Romulus et Rémus.

L'expression enfant sauvage désigne un enfant ayant grandi hors ou en marge de la société humaine.

Il existe des récits, et aussi des mythes fameux comme celui de Romulus et Rémus, faisant état d'enfants élevés (ou ayant été élevés) par des animaux sauvages. Ces récits évoquent des loups, des ours ou d'autres animaux hostiles, ayant adopté un enfant comme l'un des leurs. Sur un plan purement éthologique, une telle adoption n'est possible que si l'animal adoptant vient de perdre sa propre descendance, manifeste encore l'instinct maternel ou paternel de protection, et vit seul : dans toute autre configuration, l'enfant est une proie à dévorer (pour les compagnons de l'animal adoptant, s'il vit en groupe) ou bien une gêne (cas des herbivores ou omnivores en cas de nécessité de fuir). Sur le plan documentaire, parmi la cinquantaine de cas recensés depuis le XIVe siècle, les plus abondamment discutés par des témoins et des scientifiques, sont au nombre de 5 ou 6. Il existe des histoires, bien plus rares, d'enfants élevés par des herbivores (antilopes en Afrique)[1].

La psychologie s'est intéressée aux cas de ces enfants pour discuter les rapports entre culture et nature (quels apports culturels nécessite un petit d'humain pour devenir un humain ?) et pour discuter la place du déterminisme précoce dans l'ontogénèse[2]. Mais les informations extrêmement fragmentaires sur leur vie antérieure (âge de l'abandon, durée de celui-ci, capacités acquises au moment de l'abandon, réalité de l'adoption par des animaux…) font que les « enfants sauvages » ne constituent pas véritablement des cas permettant de discuter scientifiquement ces questions[1].

Ils ont souvent été considérés comme des enfants oligophrènes, mais des ébauches de modification de leurs comportements, dans le cadre des techniques de « dressage » qui ont souvent été employées, montrent une certaine reprise de leur évolution sans que des démarches autonomes d'apprentissage se manifestent. Les enfants sauvages ont d'énormes difficultés pour apprendre à parler : cela ne prouve pas qu'ils ont été élevés par des animaux, mais seulement qu'ils n'étaient pas en présence d'humains lors du stade de développement où l'enfant acquiert le langage par écoute, analyse, compréhension et imitation. La seule preuve solide d'une éducation par des animaux serait que le comportement de l'« enfant sauvage » soit en parfaite adéquation avec celui d'une espèce sauvage, dont les représentants le « reconnaîtraient » comme l'un des leurs sans avoir jamais été apprivoisés, mais aucune expérience n'a jamais été faite dans ce sens, alors qu'à l'inverse, le cas d'animaux de diverses espèces élevés et apprivoisés par des humains sont nombreux.

Sources et origine de l'expression

L'expression « sauvage » apparaît dans le rapport de police de Guiraud et Constant de Saint-Estève relatant la première et la seconde capture du « sauvage de l'Aveyron ».[réf. souhaitée]

Les rapports, abondamment discutés et qui ont servi de sources à des livres ou à des films, sont en particulier ceux concernant :

Légendes et littérature

Mowgli

Tite-Live donne du mythe de Romulus et Rémus la version suivante :

« Une louve perçut des vagissements et se laissa guider vers eux. Pleine de douceur, elle se pencha vers les bébés et leur présenta ses mamelles. Elle les léchait encore quand le chef des troupeaux royaux les découvrit. (On l'appelait, paraît-il, Faustulus.) Il regagna l'étable et confia les enfants à Larentia, son épouse. Selon certains, Larentia se prostituait, d'où le surnom de louve que lui donnaient les bergers. Ce serait le point de départ de la prodigieuse légende[3]. »

Dans la littérature populaire, les exemples les plus connus sont ceux de Mowgli, personnage du Livre de la jungle de Rudyard Kipling, et celui de Tarzan censé avoir été élevé par des singes anthropoïdes.

Dans la mythologie et la littérature, les enfants sauvages sont non seulement dotés de l'intelligence humaine, mais aussi d'une certaine dose d'instinct de survie en milieu naturel : s'intégrer dans la société humaine, est supposé être relativement facile pour eux. Influencés par le mythe du « bon sauvage », des auteurs comme Edgar Rice Burroughs utilisent ces personnages pour se livrer à une critique sociale d'où il ressort que la société humaine est, peut-être, plus « sauvage » que la « loi de la jungle ».

Exemples d'« enfants sauvages »

Lettre du secrétaire de la reine de Pologne relative à l'« enfant-ours » Joseph, très probable cas authentique d'enfant sauvage (9 juillet 1688, BNF (Mss.), Français 13022, f° 361v°).

Illustrations

Cas de supercherie avérée

Misha Defonseca, dans son livre Survivre avec les loups, relate son expérience de petite fille traversant toute l'Europe à la recherche de ses parents, pendant la Seconde Guerre mondiale. L'historien de la déportation Maxime Steinberg et Serge Aroles, médecin, ont mis en question la véracité de ce témoignage inspiré par des faits réels, mais étrangers à l'auteur, et exprimant surtout la misanthropie de cette femme aujourd'hui âgée, qui a perdu confiance en l'humanité et idéalise l'animal[15]. Finalement, la supercherie a été confirmée par l'intéressée elle-même qui a avoué avoir perdu ses parents dans d'autres circonstances que celles décrites, avoir été élevée par son grand-père pendant la guerre et avoir confondu sa souffrance avec celle des Juifs[16].

Le film Survivre avec les loups (2007), inspiré du livre, a été exploité en salle en tant qu'histoire vraie.

Critiques

La véracité des cas d'enfants « sauvages » est à réévaluer en fonction des recherches modernes dans les archives menées, des enquêtes sur le terrain, de l'analyse (le plus souvent négligée) des symptômes médicaux de ces « enfants sauvages », de leurs cicatrices, etc. Par exemple selon Serge Aroles, médecin, les cicatrices sur le corps de Victor de l'Aveyron ne sont pas celles d'une vie dans les bois, mais celles d'une maltraitance humaine.[réf. souhaitée]

Filmographie

Notes et références

  1. a et b Serge Aroles (en), L'énigme des enfants-loups : Une certitude biologique mais un déni des archives, 1304-1954, Editions Publibook, (lire en ligne), p. 27
  2. Lucien Malson, Les Enfants sauvages : mythe et réalité, suivi de Jean Itard, Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron, Paris : 10/18, 2003, 246 p. (10-18. Bibliothèques 10-18, no 157). (ISBN 2-264-03672-9)
  3. Histoire de Rome, Tite-Live, Ante Urbem Conditam, IV.7.
  4. a et b Serge Aroles, L'Énigme des enfants-loups : une certitude biologique mais un déni des archives (1304-1954), Paris : Publibook, 2007, 303 p., Sciences humaines (ISBN 978-2-7483-3909-3)
  5. Serge Aroles est l'un des pseudonymes utilisés par Franck Rolin, un chirurgien et écrivain français, auteur de recherches historiques sur les enfants sauvages ainsi que sur la vie de Zaga Christ dont certains aspects sont mis en lumière sur la base d'anciens manuscrits éthiopiens. Il a consacré, en 1995, sa thèse de doctorat en médecine aux troubles neurologiques observés chez les Esquimaux du Xe au XIXe siècles. Aucun détail de la vie personnelle de Franck Rolin n'est connu.
  6. Archives diplomatiques, fonds CP Pologne; et BNF (Mss.), Français 13022
  7. Archives des Affaires étrangères, CP Pologne, vol. 37, f° 293 r°, 27 août 1672
  8. Kennedy, Maev (20 March 2011). "Peter the Wild Boy's condition revealed 200 years after his death". The Guardian (London). Retrieved 20 March 2011.
  9. Xan de l'Ours, la légende de l'homme sauvage de Marc Large, préface de Renaud, éditions Cairn.
  10. (en) Philip Sherwell in Cúcuta, Colombia and Josie Ensor, « Strange life of the housewife who grew up with monkeys », Telegraph.co.uk,‎ (lire en ligne, consulté le )
  11. « Raised by monkeys, strugging to be human », sur www.newvision.co.ug (consulté le )
  12. « AFRIQUE DU SUD / SOCIÉTÉ. L'enfant sauvage, du monde des singes à l'Homo erectus », sur Courrier international, (consulté le )
  13. (en) « Child of the wild still spurns life as a human », sur The Mail & Guardian, (consulté le )
  14. « Une «enfant sauvage» découverte en Sibérie », sur FIGARO, (consulté le )
  15. « "Survivre avec les loups" : Une escroquerie !!! - Sur la piste du loup », sur www.loup.org (consulté le )
  16. « «Survivre avec les loups» : la supercherie », sur FIGARO, (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

En italien

Critique

Articles connexes

Liens externes