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(à 95 ans) Palo Alto |
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Kenneth Joseph Arrow |
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Université Columbia (maîtrise (en)) (jusqu'en ) Université Columbia (doctorat) (jusqu'en ) City College of New York Townsend Harris High School (en) Université de la Ville de New York |
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Prix de la Banque de Suède (1994) National Medal of Science (2004) prix de théorie John-von-Neumann (1986) |
Kenneth Joseph Arrow, né le à New York et mort le à Palo Alto[1], est un économiste américain.
Il est co-titulaire, avec John Hicks, du Prix de la Banque de Suède en 1972. Il est considéré comme l'un des fondateurs de l'École néoclassique moderne (c'est-à-dire post-Seconde Guerre mondiale).
L'impact des travaux de Kenneth Arrow a été significatif en sciences économiques. Pendant plus de cinquante ans, il est un des économistes les plus influents dans cette discipline. Sa notoriété est liée à ses contributions à des domaines variés: la théorie du choix social (en particulier son théorème d'impossibilité), la théorie de la croissance endogène, l'économie de l'information ainsi que la théorie de l'équilibre général. Il a initié en économie, le concept de l'apprentissage par l'action (learning by doing). Les individus sur le marché deviennent de plus en plus rationnels en échangeant car ils apprennent (de leurs erreurs), d'où les coordinations possibles. Il avance la notion d'effet d'expérience pour expliquer le changement technique au sein de la théorie néoclassique.
Kenneth Arrow a prouvé mathématiquement la généralité du paradoxe de Condorcet avec son "théorème d'impossibilité", formulé en 1951 et a ainsi bâti l'un des piliers de la théorie du choix social[2]. Pour Kenneth Arrow, la crise économique de 2008 fut en partie causée par l'asymétrie entre distribution du risque et distribution de l'information[3].
Arrow est né le à New York. Sa mère Lilian Greenberg était de Iași en Roumanie et son père Harry Arrow d'une ville proche, Podu Iloaiei[4],[5]. Sa soœr est Anita Summers[6]. Sa famille l'a fortement encouragé à faire des études[7]. Socialiste dans sa jeunesse, durant la grande depression, il s'en éloigne par la suite tout en gardant une philosophie de gauche[8]. Il étudie d'abord à Townsend Harris High School puis passe sa licence en sciences sociales spécialité mathématiques au City College of New York en 1940. Il envisage de devenir professeur de mathématique mais le secteur est alors saturé. Il voudrait devenir actuaire. Il essaye alors d'intégrer la section math de Columbia pour suivre les cours d'Harold Hotelling. Lorsqu'il demande à ce dernier une lettre de recommendation pour une bourse, ce dernier lui répond qu'il ne peut pas l'aider dans la section math mais que la situation est différente dans la section économie. Ce qui fit dire plus tard à Arrow quand « Les gens me demandent comment êtes-vous arrivé à l'économie ? » je réponds « j'ai été acheté. »[9],[8]. Après Pearl Harbor, il rejoint l'armée et sert de 1942 à 1946 comme officier météorologique dans l'US Air force[10].
En 1946 il revient à l'université de Columbia où il bénéficie d'une bourse et en 1947, il devient associé de recherche à la Cowles Commission for Research in Economics, à l'université de Chicago[11]. En même temps, il devient professeur auxiliaire dans les sciences économiques à l'université de Chicago. En 1951, il reçoit son Ph.D. de Columbia[12]. Il est expert dans les sciences économiques et professeur de recherche opérationnelle honoraire à l'université Stanford[13].
Le tournant de sa carrière intervient durant l'été 1948, alors qu'il travaille pour la RAND Corporation à Santa Monica en Californie où des théoriciens essaient d'adapter la théorie des jeux à l'étude des relations internationales[11]. Durant une pause, le philosophe Olaf Helmer lui demande si on pourrait considérer qu'un pays a une fonction d'objectif. Arrow lui répond que la fonction de bien-être de Bergson-Samuelson répond à sa question. Mais quand il veut mettre sa réponse par écrit, il s'aperçoit qu'il n'y a pas une méthode capable d'agréger convenablement les préférences. Cela l’amènera à écrire sa thèse qui développera ce qui est maintenant connu comme le thèorème d'impossibilité de Arrow [11]. Lors de la soutenance de sa thèse, les économistes de Columbia qui sont surtout des empiristes tel Wesley Clair Mitchell[14] alors la figure dominante en économie de cette université, demanderont à un jeune économètre, T.W Anderson, de vérifier les raisonnements mathématiques[11]. À la Cowles Commission à Chicago, il rencontre Selma Schweitzer qui sera sa femme sa vie durant. En 1949, il quitte l'université de Chicago à la suite notamment de l'arrivée de Milton Friedmann qui juge la Cowles Foundation for Research in Economics keynésienne[11]. Notons que si Arrow était du côté des progressistes, il n'a jamais souscrit aux hypothèses faciles de certains idéalistes de cette tendance[11].
En 1949, il accepte une offre de l'université de Stanford[11]. Il sera directeur exécutif du département de cette institution de 1953 à 1956, puis de 1962 à 1963. En 1962, il est économiste au comité des conseillers économiques des États-Unis. En 1968, il devient professeur d'économie à l'université Harvard[13]. En 1972, il devient le plus jeune économiste (51 ans) à recevoir le prix Nobel pour ses travaux sur la théorie du bien-être et sur les équilibres généraux de l'économie[2]. Arrow retourne à Stanford en 1979 et devient professeur d'économie de la chaire Joan Kenney. Il prend sa retraite en 1991. En qualité de membre distingué de la Commission Fulbright U.S.-Italie, il enseigne en 1995 l'économie à l'université de Sienne. Il est également membre fondateur de l'académie pontificale des sciences sociales et du conseil d'administration de l'Institut de Santa Fe. À plusieurs moments de sa carrière, il a également travaillé pour le Churchill College de Cambridge[12].
Cinq de ses anciens étudiants ont reçu le prix Nobel dont Eric Maskin, John Harsanyi, Michael Spence et Roger Myerson[15]. Les archives d'Arrow sont déposées à la bibliothèque Rubenstein de l'université Duke[16].
Arrow est le frère de l'économiste Anita Summers, le beau-frère de Paul Samuelson et l'oncle de l'ancien secrétaire d'État au trésor, également ancien président de Harvard, Larry Summers[17], En 1947 il a épousé Selma Schweitzer une diplômée en psychothérapie de l'université de Chicago[18] morte en 2015. Ils ont eu deux enfants : David Michael (né en 1962) un acteur [19] et Andrew Seth (né en 1964)[20],[12].
L'ouvrage d'Arrow, Social Choice and Individual Values, dérive de sa thèse de 1951.
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Dans ce qu'il nomme le théorème général d'impossibilité, il est impossible de formuler une préférence sociale qui satisfasse les conditions suivantes[22] :
Le théorème a des implications pour l'économie du bien-être et les théories de la justice. Il a inspiré le paradoxe libéral d'Amartya Sen selon lequel étant donné un statut donnant un minimum de liberté, il n'y a pas moyen d'obtenir un optimum de Pareto ou d'éviter le problème d'un choix social neutre mais inégal[22].
En 1951, Arrow présente les deux Théorèmes du bien-être qui lient un certain nombre d'hypothèses sur le fonctionnement économique (concurrence pure et parfaite, homogénéité et continuité des fonctions de production et des fonctions de demande, etc.) et la possibilité d'un état optimum de l'allocation des ressources (optimum de Pareto)[23]. Le premier théorème est souvent vu comme une confirmation analytique de la main invisible d'Adam Smith. Il indique que des marchés concurrentiels tendent vers une allocation efficiente des ressources. Le théorème indique que si les marchés fonctionnent bien, le résultat sera un optimum de Pareto, c'est-à-dire que personne peut faire mieux sans léser quelqu'un. Mais il peut exister plusieurs optimum de Pareto et tous ne sont pas également désirable par la société[24].
En collaboration avec Gérard Debreu, Arrow est le premier à fournir une preuve rigoureuse en 1954 de la possibilité d'existence, sous des conditions précises et extrêmement restrictives, d'un équilibre général de marché. Ce modèle est depuis devenu la version moderne du modèle de concurrence pure et parfaite[25] Pour ce travail et d'autres contributions, Debreu a obtenu le prix Nobel de 1983[26]. En 1974, l'American Economic Association a publié un papier écrit par Kenneth Arrow, General Economic Equilibrium: Purpose, Analytic Techniques, Collective Choice, où il constate
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Il est à noter que pour lui l'existence d'un équilibre général n'est pas un argument pour adopter le laissez-faire comme chez les plus libéraux. C'est seulement un modèle qui permet de mieux percevoir les inefficiences d'un système de marché dans le monde réel[9]. Sur le plan financier, bien que la conception d'Arrow des titres permettent d'atteindre une allocation optimale, il tient les hypothèses sous-jacentes à sa démonstration hautement improbables. Il note qu'il manque de nombreuses institutions économiques nécessaires pour faire face à l'incertitude[9].
À ceux qui comme Deirdre McCloskey (1997) pensent que le modèle Arrow-Debreu a été un désastre pour l'économie, il répond qu'au contraire il a conduit à un algorithme permettant de résoudre les problèmes d'équilibre général qui a été un chose très utile (Damn useful thing) [28]
Selon lui avoir une théorie c'est disposer d'un modèle qui permet de comprendre ce qui arrive. Si la microéconomie dispose de théories, selon lui en macro-économie, il n'y a que des généralisations empiriques qui tendent à changer assez rapidement[28]. D'une manière générale, il soutient que les mathématiques sont une grande aide pour penser clairement d'autant qu'« il y a des problèmes que l'on ne peut poser de façon cohérente qu'en mathématique »[28]
Arrow est l'un des précurseurs de la Théorie de la croissance endogène, qui cherche à expliquer les sources du changement technique, une des clés de la croissance économique. Jusqu'à l'apparition de cette théorie, le changement technique était supposé être une variable exogène, c'est-à-dire indépendante des activités économiques et/ou il n'y avait pas d'explication économique susceptible d'expliquer pourquoi il survenait. La théorie de la croissance endogène qui explique pourquoi les firmes innovent, débute avec un article de 1986 de Paul Romer[29] qui emprunte au modèle d'apprentissage par la pratique d'Arrow de 1962. Un modèle qui permet d'éliminer les rendements décroissants[30],[31].
Arrow s'est aussi penché sur les problèmes liés à des asymétries d'information sur les marchés. Rappelons que dans bien des transactions, une partie (usuellement le vendeur) a plus d'information sur le produit vendu que l'autre partie, l'acheteur. L'asymétrie d'information crée des incitations pour la partie la mieux informée à gruger l'autre partie. C'est notamment lui qui a introduit les notions d' aléa moral et de sélection adverse reprises du domaine de l'assurance[32]. Arrow a analysé dans un article de 1963 intitulé "Uncertainty and the Welfare Economics of Medical Care", paru dans l'American Economic Review le cas des asymétries d'information dans le domaine médical[33] qui rendent les relations habituelles de marché inefficace[9]. Évoquant cet article au tome six de ses œuvres complètes, il écrit :
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Son papier Economic Welfare and the “Allocation of Resources for Invention“ paru dans The Rate and Direction of Inventive Activity (1962) constitue un des fondements de l'analyse économique de la technologie. Pour lui l'investissement dans la recherche ou la connaissance se distingue d'un investissement conventionnel en ce qu'il est indivisible, inappropriable et incertain[9].
Au début des années soixante-dix Arrow a écrit sur la discrimination sur le marché du travail. Ses travaux constituent trois chapitres de livre collectifs : “Model of Job Discriminiation“ et “Some Mathematical Models of Race Discrimination in the Labor Market“ parus dans Racial Discrimination in Economic Life (1972), et “The theory of Discrimination“ dans Discrimination in the Labor Market (1973). Dans ces articles il s'oppose notamment à la thèse de Gary Becker pour qui la discrimination n'est pas viable en économie de marché. Arrow soutient lui que sous certaines hypothèses, la discrimination peut aboutir à un équilibre stable[9].