinaux, préparations à base de vinaigre et d'eau de vie. Les indications les plus citées sont : « arrêt d’hémorragies, scorbut, stomatites infectieuses, diarrhées diverses, bilharziose, vers intestinaux, spasmes abdominaux, problèmes gastriques, hémorroïdes, ictère, affections respiratoires, affections rénales, gonorrhée, ulcère syphilitique, infections cutanées, plaies par coupures, abcès, escarres, rhumatismes et tuméfactions[17] ».
Frotter une feuille de Rumex sur une peau piquée par les orties ou les insectes est réputé pour supprimer les démangeaisons[6].
L'oseille contient de l'acide oxalique à une teneur élevée, préjudiciable à la calcification des os, et pouvant prédisposer à la formation de calculs rénaux et/ou au niveau de l'arbre urinaire en cas d'ingestion exagérée[1]. Elle contient également du fer en quantité importante.
↑ abc et dÉric Birlouez, Petite et grande histoire des légumes, Quæ, coll. « Carnets de sciences », , 175 p. (ISBN978-2-7592-3196-6, présentation en ligne), Une fabuleuse diversité, « Acide oseille », p. 54-55.
↑Les Provençaux rappellent cette étymologie, désignant cette plante sous le nom de lapas. D'après Simon-Jude Honnorat, Dictionnaire provençal-français, Repos, 1847, p. 504.
↑Pierre Lieutaghi, La plante compagne : pratique et imaginaire de la flore sauvage en Europe occidentale, Conservatoire et jardin botaniques de la ville de Genève, , p. 200.
↑(en) A dictionary of the derivations of the english language, W. Collins, , p. 116.
↑Maurice Reille, Dictionnaire visuel de Botanique. Éléments de botanique descriptive des végétaux vasculaires, Ulmer, , p. 8.
↑Brûlure due à la présence de cristaux d’oxalate de calcium et d'un alcaloïde toxique.
↑François Couplan et Florian Kaplar, Les plantes sauvages comestibles, Fleurus, , p. 47.
↑Véronique Matterne, Agriculture et alimentation végétale durant l'âge de fer et l'époque gallo-romaine en France septentrionale, Editions Monique Mergoil, , p. 86.
↑François Couplan, Le régal végétal : plantes sauvages comestibles, Editions Ellebore, , p. 152.
↑(en) JL. Hartwell, « Plants used against cancer. A survey », Lloydia, vol. 34, no 4, , p. 386-425.
↑P. Babulka, « Les rumex, de l’ethnobotanique à la phytothérapie moderne (Rumex spp.) », Phytothérapie, vol. 2, no 5, , p. 153-156 (DOI10.1007/s10298-004-0042-1).
↑Gérard Ducerf, L'encyclopédie des plantes bio-indicatrices alimentaires et médicinales. Guide de diagnostic des sols, Promonature, , p. 283-288.
↑Perte due à une carence en matière organique d'origine animale. L'apport de fertilisants pour compenser cette perte provoque le déstructuration du complexe argilo-humique.
↑(en) Zaller, Johann G (2006) Allelopathic effects of Rumex obtusifolius leaf extracts against native grassland species. Journal of Plant Diseases and Protection. Special Issue, XX, p. 463-470.
↑(en) Hamed M. El-Shora, Ahmed M. Abd El-Gawad, « Evaluation of Allelopathic Potential of Rumex dentatus Root Extract and Allelochemicals on Cicer arietinum », Journal of Stress Physiology & Biochemistry, 10(1), 2014, p. 167-180.
↑Guide des chenilles d'Europe Delachaux et Niestlé, D.J.Carter et B.Hargreaves, 2001, (ISBN2-603-00639-8)