Spécialité | Génétique médicale et neurologie |
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CISP-2 | A90 |
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CIM-10 | Q90 |
CIM-9 | 758.0 |
OMIM | 190685 |
DiseasesDB | 3898 |
MedlinePlus | 000997 |
eMedicine | 943216 |
MeSH | D004314 |
Patient UK | Downs-syndrome-trisomy-21 |
La trisomie 21 (ou syndrome de Down), est une anomalie chromosomique congénitale provoquée par la présence d'un chromosome surnuméraire pour la 21e paire. Ses signes cliniques sont très nets, un retard cognitif est observé, associé à des modifications morphologiques particulières. C'est l'une des anomalies génétiques les plus communes aux États-Unis, avec une prévalence de 9,2 pour 10 000 naissances vivantes[1]. L’incidence est d'environ 1 pour 770 naissances[2], toutes grossesses confondues, et varie en fonction de l'âge de la mère : environ 1/1 500 à 20 ans, 1/900 à 30 ans et 1/100 à 40 ans[3]. Cette anomalie ne doit pas être confondue avec le syndrome XYY, ni avec l'anomalie XXY.
L'un des traits les plus notables est le déficit du développement cognitif, mais on constate aussi dans ce cas des malformations congénitales comme des cardiopathies[4]. Le QI des enfants atteints de trisomie 21 est extrêmement variable. Un certain nombre de patients souffrent de complications dites « orthopédiques » imposant l'hospitalisation[5]. Les anomalies musculo-squelettiques sont souvent source de complications. Avec les progrès de la médecine et le suivi paramédical (telle que l’orthophonie), la qualité de vie des personnes trisomiques 21 s’est considérablement améliorée, ainsi que leur espérance de vie .
La trisomie 21 est l'explication la plus fréquente de retard mental, à l'origine de 25 % des handicaps mentaux chez les enfants d’âge scolaire[6].
Il s’agit, parmi les anomalies chromosomiques observées en cours de grossesse, de celle dont l’incidence est la plus élevée : aux alentours de 1/770 naissances, soit 1,3/1 000 naissances. Cette incidence s’accroît avec l'âge de la mère. Actuellement[Quand ?], avec l'utilisation des techniques modernes de dépistage, la proportion a été portée à 1/2 000 naissances. En France, 65 000 à 70 000 personnes atteintes de la trisomie 21 sont recensées[7]. Néanmoins, la prévalence tend à s’accroître, en raison de l'allongement de vie des trisomiques[8].
Il s'agit d'une cause fréquente d'interruption médicale de grossesse : aux États-Unis, elle concerne entre 50 et 85 % des cas de trisomie diagnostiquée avant la naissance[9].
La trisomie 21 libre complète et homogène, la forme la plus fréquente, s'accompagne habituellement d'une déficience intellectuelle variable, souvent légère[10], le quotient intellectuel moyen chez les jeunes adultes est de 50, équivalent à celui d'un enfant de 8–9 ans[11], et il faut insister sur les points suivants :
Pour les trisomies en mosaïque, la situation est plus complexe car la proportion de cellules trisomiques 21 dans le cerveau n'est pas connue. Dans quelques rares cas de trisomie 21 dérivée d'une translocation, les capacités intellectuelles peuvent être normales.
Chaque enfant est unique et le handicap se traduit pour chacun d'une manière personnelle[12]. Les signes de la trisomie 21 changent avec l'âge. Le signe le plus fréquent est l'hypotonie musculaire globale (tous les muscles sont mous) associée à une hyperlaxité des ligaments articulaires (les articulations sont anormalement souples).
Certains signes physiques permettent souvent le diagnostic de la trisomie 21 :
À la naissance, le médecin recherche systématiquement certains types de malformations :
Aucune personne trisomique 21 ne présente l'ensemble de ces malformations qui peuvent être parfois très discrètes et parfaitement compatibles avec une vie épanouie.
La trisomie 21 est une anomalie chromosomique définie par la présence d'un 3e exemplaire plus ou moins complet du chromosome 21. Dans 95 % des cas, il s'agit d'une trisomie 21 dite « libre » (par non-disjonction méiotique) et homogène. Dans 2 à 3 % des cas, il s'agit d'une mosaïque. Enfin, dans 2 à 3 % des cas restants, il s'agit d'une trisomie dite « non libre », c'est-à-dire que la partie surnuméraire du chromosome 21 est fusionnée avec un autre chromosome[13].
Le diagnostic ne peut se faire que par la mise en évidence du chromosome 21 supplémentaire lors d'un examen génétique, généralement par analyse du caryotype ou par hybridation in situ en fluorescence.
La présence d'un troisième chromosome 21 est la cause de la pathologie. Le mécanisme de la présence du chromosome supplémentaire est important à connaître pour le conseil génétique. La réalisation du caryotype permet de connaître le mécanisme.
La formule chromosomique de la personne atteinte de trisomie 21 est donc : « 47, 21+ ». Le chromosome 21 supplémentaire vient presque toujours de la mère. L'origine de cette maladie génétique se situe lors de la gamétogénèse, et plus précisément lors de la répartition des chromosomes homologues au cours de la méiose.
-- Lors de l'anaphase 1 : les chromosomes homologues de la paire no 21 appariés en bivalent ne se sont pas séparés et ont migré vers un même pôle.
-- Lors de l'anaphase 2 : les deux chromatides du chromosome 21 ont migré vers un même pôle après clivage du centromère. Donnant ainsi un trisome et un monosome. Sachant que le monosome n'est pas viable.
Il s'agit de la fusion de deux chromosomes 21 par le mécanisme dit de translocation. Il s'agit donc d'un chromosome apparent ayant le contenu génétique de deux chromosomes. La formule chromosomique de la personne atteinte de cette forme de trisomie 21 est donc « 46,XY,+21,der(21)t(21;21) » ou « 46,XX,+21,der(21)t(21;21) ».
La trisomie 21 par translocation est dans certains cas héritée de l'un des parents. Il faut dans ce cas pratiquer un caryotype chez les parents pour identifier le porteur de l'anomalie.
Il dépend essentiellement de la réparation des malformations cardiaques associées. La durée de vie dépasse les cinquante ans[8]. La cause des décès est surtout cardiaque et pulmonaire[8].
L'hypothyroïdie se voit jusqu'à un tiers des cas[8]. Il existe un risque accru d'ostéoporose[15].
Une femme trisomique peut être fertile et le risque de transmettre l'anomalie à la descendance est de 50 %[8].
Le diagnostic prénatal est possible, il s'effectue soit au premier trimestre, à partir d'un prélèvement de villosités choriales ou choriocentèse qui est fait à partir de 11 semaines jusqu'à 14 semaines, soit par ponction de liquide amniotique au-delà de 14 semaines. Le risque d'avortement iatrogène est plus élevé lors d'une choriocentèse (environ 1 %) et le choix du prélèvement est fait en fonction du degré d'urgence et de l'indication médicale. Lorsque l'âge gestationnel est très avancé (vers la 30e semaine) un prélèvement de sang fœtal en ponctionnant le cordon ombilical peut être réalisé. Il permet d'obtenir un résultat rapidement car la culture de cellules sanguines (généralement de lymphocytes) ne demande que quelques jours alors qu'il faut plusieurs semaines pour les amniocytes.
La recherche d'ADN fœtal circulant dans la circulation maternelle est techniquement possible mais onéreuse, elle n'est pas remboursée (en 2014) par l'assurance maladie française ; c'est le dépistage non-invasif de la trisomie 21[16][source insuffisante], ou TGNI[17]. L'étude SEHDA (séquençage à haut débit des aneuploïdies) confirme une sensibilité (99,79 % chez les femmes à risque modéré) et une spécificité du test supérieures à 99 % : il permet d'éviter 95 % des gestes invasifs, soit amniocentèse, soit biopsie[18].
Plusieurs études conduites aux États-Unis ou au Royaume-Uni ont montré que 90 à 93 % des grossesses ayant donné lieu au diagnostic de trisomie 21 ont été interrompues[19],[20]. En France, le pourcentage d’interruption de grossesse à la suite d'un diagnostic prénatal de trisomie 21 est de 96 %[21].
Le principe de l'évaluation consiste à évaluer la probabilité de trisomie 21 afin de décider si le risque de la ponction est tolérable. Le but de l'évaluation du risque est, lorsqu'il est élevé, de permettre aux futurs parents de décider de pratiquer une amniocentèse, qui permettra le diagnostic. Le seuil de tolérance est un choix arbitraire, il est en effet difficile de comparer la possibilité de faire éliminer un fœtus sain avec celle de donner naissance à un enfant trisomique[réf. nécessaire].
Le but des examens de dépistage est, en fonction d’un ou de plusieurs paramètres cliniques ou paracliniques, de séparer les femmes enceintes en deux sous-populations : une population dont le risque est jugé bas et pour laquelle il doit être abstenu de réaliser tout prélèvement invasif en expliquant néanmoins que l'anomalie peut être présente, et une population estimée à haut risque pour laquelle un examen invasif va être proposé au couple après information concernant le risque lié à la méthode de diagnostic employée. L'évaluation d'un risque fait appel aux méthodes statistiques et de probabilité suivantes : avoir des signes pertinents, c'est-à-dire connaître la sensibilité, la spécificité, la valeur prédictive positive et négative et enfin la prévalence du signe. Calculer la probabilité individuelle d'un patient d'avoir une pathologie donnée après passage d'un test de dépistage et en partant d'un risque initial déterminé dans la population à laquelle appartient ce patient : utilisation du théorème de Bayes[réf. nécessaire].
Ce tableau inspiré de l'article paru dans le British Medical Journal résume l'ensemble des signes disponibles dans le cadre d'un dépistage de la trisomie 21. Les marqueurs en italique sont en cours d'évaluation[22].
Différents marqueurs pour le dépistage de la trisomie 21 | |
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Marqueurs | Risque augmenté si |
Marqueur clinique | |
Âge | Élevé |
Marqueurs sériques au premier trimestre | |
Bêta-hCG libre | Élevée |
PAPP-A (en) | Bas |
ADAM12 | Basse |
Marqueurs sériques au deuxième trimestre | |
Alpha-fœtoprotéine | Basse |
Estriol libre | Bas |
HCG totale | Élevée |
Inhibine | Élevée |
Marqueurs échographiques | |
Épaisseur de la clarté nucale | Élevée |
Os propres du nez | Absents |
Index de pulsatilité du ductus venosus | Élevé |
Régurgitation de la valve tricuspide | Présente |
Cette technique d'évaluation de la trisomie 21 (et des autres aneuploïdies) doit beaucoup au Professeur Kýpros Nicolaïdis de la Fetal Medicine Foundation de Londres.
Le marqueur échographique utilisé est la clarté nucale. La technique de mesure doit répondre à des critères stricts.
Il existe un autre marqueur échographique mais de mesure plus délicate : l'os propre du nez.
Les substances utilisées sont l'hCG libre et la PAPP-A (Pregnancy-associated plasma protein A (en)).
Le dépistage par ces marqueurs sériques se fait entre les 11e et 14e semaines d’aménorrhées sur une simple prise de sang.
Les facteurs pris en compte pour le calcul du risque de trisomie 21 sont l'âge maternel, le terme de la grossesse, le poids et le tabagisme de la future maman ainsi que les antécédents de trisomie 21 dans la famille. Dernier marqueur indispensable : la clarté nucale, qui est mesurée lors de l'échographie du 1er trimestre.
De nouveaux tests sanguins basés sur l'analyse de l'ADN fœtal dans le sang de la mère ont récemment[Quand ?] été évalués par la Haute Autorité de santé comme permettant de dépister 99 % des trisomies 21 chez les « femmes à risques » dès la cinquième semaine de grossesse et permettrait ainsi d'éviter 180 à 360 fausses couches par an en France[23].
Aucun signe échographique n'est symptomatique de la trisomie 21. Néanmoins, un certain nombre d'anomalies mineures ou majeures qui se rencontrent plus fréquemment dans cette maladie chromosomique peuvent être mis en évidence.
Le dépistage du deuxième trimestre prend également en compte les mesures échographiques du 1er trimestre et ce qui est appelé un « risque séquentiel intégré » doit être calculé. Comme pour le dépistage du premier trimestre, celui-ci permet de limiter le nombre d'amniocentèses dû à l'intégration de la clarté nucale dans le calcul.
L'évaluation se fait entre « 14+0 » semaines d'aménorrhée et « 17+6 » semaines d'aménorrhée. Les marqueurs utilisés sont l'alpha-fœtoprotéine et l'hCG libre. Certains laboratoires ajoutent l'estriol plasmatique mais le recours à ce troisième marqueur n'augmente pas la sensibilité et il est de fait peu fréquent. Cette technique d'évaluation par trois marqueurs sériques se nomme le triple test. Certains laboratoires pondèrent le résultat en fonction du poids de la patiente et/ou du nombre de cigarettes fumées par jour ainsi qu'avec les antécédents de trisomie 21 s'il y en a dans la famille proche (père, mère, frères et sœurs des parents et grands-parents).
Le calcul de la probabilité est basé sur une probabilité a priori qui est fonction de l'âge gestationnel et de l'âge de la mère. Cette probabilité diminue pendant la grossesse car environ 30 % des fœtus atteints de trisomie 21 décèdent in utero.
Avant le test, une femme a un risque d'avoir un fœtus atteint de trisomie 21 : c'est la probabilité pré-test. Après le test, une femme a un risque d'avoir un fœtus atteint de trisomie 21 : c'est la probabilité post-test. Le rapport de vraisemblance ou likehood ratio est le nombre multiplicateur qui permet de passer de la probabilité pré-test à la probabilité post-test.
Si un signe est présent parmi 50 % des fœtus atteints de trisomie et 5 % chez les fœtus non atteints, le rapport de vraisemblance est de 10 c'est-à-dire que le risque est multiplié par 10. Le rapport de vraisemblance est aussi vrai dans l'autre sens. Si un signe est présent parmi 20 % des fœtus atteints de trisomie et 40 % chez les fœtus non atteints, le rapport de vraisemblance est de 0,5 c'est-à-dire que le risque est divisé par deux.
Il faut aussi être sûr que les signes utilisés ne soient pas liés entre eux c'est-à-dire que l'un ne dépende pas de l'autre. Il faut que les signes soient statistiquement indépendants.
La probabilité donnée par la mesure de la clarté nucale et la probabilité calculée au moyen des dosages de l'hCG et de l'alpha-fœto-protéine (la prise de sang proposée en France à toutes les femmes enceintes) est l'intégration de tous les rapports de vraisemblance, qui demande l'utilisation d'un logiciel.
Le développement croissant des techniques de dépistage prénatal et le recours fréquent à l'interruption médicale de grossesse (96 % des fœtus trisomiques détectés par amniocentèse sont avortés) posent des questions d'ordre éthique qui peuvent donner lieu à des accusations d'eugénisme. Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme-Lejeune (anti-avortement), considère ainsi que « la multiplication de tous les eugénismes individuels produit un eugénisme collectif[25]. » L’écrivain Bruno Deniel-Laurent, dans Éloge des phénomènes, un essai publié en 2014, pose aussi la question de l'eugénisme[26]. Le Collectif les Amis d'Éléonore, association de parents d’enfants porteurs de la trisomie 21, interpelle régulièrement les hommes politiques sur cette question, affirmant que les recours très fréquents à l'interruption médicale de grossesse envoient un message dévalorisant aux personnes affectées[27][source insuffisante].
La recherche tente actuellement non pas de supprimer les chromosomes en trop, mais d'annuler leur influence. Plusieurs pistes thérapeutiques sont actuellement à l’étude, dont certaines donnent déjà lieu à des essais cliniques : l’un, mené en Espagne, concerne l’enzyme DYRK1A (Dual specificity tyrosine-phosphorylation-regulated kinase 1A) (en)[28], l’autre, mené par les laboratoires Roche, concerne le neurotransmetteur GABA[29]. Par ailleurs, la Fondation Lejeune a déposé en 2011 un brevet sur une molécule potentiellement thérapeutique[30]. Chez la souris de laboratoire traitée dès la naissance un agoniste de la signalisation hedgehog améliore le comportement et les résultats à l'épreuve du labyrinthe de Morris[31].
Les personnes porteuses de la trisomie 21 auraient une moindre activité du gyrus denté de l'hippocampe. Ceci serait l'une des explications de la déficience variable de la mémoire de ces sujets. Des gènes sur-exprimés seraient en cause et notamment ceux de la cystathionine bêta-synthase (CBS) et DYRK1A. Des travaux pour mettre au point des inhibiteurs de la CBS et DYRK1A sont en cours. Par ce souci de mémoire, ils ont besoin de repères pour évoluer plus facilement : ils ont des difficultés à « s’adapter » correctement.
La trisomie 21 diminuerait le risque de développer des tumeurs solides[32]. Cela serait (au moins pour les cancers intestinaux) la sur-expression d’un gène présent en trois exemplaires (du moins dans un modèle expérimental de souris de laboratoire caractérisée par une centaine de gènes orthologues du chromosome humain 21), qui réprime (de 44 % chez cette souris) la croissance tumorale dans les cancers intestinaux. Le gène Ets2, déjà identifié comme oncogène semble en cause (quand il est inactivé chez des souris mutées, le nombre de tumeurs devient inversement proportionnel au nombre de copies de Ets2 fonctionnelles, et à la quantité de ses ARN messagers)[33].
40 % de trisomiques peuvent contracter une leucémie.
En 1997, des archéologues grecs (équipe Diamandopoulos) décrivent dans le Journal of the History of Neuroscience une statuette découverte près de Thessalonique vieille de sept-mille ans. Celle-ci présente plusieurs caractéristiques qui évoquent le syndrome de Down, ce qui ferait d'elle la plus ancienne représentation sculptée de la maladie[34].
La première description clinique de la trisomie 21 est faite en 1838 par le médecin français Jean-Étienne Esquirol dans son ouvrage Des maladies mentales considérées sous le rapport médical, hygiénique et médico-légal[39] dans lequel il décrit certains signes cliniques observés chez des individus atteints par la trisomie 21. Il forge aussi le terme de diathèse furfuracée, en avançant le fait que la peau des trisomiques aurait une texture « farineuse ».
Le médecin français Édouard Séguin dresse également, en 1846, une description clinique de la trisomie 21 dans son Traitement moral, hygiène et éducation des idiots[40]. S'inspirant des travaux de Jean-Étienne Esquirol, il parle alors d’idiotie furfuracée pour désigner les phénomènes physiques caractéristiques des enfants trisomiques.
La première étude clinique d'envergure sur la trisomie 21 est publiée en 1866 sous la plume d'un médecin aliéniste britannique, John Langdon Down (1828-1896). Dans son mémoire intitulé Observations on a ethnic classification of idiots[41] (en français : Observations sur une classification ethnique des idiots), le médecin applique une classification des personnes souffrant de troubles mentaux en s'inspirant de critères racialistes. Il discerne une variété « éthiopienne », une variété « malaise », une variété « américaine » et une variété « mongolienne ». Cette dernière désigne en fait les individus atteints par la trisomie 21 qu'il décrit ainsi : « Un très grand nombre d'idiots congénitaux sont typiquement mongols […] Les cheveux ne sont pas noirs, comme chez les vrais Mongols, mais de couleur brune, raides et étriqués. La face est plate et large, et dénuée de proéminence. Les joues sont rondes et élargies latéralement. Les yeux sont placés en oblique, et les canthi internes sont anormalement distants l'un de l'autre. La fissure palpébrale est très étroite. Le front est plissé transversalement […] Les lèvres sont larges et épaisses avec des fissures transversales. La langue est longue, épaisse, et râpeuse. Le nez est petit. La peau a une teinte légèrement jaunâtre, déficiente en élasticité, donnant l'apparence d'être trop large pour le corps […] il ne peut y avoir aucun doute que ces caractéristiques ethniques sont le résultat d'une dégénérescence […] Le type mongolien d'idiotie représente plus de 10 pour cent des cas qui se sont présentés à moi. Ce sont toujours des idiots congénitaux, et jamais la conséquence d'accidents après la vie intra-utérine […] Ils ont une capacité considérable d'imitation […] Ils sont comiques […] Ils sont habituellement capables de parler ; le langage est simplet et indistinct, mais peut être amélioré grandement par une méthode bien dirigée de gymnastique de la langue. La faculté de coordination est anormale, mais pas si défectueuse qu'elle ne puisse être grandement renforcée. »
Si la description clinique de John Langdon Down se révèle d'une grande justesse, à tel point que son nom a servi à désigner la maladie (syndrome de Down), ses conclusions médicales sont fausses puisqu'il écrit aussi dans son mémoire : « Il ne peut y avoir aucun doute : ces caractéristiques ethniques sont le résultat d’une dégénérescence. »
En 1908, le docteur Adolphe Bloch commet la même erreur que John Langdon Down dans son article « Sur le mongolisme infantile dans la race blanche et sur d’autres anomalies qui sont des caractères normaux dans diverses races » publié dans Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris où il cherche à établir des comparaisons entre les singularités « aberrantes » des Européens mongoliens et les caractères physiologiques normalement observés chez les individus de « race jaune » : « Les Mongoliens sont des dégénérés, au même titre que les autres idiots, c'est-à-dire que le faciès dit mongolique, comme toutes les autres anomalies, provient le plus souvent d'une maladie ancestrale, comme la tuberculose, le nervosisme, l’alcoolisme ou la syphilis, qui peut se transformer par l’hérédité et ne manifester son influence que par le trouble qu’elle apporte au développement régulier du fœtus. » (cité par Bruno Deniel-Laurent dans son essai Éloge des phénomènes[42]).
C'est le , avec la publication, signée par les médecins français Jérôme Lejeune, Marthe Gautier et Raymond Turpin, d'un article[43] auprès de l'Académie des sciences et présentant trois cas d'enfants mongoliens que la communauté internationale apprend que la maladie est causée par la présence d'un chromosome surnuméraire au niveau de la 21e paire. Il y a trois chromosomes 21 au lieu de deux. C'est la première anomalie chromosomique décrite chez l'homme, et c'est la première maladie pour laquelle est mise en évidence la relation entre le génotype et le phénotype. Elle est donc renommée par Jérôme Lejeune, « trisomie 21 », « tri » voulant dire « trois » et « some » voulant dire « chromosome », c’est-à-dire « trois chromosomes 21 ». Cependant la paternité de cette découverte a été sujette à controverse[44]. Son attribution principalement à Jérôme Lejeune, au détriment de Marthe Gautier, serait un exemple français de l'effet Matilda[45].
En 1961, un groupe de 19 chercheurs souligne que le mot « mongolisme » usité pour désigner la trisomie 21 a des « connotations trompeuses » et est devenu un « terme embarrassant »[46],[47]. L'Organisation mondiale de la santé en abandonne l'usage en 1965, faisant ainsi suite à une requête informelle de la délégation de la République populaire mongole[46].
En , l'Assemblée générale des Nations unies a décidé de proclamer le Journée mondiale de la trisomie 21, qui sera célébrée chaque année à partir de 2012. Cette date du est hautement symbolique : elle fait référence aux 3 chromosomes 21 à l'origine de la maladie. Le but de cette Journée est d'inviter tous les États Membres, les organismes compétents du système des Nations-Unies et les autres organisations internationales, ainsi que la société civile, y compris les organisations non gouvernementales et le secteur privé, à sensibiliser et informer l'opinion publique sur la trisomie 21. Le , le Conseil économique, social et environnemental accueille une journée de sensibilisation[48] parrainée par Jean-Paul Delevoye à laquelle participent la philosophe Danielle Moyse, l'écrivain Bruno Deniel-Laurent, Emmanuel Laloux (président du Collectif les Amis d'Éléonore), Frédéric Leturque (maire d’Arras) et Thierry de La Villejegu, directeur général de la Fondation Jérôme-Lejeune et membre honoraire de l'ONG Un cœur pour la paix. Une campagne européenne, « Chère Future Maman » (Dear Future Mum), financée et soutenue par une dizaine d’associations, est aussi lancée le , appuyée sur un court-métrage réalisé à Milan par l'agence Saatchi and Saatchi qui rassemble des acteurs italiens, espagnols, anglais et français tous porteurs de trisomie 21[49]. Mise en ligne le sur le site de partage YouTube, cette vidéo a été visionnée plus de quatre millions de fois en moins d'une semaine[50].
Les conséquences de la trisomie 21 dépendent beaucoup de facteurs individuels et familiaux, comme pour tous les enfants, mais aussi de la qualité de la pertinence des rééducations précoces ou pas, des accompagnements spécifiques et du regard porté sur la personne porteuse de trisomie 21. Par ailleurs, lorsque l'adulte éducateur pense que l'enfant n'arrivera pas à un niveau d'autonomie sur un point précis, la probabilité est plus forte que l'enfant en effet n'y arrive pas (cet effet est décrit en psychologie comme l'effet pygmalion)[réf. souhaitée]. Ce facteur accentue fortement les disparités entre les personnes trisomiques, les adultes éducateurs, parents en général, ayant des difficultés à imaginer jusqu'où leur enfant peut aller.
D'une manière générale, on peut noter que la trisomie 21 entraîne un développement neuronal différent, avec une quantité de connexions plus faibles que pour les personnes non porteuses[51]. Ceci entraîne une capacité de traitement des informations plus faible, et donc un délai de traitement plus long. On observe donc très souvent chez la personne porteuse de trisomie 21 un temps de latence, plus ou moins important, entre l'information reçue et la réaction à celle-ci. Ceci explique aussi en partie les difficultés d'expression rencontrées par les personnes porteuses de trisomie 21, qui mettent souvent un peu de temps à exprimer de manière claire ce qu'elles veulent dire. Cet état de fait peut amener certains à écrire ceci : « Entre autres règles de communication, il est recommandé de s'exprimer par des phrases claires et concises, de répondre aux questions avec pertinence et dans un délai court. »
Les personnes atteintes de trisomie 21 doivent surmonter les conséquences de leur retard physique et intellectuel, mais plus souvent encore le regard inquiet ou hostile que certains portent sur leur anomalie qui n'est pourtant pas contagieuse et qui est plus familière et moins désespérante pour les familles que bien des affections congénitales.
Les personnes trisomiques ont besoin de développer une vie affective et sociale comme tout le monde.
Il est nécessaire pour les familles de solliciter le conseil de spécialistes qui les aideront à susciter et à encourager les progrès intellectuels et physiques (rééducation musculaire, activités physiques adaptées) du sujet. Il y a autant d'approches que de pays, et en France même plusieurs pratiques se mélangent. En conséquence, les tentatives de généralisation peuvent porter à polémique. Il est généralement admis que des rééducations précoces en orthophonie et kinésithérapie sont utiles. Au Brésil, il est préconisé jusqu'à 4 heures de kinésithérapie par semaine pour le bébé porteur de trisomie 21, de façon qu'il puisse aller à l'école au même âge que les autres et avec les mêmes capacités motrices. Cette approche est vue comme très contraignante pour l'enfant en France.
Les enfants atteints de la trisomie 21 ont été longtemps cachés. Leur existence était alors malheureuse et très brève, leur espérance de vie moyenne ne dépassait pas l'adolescence. Autant que possible il est conseillé de ne pas cantonner les enfants trisomiques à la fréquentation d'un milieu spécialisé : de nombreuses études montrent que le contact de l'école et d'enfants sains a une influence extrêmement positive sur le développement général et sur le quotient intellectuel du sujet atteint de trisomie (QI allant de 20 à 80 environ, selon divers paramètres, notamment les stimulations intellectuelles offertes par l'environnement). Avec une prise en compte de leurs insuffisances physiologiques et en les traitant comme les êtres pensants et aimants qu'ils sont, la médecine parvient aujourd'hui à leur donner une espérance de vie presque normale et il n'est pas rare qu'ils prennent une place dans la vie active.
Certains trisomiques sont capables de s'intégrer à la société de façon autonome à l'âge adulte. Certains ont un QI dit « normal » (supérieur à 70).
Une approche pédagogique et psychothérapeutique inspirée de la psychanalyse et visant à réparer les blessures narcissiques dont souffrent les trisomiques, tout en leur permettant des progrès cognitifs, est développée par une psychanalyste du GIREP, Madeleine Natanson qui en fait le sujet de sa thèse en 1987 : « Réparation symbolique et alliance pédagogique[52] ».