Lynn Margulis
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Lynn Margulis le .

Naissance
Chicago, Illinois, États-Unis
Décès (à 73 ans)
Amherst, Massachusetts, États-Unis
Nationalité Drapeau des États-Unis Américaine
Domaines biologie évolutive
Institutions université du Massachusetts à Amherst
Diplôme université de Californie à Berkeley
Renommée pour théorie endosymbiotique
hypothèse Gaïa
Distinctions National Medal of Science (1999)
médaille Darwin-Wallace (2008)
Site www.geo.umass.edu/faculty/margulis

Lynn Margulis, ou sous son premier nom d'épouse Lynn Sagan, (née Lynn Petra Alexander le à Chicago et morte le à Amherst) est une microbiologiste américaine, professeure à l'université du Massachusetts à Amherst.

Elle est connue pour avoir présenté, dans les années 1960, sa théorie endosymbiotique qui propose que les cellules eucaryotes seraient le résultat d’une suite d’associations symbiotiques avec différents procaryotes. À l'époque, on considérait que les cellules eucaryotes étaient les descendantes des procaryotes qui se seraient peu à peu complexifiés après de nombreuses mutations génétiques. Après l'avoir initialement considérée avec méfiance, la communauté scientifique a maintenant validé cette théorie.

Elle est également, avec le scientifique britannique James Lovelock, coauteure de l'hypothèse Gaïa qu'elle a ensuite approfondie pour créer les théories Gaïa dans laquelle elle soutient que la Terre n'est pas homéostatique mais homéorhétique : en d'autres termes, que les composants atmosphérique, hydrosphérique et lithosphérique sont régulés autour de points homéostatiques, mais que ces points changent au cours du temps… Gaïa serait une symbiose vue de l'espace.

Biographie

Famille et formation

Née dans une famille juive de Chicago, Lynn Petra Alexander est une élève précoce et entre à l'université de Chicago à l'âge de 14 ans « parce qu'elle souhaitait y aller et qu'on l'a laissée entrer[1]. »

Elle poursuit ses études à l'université du Wisconsin (1957-1960) et à l'université de Californie à Berkeley (1960-1963).

À 19 ans, elle se marie avec l'astronome Carl Sagan. La biologiste publie ses travaux universitaires sous le nom de Lynn Sagan, à l'époque où elle est son épouse. Ils ont deux enfants : Dorion Sagan (en), journaliste scientifique et collaborateur de sa mère, et Jeremy Sagan, développeur de logiciels et fondateur de Sagan Technology.

Après son divorce en 1964, elle se remarie en 1967 avec Thomas N. Margulis cristallographe avec qui elle aura aussi deux enfants : Zachary Margulis-Ohnuma, avocat de la défense pénale à New York et Jennifer Margulis, professeure et autrice.

Sa sœur, Joan Alexander, est mariée au lauréat du prix Nobel Sheldon Glashow ; son autre sœur, Sharon, est mariée au mathématicien Daniel Kleitman.

Décès

Lynn Margulis meurt le 22 novembre 2011 à son domicile à Amherst (Massachusetts) cinq jours après avoir été victime d'un accident vasculaire cérébral[2],[3].

Recherches

Théorie endosymbiotique

Article détaillé : Théorie endosymbiotique.

Lynn Margulis est inscrite à l'Université de Chicago, obtient son master à l'Université du Wisconsin-Madison en 1960 et son doctorat en 1963 à l'Université de Berkeley. En 1966, alors qu'elle est un jeune membre de faculté à l'Université de Boston, elle écrit un article théorique intitulé The Origin of Mitosing Eukaryotic Cells[4] (« L'origine des cellules eucaryotes »). Cependant, l'article est « rejeté par une cinquantaine de journaux scientifiques », comme le rappellera Lynn Margulis[5].

Finalement accepté par Journal of Theoretical Biology (en), il est aujourd'hui considéré comme un repère dans la théorie endosymbiotique moderne. Bien que cette théorie s'inspire fortement des idées émises auparavant par des scientifiques du milieu du XIXe siècle ainsi que par Constantin Merejkovski (1905) et Ivan Wallin (en) (1920) au début du XXe siècle, la formulation de la théorie de Margulis est la première à reposer sur des observations microbiologiques directes (contrairement aux observations paléontologiques ou zoologiques sur lesquelles reposaient auparavant les nouveaux travaux en biologie évolutive). Bien que constamment critiquée pour cette idée pendant des années, Margulis, reconnue pour sa ténacité, persista dans cette voie malgré l'opposition à laquelle elle dut faire face à cette époque.

Le thème sous-jacent de cette théorie endosymbiotique, comme formulée en 1966, était l'interdépendance et la coopération de multiples organismes procaryotes : un organisme en phagocytant un autre, les deux survivant et évoluant durant des millions d'années au sein de cellules eucaryotes. Son livre, Origin of Eukaryotic Cells, discute en détail de ces travaux préparatifs concernant sa théorie de l'apparition des organites. Actuellement, la théorie endosymbiotique est reconnue comme l'explication de l'apparition de certains organites et elle est largement acceptée par les principaux courants scientifiques. Cette théorie fut confortée par des résultats obtenus dans les années 1980, lorsqu'il fut révélé que le matériel génétique des mitochondries et des chloroplastes était très différent de l'ADN nucléaire des cellules hôtes[6].

En 1995, l'éminent biologiste de l'évolution Richard Dawkins affirma à propos de Lynn Margulis et de son travail :

« J'admire beaucoup le courage et la persévérance dont a fait preuve Lynn Margulis pour soutenir sa théorie de l'endosymbiose, la portant pour en faire d'une théorie non orthodoxe, une théorie orthodoxe. Je fais souvent allusion à la théorie selon laquelle la cellule eucaryote est une union symbiotique de cellules procaryotes primitives. C'est l'une des grandes réalisations de la biologie évolutive du XXe siècle et je l'admire énormément pour cela[5]. »

Théorie des interactions symbiotiques moteur de l'évolution

Elle formule par la suite une théorie expliquant comment les interactions symbiotiques entre organismes provenant souvent de différents phyla ou règne sont le moteur de l'évolution. Les modifications génétiques proviendraient principalement du transfert horizontal de matériels génétiques entre bactéries ou virus et cellules eucaryotes. Tandis que ses idées sur l'origine des organites sont largement acceptées, celles sur les interactions symbiotiques comme origine d'introduction des modifications génétiques sont considérées comme des idées marginales.

Sa théorie, fondée quasi exclusivement sur la coopération entre organismes, combattait la vision négative de l'histoire de la vie portée par le néo-darwinisme (« la vie est une guerre universelle »), mouvement dont elle pensait que l'histoire le jugerait finalement comme « une secte religieuse mineure du XXe siècle au sein de la persuasion religieuse tentaculaire de la biologie anglo-saxonne »[7]. Elle pensait également que les partisans de la théorie standard « vautrés dans leur interprétation de Darwin du point de vue de la zoologie, du capitalisme, de la compétition, des coûts-bénéfices - ont complètement faussé sa pensée. Le néo-darwinisme, qui insiste sur l'accumulation lente de mutations par la sélection naturelle au niveau du gène, est une théorie de trouillards[7]. » Elle s'opposa ainsi aux visions évolutionnistes de la compétition orientée, soulignant l'importance des interactions symbiotiques ou coopératives entre espèces.

Classification taxonomique du vivant

En 1968, elle propose un système à quatre règnes fondé sur le modèle d'Herbert Copeland. À la différence de Copeland, le règne Protoctista de Margulis incluait les algues vertes, qu’elle ne considérait pas comme des plantes[8].

En 1971, elle adopte le système à cinq règnes proposé par Robert Harding Whittaker. Toutefois, le règne Protista de Margulis différait de celui de Whittaker en ce qu’il contenait toutes les algues eucaryotes (incluant les algues vertes, brunes et rouges), limitant les plantes aux seules embryophytes[9].

En 1974, elle propose le rang taxinomique de super-règne Prokaryota pour les procaryotes et Eukaryota pour les eucaryotes[10].

En 1978, elle recherche un compromis avec Whittaker dans la classification entre les protistes et les protoctistes en retenant un règne Protista étendu (incluant les algues vertes, les oomycètes et les myxomycètes mais excluant les algues rouges et brunes)[11]. Whittaker et Margulis s'accordent sur une classification des organismes suivant deux super-règnes et cinq règnes : le super-règne Prokaryota avec un seul règne I. Monera et le super-règne Eukaryota contenant les quatre autres règnes II. Protista ou Protoctista, III. Animalia, IV. Fungi et V. Plantae.

Dans les trois éditions de Five Kingdoms (1982, 1988, 1998), écrites avec la biologiste américaine Karlene V. Schwartz, elle élabore une classification du vivant en cinq règnes : animaux, végétaux (plantes), bactéries (procaryotes), champignons et protoctistes. Elle émet des réserves concernant le règne des protistes établi selon Whittaker et réunit les micro-organismes eucaryotes unicellulaires avec leurs descendants multicellulaires en tant que protoctistes, modifiant le schéma à cinq règnes de Whittaker. Le règne Protoctista a d'ailleurs été fortement préconisé par Margulis auprès de la communauté des protistologistes dans un manuel (1990) et un glossaire (1993) comme l'un des « cinq règnes » qu'elle a popularisé.

Elle vulgarise une version intitulée Diversity of Life sous forme de guide illustré à destination du jeune public en 1992 et des étudiants et des professeurs en 1999.

La microbiologiste discute le bien-fondé de l'approche à trois domaines de Carl Woese pour la classification du vivant[12]. Elle s'oppose à l'abandon du terme « procaryote » qu'elle considère toujours valide au regard des avancées de la biologie[13].

Dans l'ouvrage qui devait être la quatrième édition de Five Kingdoms, les biologistes Margulis et Chapman (2009)[14] proposent une classification taxonomique du vivant où le domaine est une division du règne et dont l'articulation entre taxons se résume ainsi :

Controverses

En 2009, Lynn Margulis est l'un des sept auteurs de l'article indiquant qu'« une recherche détaillée qui corrèle l'histoire des spirochètes symbiotiques aux changements du système immunitaire des vertébrés est grandement nécessaire » et exhortant une « nouvelle recherche de l'histoire naturelle des mammifères et des tiques ainsi que de la transmission vénérienne des spirochètes en relation avec la détérioration du système immunitaire humain[15]. » Elle fera valoir plus tard qu'« il n'y a pas de preuve que le VIH est un virus infectieux » et que les symptômes du SIDA « se superpose[nt] […] complètement » à ceux de la syphilis[16]. Seth Kalichman (en) cita son article de 2009 comme un exemple de la contestation du sida « florissante »[17] et soutiendra que « son appui du négationnisme VIH/SIDA défie l'entendement. » Il fera aussi remarquer sa prise de position en tant que « demandeuse de la vérité sur les attentats du 11 septembre »[18].

Toujours en 2009, via le processus des communicated submissions, elle permet, en tant que membre de l'Académie des sciences, la publication au sein des Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) d'un article de Donald I. Williamson (en) rejetant « l'hypothèse darwinienne selon laquelle les formes larvaires et les formes adultes correspondantes ont évolué à partir d'un ancêtre commun »[19],[20]. L'article de Williamson provoque une réponse immédiate de la communauté scientifique, comprenant un contre article dans PNAS[21]. Conrad Labandeira du National Museum of Natural History écrit :

« Si j'avais été rapporteur de l'article de Williamson, je l'aurais probablement rejeté mais je ne dis pas que c'est une mauvaise chose qu'il ait été publié. Il permet d'élargir la discussion sur le fonctionnement de la métamorphose et […] [sur] l'origine de ces cycles de vie véritablement radicaux. »

Mais le biologiste en développement de l'insecte de l'université Duke, Fred Nijhout, affirme que l'article était plus adapté pour le « National Enquirer que le National Academy »[22]. En septembre, il est annoncé que PNAS abandonnera les communicated submissions en , PNAS indiquant que cette décision n'a rien à voir avec la controverse Williamson[20].

Reconnaissance professionnelle

Œuvre

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Lynn Margulis » (voir la liste des auteurs).

Références

  1. BBC Radio 4 "A Life With…(Series 5) - A life with Microbes, Broadcast 16 July 2009".
  2. (en) Kieran Mulvaney, « Evolutionary Biology Pioneer Lynn Margulis Dies », sur news.discovery.com, .
  3. (en) Lynn Margulis, Evolution Theorist, Dies at 73, voir sur nytimes.com.
  4. (en) Lynn Sagan, « On the origin of mitosing cells », J Theor Bio., vol. 14, no 3,‎ , p. 255–274 (PMID 11541392, DOI 10.1016/0022-5193(67)90079-3).
  5. a et b (en) John Brockman, « The Third Culture », .
  6. (en) « Acceptance Doesn't Come Easy », .
  7. a et b Mann, C. (1991) Lynn Margulis: Science's Unruly Earth Mother, Science, 252, 378-381.
  8. (en) Lynn Margulis, "Evolutionary criteria in Thallophytes : A radical alternative", Science, Vol.161, No.3845, September 6, 1968, p. 1020–1022. DOI 10.1126/science.161.3845.1020.
  9. (en) Lynn Margulis, "Whittaker's Five Kingdoms of Organisms : Minor Revisions Suggested by Considerations of the Origin of Mitosis", Evolution, Vol.25, No.1, March 1971, p. 242-245. JSTOR:2406516.
  10. (en) Lynn Margulis, « The classification and evolution of procaryotes and eucaryotes », in Robert C. King (ed.), Handbook of genetics, Vol.1 : Bacteria, bacteriophages and viruses, Plenum Press, New York, 1974, p. 1-41.
  11. (en) Robert Harding Whittaker & Lynn Margulis, « Protist classification and the kingdoms of organisms », Biosystems, Vol.10, No.1-2, April 1978, p. 3-18. DOI 10.1016/0303-2647(78)90023-0.
  12. (en) Lynn Margulis & Ricardo Guerrero, "Kingdoms in turmoil", New Scientist, Vol.129, No.1761, March 23, 1991, p. 46-50. PMID 11538109.
  13. (en) Michael F. Dolan & Lynn Margulis, "Advances in biology reveal truth about Prokaryotes", Nature, Vol.445, January 4, 2007, p. 21. DOI 10.1038/445021b.
  14. (en) Lynn Margulis & Michael J. Chapman, Kingdoms & Domains : An Illustrated Guide to the Phyla of Life on Earth, Academic Press, Boston, 2009, 731 p. (ISBN 978-0-12-373621-5).
  15. (en) Syphilis, Lyme disease & AIDS: Resurgence of “the great imitator”?, SYMBIOSIS Vol. 47, No. 1 (2009), p. 51-58.
  16. (en) Teresi D, « Lynn Margulis: Q & A », Discover Magazine,‎ , p. 66–70 (lire en ligne, consulté le ).
  17. (en) Seth C. Kalichman, « “There is no Proof that HIV Causes AIDS”: AIDS Denialism Beliefs among People Living with HIV/AIDS », J. Behav. Med., vol. 33, no 6,‎ , p. 432–440 (DOI 10.1007/s10865-010-9275-7, lire en ligne).
  18. (en) Seth C. Kalichman, Denying AIDS : conspiracy theories, pseudoscience, and human tragedy By Seth C. Kalichman, Springer, (ISBN 978-0-387-79475-4, lire en ligne), p. 182.
  19. (en) Voir sur pnas.org "Caterpillars evolved from onychophorans by hybridogenesis", PNAS (2009).
  20. a et b (en) Controversial caterpillar-evolution study formally rebutted, Scientific American Online.
  21. (en) "Caterpillars did not evolve from onychophorans by hybridogenesis", PNAS (2009).
  22. (en) Brendan Borrell, « National Academy as National Enquirer ? PNAS Publishes Theory That Caterpillars Originated from Interspecies Sex », Scientific American (consulté le ).
  23. (en) Guest Lecturers
  24. (en) « Lynn Margulis | World Academy of Art & Science », Worldacademy.org, (consulté le ).
  25. (en) « Lynn Margulis Scatters the Evolution Industry », Darwinthenandnow.com, (consulté le ).
  26. (en) « Launches Sciencewriters Imprint », Chelsea Green, (consulté le ).
  27. Leonardo da Vinci Society: Inductees/Members.

Voir aussi

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Liens externes

Margulis est l’abréviation botanique standard de Lynn Margulis.

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