La Veni Sancte Spiritus, appelée parfois la séquence dorée[js 1], est, à l'origine, une séquence en plain-chant de la liturgie catholique. Depuis sa création, celle-ci est réservée à la fête de Pentecôte. Par les chercheurs, l'œuvre est affectée à l'archevêque de Cantorbéry Étienne Langton.
latin | français |
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(I) Veni, Sancte Spiritus, (II) Veni, pater pauperum, (III) Consolator optime, (IV) In labore requies, (V) O lux beatissima, (VI) Sine tuo numine, (VII) Lava quod est sordidum, (VIII) Flecte quod est rigidum, (IX) Da tuis fidelibus, (X) Da virtutis meritum, |
(1) Viens, Esprit-Saint, (2) Viens, Père des pauvres, (3) Consolateur souverain, (4) Dans le labeur, le repos, (5) O lumière bienheureuse, (6) Sans ta puissance divine, (7) Lave ce qui est souillé, (8) Assouplis ce qui est raide, (9) A tous ceux qui ont la foi (10) Donne mérite et vertu, |
Il existait, auparavant, l'hésitation pour l'origine de composition et d'auteur, faute de manuscrits suffisants.
Toutefois la connaissance fut améliorée. Assez nombreux manuscrits témoignent qu'à partir du XIe siècle, la séquence « Sancti spiritus assit nobis gratia[aw 1] » était en usage tant pour Pâques que pour Pentecôte[2],[3]. Cette séquence était, à l'origine, la composition de Notker le Bègue († 912) [52][3]. Il s'agit de l'une des séquences les plus anciennes et les plus connues de cet auteur[js 2]. Dans l'ancien rite parisien, celle-ci était encore réservée à la messe du lundi de Pentecôte[4].
D'ailleurs, le verset de l'Alléluia « Veni Sancte Spiritus, reple tuorum corda fidelium, et tui amoris in eis ignem accende » se trouve également dans des manuscrits anciens. Même, dans le Nouveau paroissien romain publié en 1863 à Tours, ce texte était utilisé entre l'Alléluia et la séquence Veni Sanctus Spiritus [53]. Encore était-il employé dans la messe votive du Saint-Esprit, en tant que verset de l'Alléluia, ou durant le temps pascal, après l'Alléluia, à geneux [54]. Celui-ci aussi, comme la Sancti spiritus assit, se trouve dans plusieurs manuscrits anciens, à partir du XIe siècle[5], par exemple, celui de la bibliothèque d'État de Bamberg manuscrit lit. 7 (vers 1020)[6], celui de l'abbaye de Saint-Gall manuscrit 376 (vers 1060)[7].
Aussi est-il certain que l'on intégra ces textes dans l'optique de remplacer le chant solennel de Pentecôte Sancti spiritus assit, chanté avant la lecture de la Bible. Déjà dès le milieu du Xe siècle, les séquences des types de Notker étaient, de plus en plus, remplacées par d'autres[js 3].
Sans document définitif, l'auteur était affecté au roi de France Robert II le Pieux († 1031), au moine Hermann Contract († 1054)[8], au pape Innocent III († 1216) ou à l'archevêque de Cantorbéry Étienne Langton († 1228). À la suite des études scientifiques, ce dernier fut identifié comme auteur.
Dans la deuxième moitié du XIIIe siècle, cette séquence était, selon le manuscrit de Cambridge, chantée en Angleterre et en monodie (plain-chant ou néo-grégorien)[13]. La notation est celle de neumes en grégorien mais en cinq lignes, au lieu de quatre lignes. Les exemples indiquent que l'élan descendant du texte refrigerium mais que le passage de radium est différent de l'élan actuel[13].
En ce qui concerne la composition musicale, il existe une œuvre intéressante mais aussi la plus ancienne. Il s'agit d'un motet isorythmique de John Dunstable († 1453), à quatre voix. Deux voix plus hautes chantent, dans cette composition, les textes de Veni Sancte Spiritus alors que les voix de ténor et celle de contre-ténor exécutent le Veni Creator Spiritus. Et c'est le ténor qui est chargé de chanter la répétition isorythmique[16]. Il s'agit d'un témoin de l'évolution de musique occidentale en polyphonie.
Le genre de séquence fut condamné, à la suite de plusieurs conciles, notamment de celui de Trente, faute de qualité (texte non biblique) et d'autorisation officielle. En conséquence, dans le cadre de la Contre-Réforme, la séquence fut entièrement supprimée. C'est la raison pour laquelle, 4 500 séquences avaient été effacés, lorsque le premier missel romain fut sorti en 1570, par l'autorité. Toutefois, seules quatre séquences restaient dans ce missel, autorisé sous le pontificat de Pie V. Il s'agissait de cette Veni Sancte Spiritus avec la Victimæ paschali laudes, la Lauda Sion de Thomas d'Aquin ainsi que la Dies iræ. Et selon la tradition, mais maintenant formellement, la Veni Sancte fut attribuée à la fête de Pentecôte.
Quant aux protestants, ce chant, traduit en allemand par Martin Luther, Komm, Heiliger Geist, Herre Gott, était préféré dans son répertoire, en replaçant le Veni Creator Spiritus, qui était vraisemblablement jugé trop pontifical[17]. Ce chant était si populaire que parfois le texte latin demeurait, après l'introït en allemand, encore en usage[18]. Car Luther n'interdit pas le latin aux universités et aux écoles, à la différence de ses paroisses. Plusieurs compositeurs écrivirent avec ce texte allemand, tels Dietrich Buxtehude[19], Johann Sebastian Bach[20]. Heinrich Schütz en composa deux, en latin (SW475)[21] et en allemand (SWV417)[22].
Un texte long et réservé à Pentecôte, la composition musicale de la séquence Veni Sancte Spiritus n'est pas nombreuse. Et très souvent, cet usage était précisé par les compositeurs dans leur partition. Marc-Antoine Charpentier, quant à lui, consacrait ses deux motets au Saint-Esprit, littérairement. Une œuvre particulière se trouve dans la composition de Johann Georg Ahle, qui en écrivit en faveur de l'inauguration de nouveau conseil de sa ville natale Mühlhausen. Dédiée à ses membres, elle fut exécutée le à l'église Notre-Dame de cette ville[23]. Parmi les compositeurs, Wolfgang Amadeus Mozart composa son œuvre en 1768, à l'âge de 12 ans, ce qui était l'une de ses premières compositions[24].
La reforme selon le concile Vatican II modifia, pour la première fois après la Contre-Réforme, l'usage de la séquence. D'une part, elle est dorénavant chantée avant l'Alléluia, et non plus après ce dernier[25],[vabr 1]. D'autre part, à l'exception de la Victimæ paschali laudes (Pâques) et de cette Veni Sancte Spiritus (Pentecôte), l'utilisation devint facultative[25]. Aussi, la pratique de cette séquence se garde-t-elle dans la célébration en latin, mais toujours une fois par an.