Magnus Hirschfeld
Magnus Hirschfeld en 1929.
Fonctions
Fondateur du WHK
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 67 ans)
NiceVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Cimetière de Caucade, carrés militaires (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Fratrie
Recha Tobias (d)
Franziska Mann (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Parti politique
Maître
Œuvres principales
Jahrbuch für sexuelle Zwischenstufen (d), Différent des autresVoir et modifier les données sur Wikidata
Plaque commémorative
Magnus Hirschfeld, Schwules Museum, Berlin.
Sépulture de Magnus Hirschfeld au cimetière Caudade à Nice.

Magnus Hirschfeld, né le à Kolberg et mort le à Nice, est un médecin allemand. Premier à étudier la sexualité humaine sur des bases scientifiques et dans sa globalité (il a fondé l'Institut de sexologie à Berlin), il est l'un des pères fondateurs des mouvements de libération homosexuelle. Hirschfeld a lutté contre la persécution des homosexuels allemands soumis au paragraphe 175.

Débuts

Magnus Hirschfeld est né dans une famille de confession juive et était le fils du médecin Hermann Hirschfeld. De 1888 à 1892, il étudie à Breslau puis à Strasbourg, Munich, Heidelberg et Berlin, où il obtient son doctorat en médecine[1]. Puis, il ouvre à Magdebourg un cabinet en naturopathie et médecine générale. Deux ans plus tard, il s'installe dans le quartier de Charlottenburg à Berlin.

Comité scientifique-humanitaire

En 1896, Hirschfeld publie sous pseudonyme la brochure intitulée Sappho et Socrate, sur l'amour entre personnes de même sexe.

Le , il fonde dans son appartement de Charlottenburg avec l'éditeur Max Spohr, l'avocat Eduard Oberg, l'écrivain Franz Joseph von Bülow (de) et Adolf Brand, venu avec d'autres personnes de la revue Der Eigene, le Comité scientifique-humanitaire (WHK, en allemand : Wissenschaftlich-humanitäres Komitee) dont il prend la direction. Le comité sera la première organisation au monde ayant comme but la dépénalisation des relations de nature homosexuelle. Ses membres espéraient obtenir l'abolition du paragraphe 175 inscrit dans le code pénal allemand depuis 1871 et qui prévoyait des peines de prison et la suspension des droits civils pour ceux convaincus de s'être livrés à des « actes sexuels contre nature […], que ce soit entre personnes de sexe masculin ou entre hommes et animaux ». Selon le comité, cette loi était inacceptable du fait qu'elle encourageait des formes de chantage. Il recueille au fil des années de nombreuses signatures dans le cadre de campagnes de pétition. La devise du comité, « per scientiam ad justitiam » (la justice grâce à la connaissance), reflète la conviction de Hirschfeld qu'une meilleure compréhension de l'homosexualité mènera à la disparition de l'hostilité à son égard. Hirschfeld, qui luttera sans relâche pour cet objectif, devient un personnage public en Allemagne[2].

Afin de lutter pour cette dépénalisation, Hirschfeld reprend à son compte la théorie du « troisième sexe » développée par Karl Heinrich Ulrichs. Il avance l'idée de stades « intermédiaires sexuels » (en allemand, sexuelle Zwischenstufen) : une échelle allant, indépendamment du sexe biologique, de la masculinité à la féminité. L'homosexualité, considérée comme innée et comme une question, alors, d'ordre médical, ne pouvait être pénalement répréhensible.

Les positions de Hirschfeld ne font pas l'unanimité au sein du comité et des conflits apparaissent rapidement. Certains, comme Benedict Friedlaender (en), désapprouvent la comparaison que Hirschfeld fait entre homosexuels et handicapés. Ils estiment également que les « uraniens » ne sont pas nécessairement féminins. En 1903, une scission a lieu et certains, avec Adolf Brand, créent la Gemeinschaft der Eigenen (GdE) ou « communauté de l'unique » (à comprendre comme « communauté des gens singuliers »).

Il fonde aussi en 1918 l'Institut de recherche sexuelle à Berlin, qui fut la cible des nazis, où ils firent les premiers autodafés avec l'importante bibliothèque qui s'y trouvait. Ses écrits, conférences et ouvrages ont été d'une importance capitale pour la « révolution sexuelle » qui s'annonça au XXe siècle et ont eu une influence déterminante sur les travaux des scientifiques et chercheurs pionniers de la sexualité Wilhelm Reich et Alfred Kinsey.

Le médecin supervise aussi, en 1930, la toute première tentative au monde d'opération de changement de sexe, sur la Danoise Lili Elbe.

Combat contre le paragraphe 175

La pétition lancée par le comité pour l'abrogation du paragraphe 175 recueille plus de 5 000 signatures dont celles d'Albert Einstein, Sigmund Freud, Hermann Hesse, Richard von Krafft-Ebing, Thomas Mann, Stefan Zweig, Rainer Maria Rilke, Léon Tolstoï, Émile Zola, etc. Le projet de loi est déposé au Reichstag en 1898, mais il ne sera pas adopté car seule une minorité du parti social-démocrate le soutiendra. Hirschfeld, désappointé, remet le combat à plus tard en espérant pouvoir bénéficier de l'appui de parlementaires qu'il savait être homosexuels, notamment dans le SPD dont il était aussi membre.

L'idée portée par ce projet de loi continuera sa progression et, à la fin des années 1920, il sera sur le point d'être adopté ; mais la brutale montée du nazisme rendra cependant ce vote impossible.

Travestissement

En 1910, paraît la première monographie s'appuyant sur l'étude de 100 cas de travestissement. Hirschfeld y évoque ces femmes soldats aux comportements héroïques. En 1930, dans un ouvrage sur l’histoire de la sexualité dans la guerre, il mentionne dans une vignette une jeune femme de vingt ans qui revêt l’uniforme et se dit prête à répondre à l’appel de l’armée et à s'engager. Les faits se déroulent entre 1914-1918 dans l'armée allemande. En 1947, dans un ouvrage publié à titre posthume, ce cas est développé plus en détail (Tréhel, 2013). Helene Deutsch, Hirschfeld, Freud, des médecins ayant partagé les mêmes théories écrivent, à la même période, sur des femmes combattantes revêtant l’apparat masculin, ce qui laisse supposer un lien entre les auteurs sur ce thème (Tréhel, 2015).

Travaux et engagements

Montée du nazisme et exil

Parade d'étudiants du parti nazi devant l'Institut de sexologie de Magnus Hirschfeld.

Dans les années 1920, ses conférences sont de plus en plus chahutées. À Munich en 1920 il est grièvement blessé au crâne et certains journaux annoncent même sa mort. Juif et homosexuel, il devient une cible de choix pour les nazis[4] et, en 1930, il ne peut plus se sentir en sécurité dans son propre pays. Il accepte alors une série de conférences aux États-Unis en 1931 et, suivant les mises en garde de ses amis, choisit de ne pas rentrer en Allemagne. Il reste en exil, d'abord à Zurich et à Ascona en Suisse, puis à Paris et enfin à Nice.

Consécutivement à la prise du pouvoir par Adolf Hitler, les nazis attaquent et pillent l'Institut de sexologie le  ; ses bibliothèques alimentèrent les premiers autodafés nazis.

À Paris, il tente de refonder sans succès un nouvel institut de sexologie. En 1934, il déménage à Nice (au 63, Promenade des Anglais). Il y décède des suites d'une crise cardiaque le jour de son 67e anniversaire, en 1935. Sa tombe se trouve au cimetière Caucade de Nice.

Le , à l'occasion du 75e anniversaire de sa mort, l'association Mémorial de la déportation homosexuelle (MDH) et le Centre LGBT Côte d'Azur ont organisé une journée d'hommage et ont déposé sur sa tombe une gerbe portant la mention « Au pionnier de nos causes »[5].

Écrits

Représentations dans les arts

Littérature

L'écrivain Christopher Isherwood raconte sa visite de l'Institut de sexologie dans son roman Christopher et son monde. L'écrivaine Brigitte Giraud prend Magnus Hirschfeld et le premier autodafé de ses écrits par les nazis comme sujet de son roman Jour de courage. Dans ce roman, un lycéen lyonnais de notre époque raconte ces évènements à ses camarades dans un exposé en cours d'histoire[7].

Cinéma

Le cinéaste Rosa von Praunheim a réalisé en 1999, un film librement inspiré de la vie de Magnus Hirschfeld intitulé L'Einstein du sexe. Le surnom d'« Einstein du sexe » lui avait été donné ironiquement par la presse allemande de son vivant.

Télévision

Dans la saison 2 de la série Transparent, des flashbacks dans le Berlin du début des années 1930 ont lieu dans l'Institut für Sexualwissenschaft de Magnus Hirschfeld, interprété par l'acteur Bradley Whitford[8].

Notes et références

  1. « Qui était Magnus Hirschfeld, le « pionnier de nos causes » LGBT+ ? », sur KOMITID, (consulté le )
  2. F. Tamagne, Histoire de l’homosexualité en Europe. Berlin, Londres, Paris (1919-1939), Paris, Seuil, 2000.
  3. (en) Isaac Würmann, « Lost during Nazi rule in Germany, one of the world’s first pro-gay films has finally been restored for modern viewers », sur xtramagazine.com, (consulté le )
  4. Stéphane Corbin, « Hommage à Magnus Hirschfeld, l'homme du « troisième sexe » »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur tetu.com, (consulté le )
  5. « Magnus Hirschfeld, vedette posthume du festival «Espoirs de mai» à Nice »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur tetu.com.
  6. Charlotte Wolff, Magnus Hirschfeld: A Portrait of a Pioneer in Sexology, Quartet Books, 1986, page 107.
  7. Trouver sa place, article de Norbert Czarny dans En attendant Nadeau, 5 novembre 2019. Page consultée le 21 novembre 2019.
  8. (en) Evan Davis, « "The Einstein Of Sex": The Story Of Magnus Hirschfeld, The Real-Life Figure In The 'Transparent' Season 2 Flashbacks », (consulté le ).

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes