Abbaye Saint-Ouen de Rouen | |
Massif occidental de l’église abbatiale Saint-Ouen depuis la place du Général-de-Gaulle. | |
Présentation | |
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Nom local | Abbaye Saint-Ouen |
Culte | Catholique romain |
Dédicataire | Saint Ouen |
Type | Eglise Abbatiale |
Rattachement | Archidioecesis Rothomagensis |
Début de la construction | 1318 |
Fin des travaux | 1537 |
Architecte | Nicolas de Normandie 1062 Jean Mardargent dit Roussel 1318 |
Autres campagnes de travaux | Reconstruction en 1062 (Ravages Vikings)
Reconstruction en 1137 (incendie) Reconstruction vers 1800 |
Style dominant | Roman vers 1062
Gothique, Flamboyant vers 1318 |
Protection | Classé MH (1840) |
Site web | https://rouen.fr/abbatiale-saint-ouen |
Géographie | |
Pays | France |
Région | Normandie |
Département | Seine-Maritime (76) |
Ville | Rouen (76000) |
Quartier | Saint-Nicaise |
Coordonnées | 49° 26′ 33″ nord, 1° 05′ 59″ est |
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L'abbaye Saint-Ouen de Rouen est un ancien monastère bénédictin dont il ne subsiste que l'église abbatiale qui se dresse sur le territoire de la commune française de Rouen, dans le département de la Seine-Maritime, en région Normandie. L'abbaye a cessé son existence en tant que telle depuis la Révolution française. L'église, l'un des principaux monuments de la ville de Rouen, est un exemple achevé de l'architecture gothique en Normandie.
L'église est classée aux monuments historiques.
L'église abbatiale Saint-Ouen est située à Rouen, dans le département français de la Seine-Maritime.
L'abbaye de Saint-Ouen fut l'un des monastères bénédictins les plus puissants de Normandie, fondé en 750 sous le vocable de saint Pierre. La première église à cet emplacement était une basilique mérovingienne ; Dadon (saint Ouen) y fut enseveli en 684 et donne alors son nom à l'abbaye. Aussi, le monastère bénédictin qui lui succéda à l'époque carolingienne prit tout naturellement le nom de ce prestigieux défunt. Jusqu'alors, le monastère avait porté le nom des saints apôtres[1]. Cette première abbaye, un monastère épiscopal[2], fut ensuite ravagée par les Vikings le .
Dès 918, Rollon autorise le rétablissement de l'abbaye[3]. C'est sur l'initiative du duc Richard Ier de Normandie que fut relevée l'abbaye[4]. Hildebert (v. 960-1006), premier abbé véritable, est considéré comme le restaurateur de l'abbaye[5]. Sous ses ordres, l'abbaye suit la règle bénédictine. Il se fait restituer par Raoul, comte d'Ivry, des domaines dans le comté d'Eu[5]. En 1067, Guillaume le Conquérant atteste une confirmation en faveur de l'abbaye[5].
L'abbé Nicolas de Normandie reconstruit à partir de 1062, l'église carolingienne en style roman[6]. Dédiée à saint Pierre, elle accueille sa sépulture en 1095[7]. En 1090, il avait acquis de l'abbé Odon de Saint-Médard de Soissons de la tête de saint Romain, du bras de saint Godard, des reliques de saint Rémi, saint Médard, des saints Innocents et de saint Sérène[5]. Il a également entrepris la restauration des bâtiments monastiques. En 1108-1112, Henri Ier notifie la donation du manoir de Fringrinhoe (Essex). Saint-Ouen dispose du prieuré anglais de Mersea, également situé en Essex. Helgot poursuit la construction de l'abbatiale, qui est achevée par Guillaume Ballot[5].
L'église est dédicacée le [5]. Le corps de saint Ouen et les autres reliques y sont transférées le . Rainfroy achève le cloître et les bâtiments du monastère[5]. En , l'abbaye est la proie des flammes[5]. Rainfroy la restaure et l'enrichit. Une bulle du pape Alexandre III du confirme à l'abbaye la possession de Saint-Victor-en-Caux et de la Croix-Saint-Leufroy[5].
L'église est incendiée en 1248[7]. D'après des fouilles réalisées en 1885, les dimensions de l'abbatiale romane sont comparables à l'édifice gothique visible de nos jours[7]. Le chœur suivait le plan bénédictin. La nef possédait des bas-côtés et le transept faisait 54 m de large[7]. Il reste de l'abbatiale romane une absidiole à deux étages appelée la tour aux Clercs.
Les travaux de l'église abbatiale gothique actuelle commencèrent en 1318, sous la direction de l'abbé de Saint-Ouen, Jean Mardargent dit Roussel, peu de temps après l'effondrement du chœur roman, mais ils furent ralentis par la guerre de Cent Ans[8].
La pierre tombale située dans la chapelle Sainte-Agnès de l'abbatiale indique dans son épitaphe que maître Alexandre de Berneval, maître d'œuvre en maçonnerie, est l'auteur de cette église et qu'il est mort le . Selon toute vraisemblance, il est représenté sur la pierre tombale et sans doute est-ce celui des deux personnages, le plus âgé, qui tient en ses mains un compas et un support sur lequel est gravé un quart de rosace[9].
La nef ne fut terminée qu'en 1537 et la façade occidentale ne fut achevée qu'au XIXe siècle.
Au XVIIIe siècle, les bénédictins de la congrégation de Saint-Maur introduisirent leur réforme. Une campagne de reconstruction des bâtiments conventuels fut entreprise. Les moines sont dispersés à la Révolution française.
En 1800, l'hôtel de ville de Rouen s'installa dans l'ancien dortoir des moines ou « dormitorium » du XVIIIe siècle. Le logis abbatial est démoli en 1816. L'église elle-même, après avoir abrité une fabrique au moment de la Révolution française, puis être rendue au culte catholique, est restée église paroissiale jusqu'en 1963. Rattachée maintenant à la paroisse Saint-Marc de Rouen Est, elle accueille toujours, plusieurs fois par an, des cérémonies religieuses ainsi que de nombreux concerts et expositions.
Après les bombardements de Rouen d', l'abbatiale devient pro-cathédrale[10] du diocèse de Rouen ; c'est dans celle-ci que se passeront les grandes cérémonies religieuses jusqu'à la réouverture de la cathédrale Notre-Dame, le . Le maréchal Philippe Pétain assistera à une messe lors de sa visite en Normandie le [11].
La façade occidentale de l'église a été construite en style néogothique entre 1845 et 1852, sur les plans de l'architecte Henri Grégoire, qui a pris celle de la cathédrale de Cologne comme référence. Les bases des tours du XVIe siècle ont été détruites. On peut voir leur base au sol. Seule la rosace est d'origine. Elle est construite en pierre calcaire des carrières de Saint-Leu et de Saint-Maximin.
Le portail est constitué de trois porches, dont les pieds-droits accueillent des statues, réalisations de Victor Vilain. Le portail central, composé du Christ sur le pilier central de la grande porte, est entouré des apôtres. Toutefois, Matthias est remplacé par saint Paul. Les deux portails qui l'encadrent, ainsi que leur retour nord et sud, présentent une série de quatre statues, réalisées par Alphonse Jean et Bonet. Du nord au sud, nous avons : Mathilde l'Emperesse, le roi Clotaire Ier, sainte Clotilde, le comte Charles de Valois, saint Éloi, le roi Dagobert, saint Philibert, sainte Austreberthe puis saint Romain, saint Nicaise, saint Benoît, saint Ouen, Jean Roussel, Nicolas de Normandie, Hildebert et Antoine Bohier.
Entre la rose et le pignon, se dresse une série de statues, inscrites dans des arcatures : saint Wandrille, Richard Ier de Normandie, saint Filleul, Richard II de Normandie, saint Ansbert, Guillaume le Conquérant, saint Maurille, Henri II d'Angleterre, Geoffroi le Breton, Richard Cœur de Lion et saint Germer.
En 2021, Jean-Baptiste Monnot en est l'administrateur.
On entre dans l'édifice par le portail des Marmousets qui ferme le bras sud du transept. Les nervures de la voûte retombent sur deux grandes clefs pendantes. Les parties inférieure des pieds-droits et du trumeau central sont sculptées de quarante médaillons quadrilobés retraçant la vie de saint Ouen[12], dont on retrouve la statue juchée sur le trumeau. Le tympan est dédié à la Vierge Marie.
L'église abbatiale mesure 134 mètres de long, avec une hauteur de 33 mètres sous voûtes, et possède une superbe tour centrale couronnée qui ne fait pas lanterne, contrairement à celle de la cathédrale Notre-Dame de Rouen, et caractéristique du style gothique flamboyant. Elle mesure 82 mètres et un beffroi en charpente supporte les cloches, dont l'une (4 tonnes), a été fondue en 1701.
La nef, très lumineuse grâce à ses verrières sur trois niveaux d'élévation (fenêtres basses, triforium ajouré et fenêtres hautes) et la grandeur de ses baies, est typique du style flamboyants. Sur le Livre des fontaines de Jacques Le Lieur qui représente toute la ville de Rouen en 1525, elle apparaît inachevée, sans ses voûtes. Accolée au nord de la nef, se dresse l'unique galerie du cloître encore existante ; elle possède un beau réseau flamboyant.
Le chœur et le chevet pentagonal avec ses onze chapelles[13], visibles du jardin de l'hôtel de ville, est une merveille d'harmonie et d'équilibre, tout en style gothique rayonnant, à l'exception de la partie nord du chœur contre laquelle subsiste une absidiole romane, dite « tour aux Clercs », vestige de la grande abbatiale antérieure. Le chœur est fermé par des grilles forgées en 1740/1749 par Nicolas Flambart. Au-dessus des grandes arcades, sous le triforium, subsistent des peintures murales du XIVe siècle. Le maître-autel en laiton doré est une réalisation de l'architecte Sauvageot, exécutée par l'atelier Poussielgue-Rusand en 1885.
La salle des Marmousets, superposée au portail, a pu jadis servir de chartrier ou salle des archives de l'abbaye, mais cette fonction n'est pas garantie. Au XIXe siècle, cette salle sert de bibliothèque, comme en témoignent les quelques traces de polychromies et les clous. La salle possède une voûte irrégulière qui vient s'appuyer sur des culots sculptés de scènes sacrées et profanes[14].
Ils forment un ensemble cohérent, d'une grande homogénéité, réalisé entre les XIVe et XVe siècles. Toutes les fenêtres sont garnies de vitraux.
Sur les vitraux sont représentées uniquement des figures en pied, étant donné la hauteur de l'édifice qui rendrait impossible la lecture de scènes religieuses plus petites. Par conséquent, chacun d'eux représente un patriarche, un prophète ou une sibylle (au nord) et un saint, un prélat ou un apôtre (au sud).
Il n'y a pas de chapelles latérales car on se trouve dans une église abbatiale et les fenêtres ouvrent donc directement sur les bas-côtés. Contrairement à ceux des baies de la nef, les vitraux figurent ici des scènes religieuses sous des décors architecturés d'une très grande finesse d'exécution.
Celle du bras sud figurant un arbre de Jessé, thème récurrent dans cet art, est unique[15]. Celle du bras nord nous montre la « Hiérarchie », réalisée par Colin de Berneval, le fils du précédent. Quant à la façade, sa rose est ornée d'un vitrail moderne et abstrait, dans de belles teintes bleues, qui tranche avec le reste du programme.
Le programme des verrières reprend celui des fenêtres hautes de la nef avec des figures en pied. Il existe cependant une exception : un vitrail moderne de Max Ingrand représentant la Crucifixion qui orne la fenêtre d'axe.
Il s'y trouve la plus large collection de vitraux du XIVe siècle en France. Ils illustrent par exemple la vie des saints honorés dans l'abbaye.
Elle possède un orgue Cavaillé-Coll de 1890 (reconstruction de l'orgue Crespin Carlier de 1630 dans le buffet d'origine)[16]. Les quatre claviers et 64 jeux de cet orgue inspirent même à Charles-Marie Widor sa Symphonie gothique no 9 op. 70 qu'il dédie à cet instrument, un des plus beaux de France avec celui de l'église Saint-Sulpice à Paris et le plus grand Cavaillé-Coll de province après celui de la collégiale Saint-Pierre de Douai et le grand orgue de la cathédrale de Nancy (1861). Albert Dupré, père de Marcel Dupré est titulaire de l'orgue en 1911[17].
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Nom | Masse | Diamètre à la base | Note | Parrains et Marraines | Dédicace | Tour | Année | Fondeur | Illustration |
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Saint-Ouen (Cloche parlante) |
4 000 kg | la | Charles-François de Montholon[18] Élisabeth-Marie de Brétel[19] |
1701 jay esté bénite par Dom Jean Le Tellier, grand prieur / de l'abbaye, et nommée Saint-Ouen par haut et puissant Sgr / Msre Charles François Montholon, Cher premier président du / Parlement de Normandie, et par haute et puissante Dame / Elisabeth Marie de Bretel, marquise de Grémonville, veuve de / haut et puissant Sgr Msre Adrien de Canouville, Cher Sgr de / Gromesnil Gray Criquetot et autres lieux. Jean Aubert de Lisieux m'a faicte. |
tour de croisée | 1701 | Jean Aubert | ||
Marie[note 1] | 3 000 kg | ut si |
Quid me nobilius Christi quœ nomine matris / Gaudeo, quœque alios ad pia vota voco, / Et quam Gemetici benedixit prœsul et abbas / Harlœus quo nil clarius orbis habet. / Hinc procul o Superi tonitru fulmenque procellœ / Matris dum sancæ nomine tincta sono. / Die. nov. 1666. / F. Chauvel et son filz mont faict. |
tour de croisée | 1651[20] 1887 |
François Chauvel et fils Bollée |
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Julie-Marcelle | 2 135 kg | 155 cm | do# | chanoine Laurent Emma Lafond[21] |
AN DNI MDCCCLXXXVII LEONE XIII SVMMO PONT. / LEONE BENEDICTO CAROLO THOMAS ARCHIEPISC. ROTOMAGENSI / NORMANNIÆE PRIMATE / THEODORO PANEL HVJVS PRÆCLARISSIMÆSTI AVDOENI OLIM / ABBATIALIS NVNC PAROCHIALIS ECCLESIÆ RECTORE / D. D. ARCHIER BOISTARD DE GLANVILLE LANGLOIS COMIT. D'ESTAINTOT / FLEVRY H. FRÈRE THVRRIER DANZAS HAMEL GENEVOIX FABRICE / PRÆPOSITIS / DONIS DNI LAVRENT CANONICI NEC NON DNÆ MARCEL BAZILLE / CONFECTA VOCOR JVLIA MARCELLA A DNO JVLIO LAVRENT ECCL. / PRIMAT RETOMAGEN. CANONICO ET A DNA EMMA LAFOND VIRI / PRÆSTANTISSIMI MARCELLI BAZILLE FILIA / SIC NOMINATA ET AB ILLVST. AC REVERENDIS. IN XPO PATRE / LEONE ARCHIEPISCOPO ROTOMAGENSI BENEDICTA / VOX EXVLTATIONIS ET SALVTIS / VERVM LAVDO DEVM PLEBEM VOCO CONGREGO CLERVM / VOTA TRAHO PLORO DEFVNCTOS FESTA DECORO / XPS VINCIT XPS REGNAT XPS IMPERAT XPS AB OMNI MALO NOS / DEFENDAT / A BOLLEE CENOMANEN ME FECIT |
tour de croisée | 1887 | Bollée | |
Total | Masse : 9,135 t |
L'ancien jardin de l'abbaye est dénommé aujourd'hui « jardin de l'Hôtel-de-Ville ».
On peut y voir, placé à côté de l'entrée ouest, près du portail des Marmousets, une copie de la grosse pierre de Jelling offerte par le Danemark à la Ville de Rouen, à l'occasion du millénaire normand en 1911.
Non loin de là sont visibles une statue en pierre de Rollon due à Arsène Letellier et un buste en bronze du poète belge Émile Verhaeren, décédé accidentellement dans la gare de Rouen en 1916, dû à Henri Lagriffoul (1948).
Au nord de l'église abbatiale, un bassin est décoré d'une sculpture d'Alexandre Schoenewerk (Thiébaut fondeur) évoquant l'enlèvement de Déjanire par le centaure Nessus.
Contre le mur nord, la méridienne est due à Paul-Ambroise Slodtz (1753)[23].
Au titre des monuments historiques[24],[25] :