La bossa nova, ou bossanova, ou bossa-nova[5], familièrement la « bossa », est un genre musical né à la fin des années 1950 à Rio de Janeiro au Brésil. Elle prend ses racines dans la samba et le cool jazz. La bossa nova est devenue l'un des styles musicaux brésiliens les plus connus dans le monde. Elle se popularise significativement à partir du début des années 1960, d'abord au Brésil puis aux États-Unis et en Europe.
La bossa nova a connu son pic de popularité mondial dans les années 1960, mais est restée appréciée par la suite. À partir de la fin des années 1980, on assiste à un regain d'intérêt pour le genre à travers le monde[6]. Pour beaucoup, la bossa nova est synonyme avec la musique brésilienne[7]. Parmi les morceaux de bossa nova les plus connus figurent Desafinado, Garota de Ipanema, Samba de Verão et Wave[8].
L'impact de la bossa nova sur la musique mondiale ne s'arrête pas seulement à un nouveau genre musical. La bossa nova a influencé durablement le jazz[9], la musique populaire nord-américaine, la chanson européenne et la musique de film.
Terminologie
Le nom de bossa nova vient du mot portugais du Brésilbossa, qui signifie au premier degré « bosse » (de baleine, de chameau), et peut se traduire au second degré par « onde », « vague » (de la mer), « aptitude », « vocation » (littéralement, « nouvelle vague », « avoir la bosse pour quelque chose ») et dans ce cas précis par « tendance ».
L'expression bossa nova peut être traduite par « nouvelle vague ».
Elle est la réponse aux attentes des jeunes musiciens des classes moyennes de Rio de Janeiro. Ceux-ci sont à la recherche de modernité, d'une nouvelle manière d'interpréter les chansons, d'une musique plus épurée, de paroles optimistes qui reflètent leurs aspirations. Ils apprécient la musique nord-américaine, en particulier les disques de Frank Sinatra et de Chet Baker. Ils rejettent les formes musicales brésiliennes traditionnelles telles que les sambas de type carnaval avec une utilisation massive des percussions et les samba-canção, similaires aux boléros hispano-américains, offrant des compositions simples, une harmonie standard, des textes sentimentaux, fréquemment mélodramatiques, et interprétées par des artistes à la voix puissante et pleine de vibrato[10],[11].
Des réunions se tenaient dans les appartements chics de la zona sul de Rio de Janeiro, principalement dans les quartiers d'Ipanema et de Copacabana. Dans l'un de ces appartements habitait Nara Leão, une étudiante en musique qui accompagne les débuts de la bossa nova. Chez elle, avec parfois la présence d'Antônio Carlos Jobim et de João Gilberto, les jeunes musiciens cariocas se rencontraient pour composer, improviser ou réinterpréter des standards de jazz ; parmi eux on trouvait Carlos Lyra, Roberto Menescal (futur guitariste des Copa 5), Normando Santos, Sergio Ricardo, Aloysio de Oliveira (producteur musical et plus tard fondateur du label Elenco Records), Oscar Castro-Neves, Sylvia Telles, et le journaliste Ronaldo Bôscoli (qui a contribué à populariser le nouveau courant en le baptisant bossa nova dans ses articles)[12]. Des improvisations avaient aussi lieu sur les plages et dans des cabarets auxquelles prenaient part, entre autres, Luiz Bonfá (co-compositeur avec Tom Jobim de la musique du film Orfeu Negro) et Baden Powell.
Le premier disque où l'on peut entendre de la bossa nova est l'album Canção do Amor Demais, enregistré par la chanteuse brésilienne Elizeth Cardoso à Rio de Janeiro en avril 1958 et sorti le mois suivant. L'album, avec des compositions et des arrangements de Tom Jobim, comprend deux titres où João Gilberto joue à la guitare avec la rythmique caractéristique de la bossa nova : Chega de Saudade et Outra Vez[13].
Chega de saudade apporte une grande nouveauté par la façon dont João Gilberto joue de la guitare : le décalage est permanent entre la mélodie et l'accompagnement rythmique[14].
La popularité de la bossa nova au Brésil débute l'année suivante avec la sortie en mars 1959 de l'album de João Gilberto Chega de Saudade, dont les titres ont été enregistrés aux studios Odeon à Rio à partir de juillet 1958 et jusqu'au commencement de 1959[15]. Sur ce disque, João Gilberto interprète trois chansons d'Antônio Carlos Jobim (deux sur des paroles de Vinícius de Moraes (Chega de Saudade et Brigas, nunca mais) et une sur des paroles de Newton Mendonça (Desafinado), trois chansons de Carlos Lyra, deux compositions personnelles, et reprend à sa manière d'anciennes sambas, y compris une chanson de Dorival Caymmi (Rosa Morena).
En 1961, lors d'une tournée au Brésil, le guitariste de jazz américain Charlie Byrd découvre la bossa nova. À son retour, il fait écouter les disques de João Gilberto au saxophoniste Stan Getz. Les deux décident d'enregistrer ensemble en 1962 un album intitulé Jazz Samba qui reprend plusieurs titres de Gilberto. Jazz Samba connaît un grand succès et marque le début de la vague de bossa nova aux États-Unis.
Dans la foulée de ce succès, Stan Getz enregistre en 1963 un nouvel album, Getz/Gilberto, en collaboration avec João Gilberto, accompagné de sa femme Astrud, et Tom Jobim[3]. La première piste de l'album est la chanson Garota de Ipanema (The Girl from Ipanema, en anglais), interprétée par João Gilberto et Astrud Gilberto. Grâce à ce titre, la bossa nova remporte un succès planétaire lors de la sortie de l'album en 1964.
Garota de Ipanema et deux autres titres de l'album Getz/Giberto, Corcovado et Desafinado, deviennent des standards de jazz et sont inclus dans le Real Book, la « bible » des musiciens de jazz[16].
La bossa nova est née à Rio de Janeiro, alors capitale du Brésil, durant une période de croissance économique et de stabilité politique où l'optimisme était de mise. Les musiciens de bossa nova font partie de la classe moyenne de Rio qui fréquente les clubs de jazz et est influencée par la musique et le cinéma nord-américains. Les paroles des chansons de la bossa nova traitent de thèmes légers comme l'amour, les plages de Rio, ou la beauté des femmes brésiliennes. Avec la fin de la croissance au Brésil au début des années 1960, qui conduit à une grave crise économique, et la prise de conscience des inégalités extrêmes entre les régions, un nombre croissant de brésiliens rejette l'insouciance de la bossa nova[17].
Au moment où le coup d'État de 1964 instaure la dictature militaire, la bossa nova stricto sensu prend fin au Brésil. Une nouvelle génération d'artistes brésiliens, surnommée la « seconde génération de la bossa nova »[18], et dont font partie des artistes tels que Edu Lobo, Maria Bethânia, Gilberto Gil, Caetano Veloso et Chico Buarque, œuvre à transformer la bossa nova pour qu'elle soit plus en phase avec la réalité politique et sociale du Brésil et qu'elle incorpore d'autres styles musicaux populaires brésiliens comme la samba de Bahia, le choro ou la modinha. Plusieurs créateurs historiques de la bossa nova, à l'instar de Carlos Lyra et de Vinícius de Moraes, rejoignent ce mouvement qui prend le nom de MPB (« Musique Populaire Brésilienne »)[19].
Un autre facteur contribuant à l'émergence de la MPB au Brésil est l'apparition au début des années 1960 de nouveaux talents comme Jorge Ben Jor, Elis Regina et Wilson Simonal. Ces artistes ne cherchent pas à changer la bossa nova mais leur style vocal, inspiré par la musique soul, et leur talent scénique ont un impact important sur la manière d'interpréter la bossa et sur la musique brésilienne en général[20],[21]. En 1965, Elis Regina interprète la chanson Arrastão, composée par Edu Lobo avec des paroles de Vinícius de Moraes, et remporte le premier prix au 1er Festival de Música Popular Brasileira. Cet événement marque le début de la MPB[22].
Sous l'influence de Caetano Veloso et de Gilberto Gil, une variante de la MPB, connue sous le nom de Tropicália, verra le jour en 1967. La Tropicália se distingue de la MPB par l'addition du rock psychédélique dans le mix musical. Le genre ne survivra pas le déclin du rock psychédélique qui s'observe à partir de 1969 aux États-Unis et en Europe.
In fine, la bossa nova s'est enrichie de l'apport musical de la MPB et vice versa. Plusieurs albums importants de la bossa nova comme Stone Flower d'Antônio Carlos Jobim paru en 1971, João Gilberto de João Gilberto paru en 1973, et Elis & Tom paru en 1974, ont bénéficié de l'influence de la MPB. De même, une part non négligeable du répertoire de la MPB est de style bossa nova. On peut par exemple citer l'album Domingo de Caetano Veloso et Gal Costa paru en 1967 ou l'album Chico Buarque de Hollanda Volume 3 de Chico Buarque paru en 1968, qui sont tous deux musicalement de style bossa nova. La MPB a permis le maintien de la popularité de la bossa nova au Brésil, en lui évitant de n'être qu'un phénomène de mode.
La bossa nova a eu un rôle important, non seulement dans l'histoire de la musique brésilienne, mais aussi dans l'histoire de la musique mondiale. Antônio Carlos Jobim a été surnommé le « George Gershwin brésilien »[23] et est considéré comme l'un des plus importants contributeurs non-américains du Great American Songbook[24].
Le nouveau style musical brésilien a introduit des harmonies complexes, une relation étroite entre paroles et musique ainsi qu'une préoccupation générale pour l'arrangement et la forme musicale[25]. La bossa nova a eu une influence significative sur la musique populaire nord-américaine des années 1960 et 1970[26], en particulier sur les œuvres de Burt Bacharach[27] et de Stevie Wonder[28].
La bossa nova a eu également un impact majeur sur le jazz. Si le jazz fait partie de l'ADN de la bossa nova, l'influence de la bossa nova sur le jazz à partir du début des années 1960 a été déterminante.
L'interprétation de la bossa nova telle que l'ont faite les musiciens américains de Jazz West Coast, comme Stan Getz ou Paul Desmond, dans la lignée des musiciens de jazz brésiliens, a conduit à un nouveau style de jazz, souvent appelé lui-même bossa nova. On peut lui préférer le nom de « samba jazz », terme utilisé au Brésil, ou de « bossa jazz », en raison des différences avec la bossa nova originelle de João Gilberto et de Tom Jobim. Ce nouveau style a eu une grande influence sur le développement ultérieur du smooth jazz.
D'autres musiciens, comme Dizzy Gillespie et Cal Tjader, qui avaient incorporé les rythmes afro-cubains dans le jazz bebop, créant ainsi le latin jazz, découvrent la bossa nova et ses rythmes afro-brésiliens et travaillent à les intégrer au latin jazz. Parmi les musiciens qui ont contribué à cet effort, on peut citer Lalo Schifrin, Horace Silver et George Shearing.
La nouvelle génération de musiciens de jazz américains apparue au milieu des années 1950, surnommée « hard bop », génération marquée par le rhythm and blues et le gospel, découvre également la bossa nova et développe un nouveau style dénommé « hard bossa ». Parmi les musiciens qui créent la « hard bossa », on peut citer Donald Byrd, Herbie Hancock, Joe Henderson et Lee Morgan. Plusieurs musiciens de jazz brésiliens venus travailler aux États-Unis, tels que Airto Moreira et Hermeto Pascoal, les rejoignent et influencent ce mouvement.
Le latin jazz et la « hard bossa » ont eu une grande influence sur les développements du jazz qui ont suivi, tels que le jazz fusion, le soul jazz, et le jazz-funk.
Dorival Caymmi, l'un des plus importants compositeurs de samba, et João Gilberto, avec la collaboration d’Antônio Carlos Jobim, ont apporté plusieurs innovations et modifications à la samba traditionnelle. La bossa nova n'a pas remplacé le samba mais a offert une alternative musicale aux classes moyennes et dirigeantes. En effet, la bossa nova alterne de nombreux paramètres stylistiques, recherchant une certaine intégration dynamique de la mélodie, une harmonie particulière et un rythme lent tout en adoucissant le rôle du vocaliste en tant qu'élément central du morceau musical.
Au niveau rythmique, la bossa nova reprend à la basse le rythme répétitif du surdo (sorte de grosse caisse) de la samba, en utilisant des croches plutôt que des doubles croches. Le temps fort est également joué plus doucement, tandis-que le 3e temps est accentué[29], et y apporte des rythmes syncopés variés au chant.
Les basses sont jouées sur tonale et quinte, avec plusieurs progressions possibles, voici un exemple :
Cette approche musicale contraste nettement avec le style du samba-cançao. A felicidade (enregistré par João Gilberto en 1959), du film Orfeu Negro de Marcel Camus, est un excellent exemple de ce contraste. Dans cette chanson, la samba traditionnelle de carnaval alterne avec les styles caractéristiques de la bossa nova.
Au niveau mélodique, João Gilberto intègre des accords comprenant un 9e degré, ajoutant une touche très particulière à ce style musical.
Le jazz joue une forte influence[3], parfois contestée[30], dans le développement de la bossa nova.
Au début des années 1950, avant de devenir compositeur et arrangeur, Antônio Carlos Jobim était pianiste de bar[31] et côtoyait des musiciens de jazz, parmi lesquels Johnny Alf, dont les innovations musicales contribueront à la création de la bossa nova[32], et Newton Mendonça, avec qui Jobim composera quelques standards de bossa (Desafinado et Samba de Uma Nota Só étant les plus connus).
En 1953, le guitariste brésilien Laurindo Almeida, qui vit aux États-Unis, a l'idée de mêler les rythmes brésiliens avec le jazz West Coast. En compagnie du saxophoniste américain Bud Shank, il enregistre l'album Laurindo Almeida Quartet featuring Bud Shank qui sort en 1954. La collaboration entre Almeida et Shank va se poursuivre et deux autres albums dans le même style verront le jour. Avec son mélange de samba et de jazz, Laurindo Almeida est considéré comme le musicien qui a bati les fondations sur lesquelles la bossa nova a pu être créée par Jobim et Gilberto. Almeida évoluera lui-même vers la bossa nova au début des années 1960[33].
Plusieurs musiciens de jazz brésiliens rejoignent le mouvement de la bossa nova à ses débuts en 1958-1959 et vont influer sur son développement. On peut citer le flûtiste et saxophoniste J.T. Meirelles, le pianiste et crooner Dick Farney, le guitariste Roberto Menescal, les batteurs Edison Machado (pt) et Milton Banana (pt), l'organiste et pianiste Walter Wanderley, le tromboniste Raul de Souza, le saxophoniste Moacir Silva (pt), le pianiste et compositeur João Donato, qui travaille aux États-Unis entre 1960 et 1972 et y subit les influences musicales cubaines et portoricaines, et le pianiste Sérgio Mendes, qui plus tard avec son groupe Brasil '66 incorporera des sonorités pop à la bossa nova, la rendant plus populaire qu'élitiste.
Musique classique
Si la bossa nova est influencée par le jazz[3], Jobim s'est toujours considéré de tradition classique. L'analyse harmonique des compositions de Jobim montre clairement que les accords enrichis de la bossa nova s'écartent de l'usage en vigueur dans le jazz à l'époque (fin des années 1950 / fin des années 1960). Le défunt professeur d'harmonie et de guitare brésilienne Almir Chediak[34] révèle la construction harmonique des œuvres bossa-novistes et en particulier celles de Jobim : là où la majorité des standards de jazz se limitait aux accords de 9e, la bossa nova n'hésitait pas à pousser l'utilisation des extensions jusqu'aux 11e et 13e, diminuées ou augmentées. Cette complexification harmonique, toute naturelle dans la bossa nova, n'était pas le souci des jazzmen. Jobim avait d'ailleurs coutume de dire que la bossa nova était une musique de chambre populaire.
Les standards Garota de Ipanema, Insensatez…, suggèrent directement Debussy ou Chopin (Prélude à l'après-midi d'un faune, Suite Bergamasque, Deux Arabesques pour ce qui est de Debussy et Prélude en Mi Mineur, pour ce qui est de Chopin). Sans parler de Ravel, Stravinsky ou du Brésilien Villa-Lobos. D'ailleurs, le saxophoniste baryton Gerry Mulligan dans son album Night Lights, plutôt que de reprendre Insensatez, s'attache à livrer son interprétation du Prélude en Mi Mineur de Chopin[35].
Instruments et approche orchestrale
La guitare classique est l'instrument emblématique de la bossa nova. La forme musicale originelle de la bossa nova créée par João Gilberto est composée d'un chanteur à la voix intimiste qui s'accompagne à la guitare acoustique en utilisant la technique de jeu picking[36]. Parmi les artistes qui ont interprété la bossa nova selon la vision de Gilberto, on peut citer la chanteuse franco-italienne Caterina Valente[37],[38].
Cependant, la forme musicale qui a permis à la bossa nova de se faire connaître dans le monde entier a été conçue par Antônio Carlos Jobim pour les besoins des premiers disques de João Gilberto, dont il était responsable des arrangements. Au rythme joué à la guitare par Gilberto, la batida, et à sa voix, Jobim a ajouté plusieurs instruments dans l'orchestration des morceaux : un piano, des percussions de samba (ganzá, tamborim, bongos, agogô, wood-block), une section de bois, une section de cordes et une section de cuivres. Pour la partie chantée, Jobim a ajouté aux paroles des vocalises et du scat. Dès les débuts de la bossa nova, Jobim fait le choix dans ses arrangements d'une approche orchestrale easy listening[39] inspirée par les standards américains.
En parallèle au travail réalisé par Jobim, deux musiciens, Carlos Monteiro de Souza, directeur musical chez Philips au Brésil[40], et Lindolfo Gaya, arrangeur et chef d'orchestre dans les studios d'Odeon à Rio[41], apportent plusieurs innovations aux arrangements de bossa nova. Ils enrichissent le son de Jobim en utilisant des orchestrations luxuriantes, en ajoutant des chœurs et avec l'addition d'instruments musicaux tels que le vibraphone, l'accordéon, l'orgue Hammond, les congas ou le reco-reco. Ils innovent également en intégrant le rythme de la bossa nova à d'autres genres musicaux tels que la samba-canção, le swing, la musique cubaine ou la musique de variété nord-américaine. L'approche orchestrale définie par Jobim, avec les ajouts des maestros Monteiro de Souza et Gaya, devient le de facto standard pour l'écriture des arrangements de bossa nova, tant au Brésil que dans le reste du monde.
Au cours de cette même période, l'approche orchestrale de Jobim est revisitée par les musiciens de jazz brésiliens, essentiellement de style bebop, qui sont désireux d'interpréter le nouveau genre musical avec les instruments typiques du jazz : le piano, la batterie, la contrebasse, le saxophone, le trombone, la trompette et la guitare amplifiée. L'un des précurseurs au Brésil de l'interprétation de la bossa selon les codes du jazz est le Conjuto Bossa Nova[42]. Il sera suivi par le groupe Os Cobras[43] et par le pianiste Sérgio Mendes avec son sextette[44]. La bossa nova telle que jouée par ces formations de jazz a été baptisée au Brésil « Samba Jazz ». C'est principalement sous cette forme que la bossa nova a été introduite aux États-Unis au début des années 1960.
Artistes à travers le monde
De nombreux chanteurs, auteurs-compositeurs, paroliers, producteurs, musiciens de jazz, arrangeurs, chefs d'orchestre, et compositeurs de musique de films ont contribué à la création, à l'essor, à la popularisation et à la perpétuation de la bossa nova tant au Brésil que dans le reste du monde[45].
pour les groupes musicaux : Os 3 Morais, Bossa Rio, Bossa Três, Os Catedráticos, Os Cobras, Os Copa 5, Os Gatos, Os Ipanemas, Quarteto em Cy, Rio 65 Trio, Sambalanço Trio, Som Três, Trio, Tamba 4, Os Tatuis, Trio 3D et Zimbo Trio.
pour les auteurs et compositeurs : Luiz Antônio, Billy Blanco, Vera Brasil (pt), Francis Hime, Antônio Maria et Paulo Sérgio Valle.
pour les directeurs musicaux et producteurs : Paulo Alencar, José Briamonte, Ismael Corrêa, Lindolfo Gaya, Radamés Gnattali, Aloysio de Oliveira, Lyrio Panicali, Armando Pittigliani et Carlos Monteiro de Souza.
L'aventure de la bossa nova aux États-Unis débute en 1961. Le trompettiste de jazz Dizzy Gillespie et le pianiste qui l'accompagne depuis l'année précédente, l'argentin Lalo Schifrin, s'intéressent tous deux à la bossa nova, qu'ils ont découverte lors de séjours au Brésil. Ils décident d'inclure des morceaux du nouveau genre musical dans les performances en public du quintet de Gillespie[47],[48]. La même année, la chanteuse Caterina Valente interprète à la télévision américaine la chanson Corcovado[49] et le guitariste Herb Ellis enregistre pour Verve le morceau de bossa nova One Note Samba[50]. Toujours en 1961, le guitariste de jazz américain Charlie Byrd, dans le cadre d'une tournée au Brésil, découvre à son tour la bossa nova. À son retour, il propose au saxophoniste de jazz Stan Getz d'enregistrer un album reprenant plusieurs des titres interprétés par João Gilberto dans ses premiers disques. L'album, produit sous la houlette de Creed Taylor et intitulé Jazz Samba, sort en avril 1962 et provoque le début de la popularité de la bossa nova aux États-Unis[51].
En parallèle, le compositeur Henry Mancini est l'un des premiers à utiliser la bossa nova dans des musiques de films aux États-Unis[59]. On peut notamment citer le film Diamants sur canapé sorti en octobre 1961. À sa suite, Jerry Goldsmith, Quincy Jones, Lalo Schifrin et John Williams s'inspireront de la bossa nova dans l'écriture de plusieurs de leur thèmes pour le cinéma.
Au fil des années, d'autres artistes américains ont contribué à la bossa nova. Parmi eux, on peut mentionner :
La chanteuse franco-italienne Caterina Valente est la première interprète non-brésilienne de bossa nova dans plusieurs pays d'Europe[62],[63],[64],[65].
En 1963, le chef d'orchestre allemand Claus Ogerman, qui vit aux États-Unis depuis 1959, collabore avec Antônio Carlos Jobim pour son premier album solo The Composer of Desafinado Plays. Ogerman enregistrera un total de six albums pour Jobim. Le plus connu de ces albums étant sans doute Wave. Claus Ogerman écrira également les arrangements des albums Francis Albert Sinatra & Antonio Carlos Jobim de Frank Sinatra, Amoroso de João Gilberto et The Look of Love de Diane Krall.
Dans le domaine du cinéma, la bossa nova a inspiré un nombre important de compositeurs européens de musique de films, notamment Michel Legrand, John Barry, Francis Lai, Ennio Morricone et Piero Piccioni. Michel Legrand est l'un des premiers à avoir utilisé la bossa nova au cinéma (pour le film Love is a Ball sorti en août 1963[66]).
Parmi les autres artistes européens qui ont contribué à la popularité de la bossa nova, on peut citer :
Les listes (non exhaustives) qui suivent comprennent des albums studios, des albums live, des compilations ainsi que des reprises en bossa nova, enregistrés au Brésil, en Amérique du Nord, en Europe et au Japon à partir de 1958. Tous les albums cités sont répertoriés sur Discogs et la plupart peuvent être écoutés sur YouTube. La maison de disques, le numéro de catalogue et le pays de publication indiqués pour chaque album sont ceux de l'édition originale.
Au début des années 1960, à l'arrivée de la bossa nova aux États-Unis et en Europe, les compositeurs de musique pour le cinéma et la télévision sont séduits par ce nouveau genre et s'en inspirent dans la création de leurs thèmes musicaux. Les metteurs en scènes sont également conquis et font appel à des musiciens de bossa nova et de jazz pour écrire la musique de leurs films ou de leurs séries télévisées. Les musiciens de jazz embauchés par les studios, tels que Lalo Schifrin et Quincy Jones, utilisent non seulement la bossa nova stricto sensu dans leurs créations mais également les nouvelles formes de jazz inspirées par la bossa nova, telles que le latin jazz et la hard bossa, ainsi que les rythmes afro-cubains (boléro, cha-cha-cha, et mambo). La fusion de tous ces styles crée le son musical caractéristique des productions américaines realisées à partir du milieu des années 1960, en particulier dans les genres espionnage, policier et science fiction.
Les listes qui suivent ne sont pas exhaustives (sources utilisées : IMDb, Discogs, YouTube, INA). Il faut également noter qu'elles incluent des bandes originales utilisant la bossa nova mais dont le thème le plus connu du public est d'un autre genre musical (par exemple, le thème du générique de la Panthère Rose qui est de style swing).
↑Rebecca Manzoni, Pop'n Co, 10 octobre 2020, interview d'Anaïs Fléchet. Elle relève qu'il est très difficile ainsi de chanter et de jouer simultanément.