Sou et sol sont les noms portés à la fois dans le langage courant et de façon officielle par différentes monnaies, de compte ou de règlement, de l'Antiquité à nos jours. Le nom trouve son origine dans la corruption du mot latin solidus.

Le mot sou est ancré dans de nombreuses expressions courantes de la langue française.

Antiquité romaine

Solidus de Constantin.
Article détaillé : Solidus (monnaie).

Le solidus est une monnaie de 4,5 g d'or créée par l'empereur Constantin (IVe siècle) en remplacement de l'aureus.

Haut Moyen Âge

Gros de Saint Louis valant 1 sou tournois.

Faisant honneur à son nom, la nouvelle monnaie allait gagner sa réputation d'inaltérabilité en traversant presque inchangée le déclin et la chute de l'Empire romain d'Occident, les grandes invasions et la création de royaumes germaniques dans toute l'Europe : non seulement frappé à Byzance jusqu'au XIe siècle sous le nom de nomisma, le solidus sera imité par les rois barbares, en particulier les Mérovingiens[1], quoique le plus souvent sous forme de « tiers de sou » (trémissis)[2].

Face à la pénurie d'or, une nouvelle « stabilisation » (c'est ainsi que l'on appelle souvent les dévaluations) va venir de Charlemagne : le solidus ne désignera désormais plus un 172e de livre romaine d'or, mais 120e de livre carolingienne d'argent. Il est lui-même divisé en 12 deniers, qui, sauf rares exceptions (le gros de Saint Louis), seront dans la pratique les seuls à circuler.

Le principe général de douze deniers valant un sou et de vingt sous valant une livre va se retrouver avec de nombreuses variantes en fonction de l'alliage utilisé et du bimétallisme or/argent parfois utilisé pour certaines frappes. De fait, ce sont principalement les membres de la corporation des changeurs qui étaient capables de s'y retrouver dans les équivalences et les nombreuses monnaies en cours en Europe à chaque époque et qui étaient donc incontournables pour de nombreuses opérations commerciales [3].

Du Moyen Âge aux Temps modernes

Sol de Louis XV datant de 1767.
Assignat de 50 sols, émis en France en 1793.

Le nom évolue comme le restant de la langue, du latin au français. Solidus va devenir soldus, puis solt dès le XIe siècle, puis sol à partir du XIIe siècle.

La république de Venise émet le soldino à partir de 1328.

La République corse émet le soldo entre 1755 et 1769.

En France, la prononciation sou est définitivement actée au XVIIIe siècle[4]. Avant la décimalisation en France (1795), de profondes réformes monétaires ont eu lieu : deniers et liards pouvaient s'exprimer en sous, dans le langage courant. Pour autant, le mot « sol » reste en vigueur, il marque officiellement les monnaies de bronze révolutionnaires et les billets.

Un sou en francs français : un mot qui dure

Le dernier "sou" : pièce de 5 centimes français de 1939 (Ø réel : 19 mm).

Mille ans après la réforme monétaire carolingienne, quand la livre tournois cède la place au franc en 1795, sols/sous et deniers disparaissent des bourses. Toutefois, les Français continuent d'appeler sou le vingtième du franc. Ainsi, la pièce en bronze de 5 centimes pesant 5 grammes était-elle qualifiée de sou (sous la plume d'un Honoré de Balzac ou d'un Victor Hugo, par exemple), la « pièce de cent sous » faisant référence à la pièce en argent de cinq francs pesant 25 grammes[5] et que l'on appelait aussi « écu » (dans Germinal de Zola), par analogie avec l’ancien écu de 6 livres pesant environ 29 grammes. La dernière pièce de 5 centimes, lointain souvenir hérité du franc germinal, est démonétisée dans les années 1940, mais le mot sou continue d'être employé (sauf pour la pièce de 5 centimes de nouveau franc de 1960 qui équivalait en fait à 5 anciens francs).

De rognage en dévaluation[6], l'antique sou d'or, puis d'argent, sera devenu une pièce de billon, de cuivre, de bronze avant de finir, frappé entre les dates de 1914 et 1939, sous forme d'une pièce percée de 5 centimes en cupronickel puis en maillechort ; elle est remplacée par des pièces de 10 centimes Type Lindauer en zinc à partir de 1941 (la dernière pièce de 5 sous est la 5 centimes en zinc type Jespers de Belgique qui est démonétisée en 1957).

Les sous hors de France

Canada

Jeton banque de la Province du Canada de 1852. Sur l'avers, la dénomination est "UN SOU", sur revers "HALF PENNY".

Au Canada, le mot « sou » est utilisé dans le langage courant pour dénommer la division du dollar canadien, dont le terme officiel est le cent.

Luxembourg et États belgiques unis

Pièce luxembourgeoise de 1/8e de sol, cuivre, revers, 1775.

Le duché du Luxembourg émet des monnaies appelées sous ou « patards », en argent, à partir de 1615, d'une valeur de 1/20e de florin, puis, entre 1775 et 1790, le duché émet des monnaies libellées en sols, en cuivre (1/8e et 1 sol), en billon (3 sols) et en argent (6 et 12 sols).

L'États belgiques unis émet, en 1790, des monnaies en argent d'une valeur de 10 sols (½ florin).

Suisse

Cinq centimes suisses actuel.

En Suisse, une pièce de cent-sous désigne une pièce de cinq francs suisses et une pièce de quatre-sous désigne une pièce de vingt centimes suisses. Le mot sou reste également dans le langage familier dans les termes « dix, vingt, ... sous ».

Maurice

À l'île Maurice, en français et en créole, la roupie est divisée en 100 cents appelés sous.

Maghreb

Au Maghreb, le terme solidus est resté pour designer le terme monnaie, bourse ou somme d'argent sous la forme sordi (en arabe صردي), mais elle n'est pas utilisée pour les comptes de monnaies courantes (Dinar, Dirham,...), puisque c'est le doro (دورو), le franc (فرنک) et le réal (ريال) qui sont utilisés au quotidien.

Le sou dans les expressions en langue française

Utilisé pendant plus de 1000 ans, le terme sou s'est ancré dans le langage et les expressions françaises[8]. Les sous, au pluriel, sont devenus synonyme d'argent.

Articles connexes

Notes et références

  1. Un sou d'or mérovingien, à la tête de Magnence, datant du VIIe siècle sur Gallica.
  2. Les monnaies des rois Mérovingiens
  3. "De L'or Et Des Épices - Naissance De L'homme D'affaires Au Moyen Âge" Jean Favier Hachette - 01/11/1995
  4. « SOU : Définition de SOU », sur www.cnrtl.fr (consulté le )
  5. Patrice Baubeau, « Monnaie des pauvres, monnaie des riches au XIXe siècle », Revue d'économie financière,
  6. La permanence du sou permet de mesurer l'érosion monétaire sur une longue période : la richissime famille gallo-romaine qui se serait transmis 1 million d'aureus de la conquête de la Gaule à nos jours sans jamais les placer mais en modernisant l'apparence à chacune de ces quelque 65 générations se serait retrouvée avec 50 000 anciens francs français, puis 500 nouveaux francs français, puis 76,22 euros. Elle ne possèderait plus 8 tonnes d'or comme au temps de César mais pourrait à peine en acheter 8 grammes, bref son million de sous serait devenu un sou. Toutefois, l'érosion constatée n'est que de 0,68 % l'an en moyenne, il aurait suffi de placer la somme à ce taux pour ne rien perdre.[pertinence contestée]
  7. « fredak.com : le dico. Pourquoi trente sous = 25 cents ? », sur www.fredak.com (consulté le )
  8. « SOUS : Définition de SOUS », sur www.cnrtl.fr (consulté le )
  9. Q Q P E F par Yves Leroy : le sou du Franc, page 21 [1]