Charte constitutionnelle de 1814
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Présentation
Pays Royaume de France Royaume de France
Type Constitution
Branche Droit constitutionnel
Adoption et entrée en vigueur
Adoption
Modifications 7 août 1830
Abrogation en 1815, puis rétablie jusqu'en 1830

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La Charte constitutionnelle du est la constitution du royaume de France en vigueur sous la Première puis la Seconde Restauration.

Le Gouvernement provisoire et le Sénat rédigent un projet de constitution d'inspiration monarchique le . Louis XVIII refuse la Constitution sénatoriale, et octroie une charte, celle du . En effet, Louis Stanislas Xavier, comte de Provence, est devenu Louis XVIII depuis la mort officielle de Louis XVII et ne peut pas concevoir de revenir sur le trône de France par l'appel du peuple. Il considère qu'il est roi de France de droit divin depuis 1795 et date les événements de son règne à partir de cette date. La Constitution que lui propose le Sénat lui est tout simplement inacceptable. Cette Charte n'est mise en application qu'en , après l'intermède des Cent-Jours de Napoléon Ier.

La Charte se veut un texte de compromis, voire de pardon[1], conservant de nombreux acquis de la Révolution et de l'Empire, tout en rétablissant la dynastie des Bourbons. Son titre met en évidence le compromis, en effet le terme de « Charte » fait référence à l'Ancien Régime et « constitutionnelle » fait référence à une volonté révolutionnaire.

La Charte instaure une monarchie limitée[2],[3],[4]. Elle met en place un régime dominé par la personne du roi, qui a un rôle fondamental dans les institutions : « l'autorité tout entière résid[e] en France dans la personne du roi »[5] qui est selon cette charte « inviolable et sacrée »[6]. Elle est en ce sens plus proche d'une « monarchie limitée » que d'une monarchie parlementaire.

Son nom inspira celui de la Charte constitutionnelle portugaise de 1826[7].

Texte de la charte

Commission de rédaction

Charte constitutionnelle de 1814 (estampe de 1814).

Le , par un arrêté non publié, Louis XVIII crée une « commission de rédaction » dont il nomme les vingt-deux membres[8]. Il en écarte Talleyrand, dont il se méfie, qui avait eu un rôle déterminant dans le projet de constitution du 6 avril[9].

Présidée par le chancelier Dambray, elle comprend :

Le , la commission tient sa première séance chez Dambray[8]. Elle se réunit six jours de suite[8]. Le , elle remet son projet au Conseil privé qui l'approuve[8].

Nature de la Charte

C'est un écrit regroupant un ensemble d'articles qui définissent les responsabilités des acteurs de l'État français (le roi et les deux Chambres).

Dans ses Souvenirs de 1814, Louis-Philippe affirme que Louis XVIII ne concevait pas la Charte comme une nouvelle loi fondamentale du royaume afin qu'elle ne soit considérée comme une dérogation aux anciennes lois fondamentales toujours en vigueur : c'est la raison pour laquelle la Charte ne contenait rien de relatif à la succession à la Couronne ou à la régence[10]. Louis XVIII ne concevait pas la Charte comme un contrat synallagmatique entre le roi et la nation mais comme un acte émané de lui-même, substituant simplement deux Chambres aux anciens états généraux et aux Parlements, définissant les attributions diverses que le roi leur conférait, réglant leur composition et leurs rapports avec l'autorité royale[11].

Contenu de la Charte

Médaille à l'effigie de Louis XVIII, gravée par Andrieu, pour commémorer la promulgation de la Charte.
Revers de la médaille, représentation signée Andrieu de la séance solennelle de la promulgation de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814.

Volonté monarchique

Charte octroyée

Toute loi, toute action à venir, se doit de respecter les termes de cette Charte. Le roi, comme tous ses sujets, doit s'y plier dans les faits. Certains royalistes interprètent cependant la Charte comme inférieure à la personne du roi, puisque c'est lui qui l'a octroyée. La charte est octroyée par le roi politiquement. On rejette le vocabulaire de la révolution française. Le roi Louis XVIII veut rassurer les Français.

Préambule de la charte

Le roi revient d'une « longue absence » et se veut un père, un pacificateur pour le peuple. Il répond au « vœu du peuple » selon un acte « digne du roi ».

Il faut « renouer la chaîne des temps » : la Révolution française et la période napoléonienne ne sont qu'un cauchemar qu'il faudrait oublier. Il y a un désir de continuité avec l'Ancien Régime sans pour autant revenir à une monarchie absolue.

Recherche de compromis

Cette constitution s'appuie très nettement sur le fonctionnement de la monarchie constitutionnelle britannique de lors :

Ainsi on constate qu'il y a une recherche de compromis tant au niveau institutionnel, le pouvoir de chaque organe étant contrebalancé par un autre, qu'au niveau politique, la monarchie étant rétablie mais pas l'autoritarisme fustigé par les révolutionnaires.

En pratique, la Charte sera combattue par les ultras, méprisant ce texte et souhaitant un retour à la monarchie absolue. En revanche, elle deviendra le point de ralliement des monarchistes libéraux, connus sous le nom de doctrinaires, qui souhaitent concilier les principes de la monarchie avec les acquis de la Révolution dans le strict respect de la Charte, selon la célèbre formule du général Foy : « La Charte, toute la Charte, rien que la Charte[14]. »

Fin d'application

Les Ordonnances de Saint-Cloud promulguées le par Charles X donnent lieu à des interprétations divergentes de la Charte de 1814. Le roi Charles X, chef suprême de l'Etat, estime qu'il applique le principe de « sûreté de l'État » (article 14), tandis que les opposants au régime invoquent la liberté d'expression : « Les Français ont le droit de publier et de faire imprimer leurs opinions, en se conformant aux lois qui doivent réprimer les abus de cette liberté. » (article 8)[15]. La protestation de 44 journalistes le 26 juillet 1830 est suivie par des insurrections dans Paris les 27, 28, et 29 juillet 1830, journées connues sous le nom de « Trois Glorieuses ». À la suite de cette révolution, Louis-Philippe est appelé au pouvoir et prête serment sur une nouvelle charte, la Charte constitutionnelle du 14 août 1830, adoptée par la Chambre des députés et la Chambre des pairs. Cette nouvelle charte fonde la monarchie de Juillet.

Chronologie des constitutions françaises

Notes et références

  1. Article 10 : « Toutes recherches des opinions et des votes émis jusqu'à la restauration sont interdites : le même oubli est commandé aux tribunaux et aux citoyens ».
  2. Ardant et Mathieu 2017, no 99.
  3. Chagnollaud de Sabouret 2015, no 40.
  4. Yvert 1994, p. 11.
  5. Préambule, deuxième paragraphe.
  6. Article 12 de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814.
  7. Oscar Ferreira, Le constitutionnalisme octroyé, Eska, , p. 33.
  8. a b c et d Laquièze 2002, chap. I, sect. 1, § 2.
  9. Emmanuel de Waresquiel, Talleyrand : Le Prince immobile, Fayard, 2003, p. 460.
  10. Robert 2007, p. 65.
  11. Robert 2007, p. 66-67.
  12. Troper et Hamon 2008.
  13. Caron 2002, p. 9.
  14. Collectif, Dictionnaire politique ; encyclopédie du langage et de la science politiques, Paris, Pagnerre, , 944 p. (lire en ligne), p. 216.
  15. Fabienne Manière, « 27-29 juillet 1830 Les ordonnances de Juillet et la révolution des « Trois Glorieuses » », lire en ligne sur herodote.net

Voir aussi

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Articles connexes

Bibliographie

Liens externes